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VITILIGO

 

 

 

 

 

 

 

Vitiligo


Dossier réalisé en collaboration avec Thierry Passeron (hôpital Archet, CHU Nice), unité Inserm 1065  / Université Nice Sophia Antipolis – mai 2016
Le vitiligo est une maladie acquise, au cours de laquelle des taches blanches apparaissent sur la peau. Ces dépigmentations sont plus ou moins évolutives, et plus ou moins généralisées. Si le vitiligo est considéré comme une maladie bénigne, ce classement est relativisé par son puissant retentissement sur la psychologie et la qualité de vie des personnes qui en souffrent. Cet impact a favorisé le développement de la recherche. Aujourd'hui, le rôle de l’auto-immunité dans le développement de la maladie est démontré, et des traitements plus efficaces peuvent être proposés.

Le vitiligo est une dermatose qui se présente sous l'aspect d'une dépigmentation progressive de la peau. Cette achromie s'explique par la perte des mélanocytes qui synthétisent normalement la mélanine, le principal pigment colorant la peau.

Le vitiligo peut prendre deux formes. Dans la forme segmentaire, la moins fréquente, la dépigmentation est unilatérale (elle ne concerne qu’un seul côté du corps) et circonscrite à une zone bien délimitée de la peau. Ses dimensions peuvent être variables. Mais, le plus souvent le vitiligo est dit non segmentaire : dans ce cas, tout le corps peut être touché. Le vitiligo non segmentaire débute généralement avec l’apparition d’une simple tache blanche, puis évolue de façon très variable au cours du temps. Le visage, les mains et les pieds sont généralement les premières zones atteintes. Ensuite, les lésions se développent de façon bilatérale et symétrique ailleurs sur le corps. Des démangeaisons (prurit) peuvent annoncer l'apparition de nouvelles tâches. Celles-ci peuvent finir par recouvrir tout le corps : on parle alors de vitiligo universalis. Parfois, les mélanocytes des poils sont également touchés : les poils et cheveux sont alors blancs et on parle de leucotrichie. Il existe, en outre, une forme clinique rare de vitiligo, dans laquelle les dépigmentations sont localisées uniquement au niveau des muqueuses.
Le vitiligo est une maladie souvent méconnue mais relativement fréquente : on estime que 0,5 à 1% de la population mondiale est touchée, quel que soit le sexe, le type ou la couleur de peau. Des prédispositions familiales existent : une personne ayant un parent de premier degré atteint a 5 à 8% de risque de développer également la maladie.
S'il apparaît souvent à l'âge adulte, le vitiligo peut aussi apparaître dès l'enfance. Des formes congénitales existent également, même si elles sont exceptionnelles.

Le mécanisme de pigmentation
Il existe deux principaux pigments de la peau, ou mélanines : les eumélanines qui sont brun noir et les phéomélanines brun clair. Les eumélanines protègent la peau de l'effet des rayonnements UV. Plus elles sont concentrées, plus la peau est brune. Les phéomélanines ne sont pas photoprotectrices ; au contraire, elles peuvent être délétères pour la peau en participant au stress oxydatif qui accélère le vieillissement cutané et favorise l'apparition d'espèces réactives de l'oxygène, potentiellement cancérigènes.
L'épiderme est le siège de la pigmentation : il contient des mélanocytes, cellules en charge de synthétiser les mélanines. Ensuite, ces dernières sont transférées dans les kératinocytes, cellules majoritaires de l'épiderme dont le rôle est de former un revêtement protecteur. Chez les personnes atteintes de vitiligo, la peau est dépourvue de mélanocytes. La mélanine n'est donc ni produite, ni présente dans les kératinocytes épidermiques. En revanche, des précurseurs des mélanocytes (les mélanoblastes) sont présents plus profondément, au niveau du derme de la peau glabre et dans les follicules pileux : ce sont eux qui permettront de repigmenter la peau suite à un traitement (photothérapie par exemple).

Une pathologie multifactorielle, en partie génétique
Pendant longtemps, le vitiligo a été considéré comme une maladie psychosomatique. Grâce au développement de recherches dédiées, on sait aujourd'hui qu'il n'en n'est rien : le vitiligo repose sur un mécanisme en grande partie auto-immun et une origine multifactorielle, à la fois génétique et non génétique.

Une quinzaine de gènes de susceptibilité ont d'ores et déjà été associés au vitiligo : HLA, CTLA4, NLRP1, TYR… certains sont impliqués dans la pigmentation de la peau, d'autres sont liés au fonctionnement du système immunitaire ou à l'apparition de maladies auto-immunes. Ceci expliquerait pourquoi 15 à 20% des personnes atteintes de vitiligo généralisé souffrent parallèlement d'une hypo- ou d'une hyperthyroïdie auto-immune (thyroïdite de Hashimoto, maladie de Basedow). De façon moins fréquente, d'autres maladies auto-immunes peuvent lui être associées, comme la polyarthrite rhumatoïde, le diabète de type 1 ou les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin…
Les personnes portant un ou plusieurs gènes de susceptibilité ont plus de risque de développer la maladie, mais elles ne seront pas systématiquement atteintes. Les facteurs déclenchant le processus immun restent encore méconnus. On sait cependant que le stress, au sens médical du terme, peut favoriser l'apparition ou l'aggravation du vitiligo : stress psychologique, mais aussi stress physiologique lié à une grossesse, à un acte chirurgical, à une maladie aiguë… Pour autant, cet impact est relatif : tous les patients ayant un vitiligo n’ont pas été soumis à un stress et, à l'inverse, la prise en charge thérapeutique du stress ne permet pas d'améliorer le vitiligo ou d'éviter son évolution.

Les mécanismes sous-jacents sont encore méconnus
Si la nature auto-immune du vitiligo est probable, les mécanismes sous-jacents ne sont pas encore bien compris. Leur description sera nécessaire pour être en mesure de développer des traitements ciblés permettant de contrer spécifiquement l’évolution de la maladie et de repigmenter les lésions.
Aujourd'hui, il est établi que l'épiderme des régions touchées par le vitiligo ne présente plus de mélanocytes. Les données actuelles soulignent essentiellement le rôle de l’immunité cellulaire et plus particulièrement celui des lymphocytes T, dans la destruction spécifique des cellules mélanocytaires. Une des voies de signalisation cellulaire, la voie IFN-gamma / JAK / CXCL10, semble jouer un rôle clef. Elle constituerait une cible potentielle pour bloquer l'évolution de la maladie.
Des données récentes soulignent cependant que la réaction immunitaire est absente dans la peau complètement dépigmentée. Les peaux vitiligineuses présentent en revanche, une altération dans une autre voie de signalisation, la voie de Wnt. Cette dernière semble essentielle à la différenciation des cellules souches mélanocytaires en mélanocytes producteurs de pigments. La diminution d’activité de la voie Wnt serait ainsi un frein majeur à la repigmentation de la peau atteinte. La stimulation de cette voie par les médicaments appliqués localement  pourrait ainsi permettre de repigmenter les plaques de vitiligos, notamment dans les zones qui répondent mal aux traitements physiques (photothérapie), comme les mains et les pieds.
Concernant les différences entre vitiligo segmentaire et vitiligo généralisé, elles restent encore mal comprises. Cependant, des altérations spécifiques de mélanocytes dans une zone localisée de la peau pourraient expliquer les formes segmentaires ; ces anomalies surviennent probablement lors du développement embryonnaire.

Un diagnostic simple mais une évolution difficile à prédire
Le diagnostic du vitiligo est clinique. Le recours à une biopsie cutanée est exceptionnel.
Pour établir ce diagnostic avec certitude, l'observation des zones blanches est conduite à l’aide d’une lampe émettrice d'UVA long et de lumière bleue violette, appelée lampe de Wood. Elle permet de s'assurer de la totale dépigmentation des zones devenues blanches, ainsi que de différencier les régions ayant encore un potentiel de repigmentation de celles qui en sont dénuées. Elle peut également montrer des contours flous ou des dépigmentations en confettis, qui traduisent une forte activité de la maladie.

La lampe de Wood aide aussi à distinguer le vitiligo d'autres pathologies qui peuvent engendrer une hypopigmentation, à l'origine d'un éclaircissement de la peau : dartres, psoriasis, eczémas…
Lorsque le diagnostic est posé, il est important que le patient comprenne bien la nature de la maladie et le principe de son traitement. Une des difficultés pour les patients est de ne pas disposer de facteur prédictif de l'extension et de la généralisation de la maladie. Seul phénomène reconnu (dit phénomène de Koebner) : l'apparition de nouvelles lésions est favorisée au niveau des cicatrices récentes, de zones lésées, ou encore de zones soumises à des frottements réguliers.

Les principales conséquences sont psychologiques
Le vitiligo n'est pas une maladie grave sur le plan médical. Contrairement à l'idée longtemps admise, le vitiligo n'augmente pas le risque de cancer de la peau : au contraire, des études épidémiologiques ont démontré que les mélanomes étaient trois fois moins fréquents chez les personnes atteintes par cette dermatose que dans la population générale. Le risque de développer des carcinomes cutanés est également diminué. Cependant, le vitiligo a un impact psychologique considérable car il est stigmatisant. Ce retentissement ne doit pas être sous-estimé.
La demande de traitement de la part des patients est forte et doit être satisfaite. Pendant longtemps, les options thérapeutiques étaient peu nombreuses et insatisfaisantes. Depuis quelques années, des progrès ont heureusement été réalisés : s'il n'est pas possible d'empêcher la maladie d'apparaître et de se développer, on peut aujourd'hui repigmenter une part importante des lésions de vitiligo.

Des traitements en plein essor
Du maquillage médical (proposé par des dermatologues formés) ou, dans une moindre mesure, des autobronzants, peuvent masquer les lésions bien délimitées. Mais, lorsqu’il existe une demande forte de traitement de la part des patients, il faut pouvoir proposer l'un de ceux reconnus. Il existe deux alternatives principales : des crèmes à appliquer sur les lésions et des traitements physiques par rayonnement UV. Pour les zones cutanées qui répondent classiquement mal aux traitements, il n'est pas rare de combiner ces deux approches thérapeutiques pour en potentialiser l'efficacité. La chirurgie, elle, est une alternative d'exception (cf. encadré).

Quelle que soit l'option choisie, la repigmentation est un phénomène long et le traitement nécessite souvent 6 à 24 mois pour donner des résultats satisfaisants. La réponse varie également selon la localisation des lésions : les zones dépigmentées qui répondent le mieux sont celles présentes sur le visage alors que celles qui touchent les mains et les pieds sont les plus difficiles à repigmenter. Dans tous les cas, et malgré le succès d’un traitement, il n'est pas rare que la dépigmentation récidive et qu’il soit nécessaire de tout recommencer.
Le choix entre crèmes et UV peut être orienté par la taille et la localisation des taches. Les crèmes pour application locale (traitements topiques) – à base de dermocorticoïdes ou de tacrolimus (hors AMM) - sont prescrites en première intention. Celles contenant des corticoïdes ne doivent cependant pas être appliquées sur le visage, ni utilisées plus de deux à trois mois, à raison de cinq jours de traitement par semaine.
Si ces traitements topiques ne donnent pas de bons résultats, la photothérapie peut être proposée, seule ou associée aux topiques : la peau est soumise deux à trois fois par semaine à un rayonnement UVB, administré en cabine (UVB spectre étroit 311 nm), ou bien par lampe ou laser Excimer (308 nm). On les préfère désormais aux UVA (PUVAthérapie, auparavant utilisés en association avec des psoralènes), car ils présentent une meilleure efficacité et moins d'effets secondaires.
Parallèlement, pour les personnes dont le vitiligo est quasi-généralisé, provoquer la dépigmentation des zones de peau normales peut constituer une bonne alternative : l'opération est alors conduite par traitement laser.

La greffe mélanocytaire, une réalité
La greffe de mélanocytes autologues est une bonne solution pour le traitement des lésions stables, n'ayant pas évoluées depuis au moins un an, ainsi que pour le vitiligo segmentaire.
La procédure est simple : une petite zone de peau non dépigmentée est prélevée sous anesthésie locale et les cellules qui la composent (notamment des mélanocytes et des kératinocytes) sont mises en suspension. Dans un second temps, les lésions à traiter sont dermabrasées (retrait de l'épiderme) et la suspension y est appliquée. La reprise de la pigmentation est progressive, optimale après 3 à 6 mois. Un traitement topique ou par photothérapie peut être utilisé pour améliorer encore le résultat.

Des perspectives encourageantes
Avec l'identification des mécanismes biologiques et moléculaires impliqués dans la physiopathologie du vitiligo, de nouveaux traitements sont aujourd'hui en développement : parmi eux, des traitements locaux à base de prostaglandine E2, d'afamélanotide, d'inhibiteurs de JAK ou encore des molécules impliquées dans la voie du CXCL10, pourraient offrir de nouvelles approches pour repigmenter les zones de vitiligo.
Un des problèmes à régler aujourd’hui est de parvenir à repigmenter les régions de la peau au niveau desquelles la réaction immunitaire est absente (vitiligo ancien par exemple). Dans ce cas, il est nécessaire de disposer de traitements ne ciblant plus le mécanisme immunitaire délétère, mais favorisant la différenciation des cellules souches mélanocytaires. Un traitement stimulant la voie Wnt permettrait de favoriser la différenciation de nouveaux mélanocytes à partir des cellules souches dormantes. Il serait particulièrement intéressant pour les zones de la peau difficiles à repigmenter, comme les extrémités (mains, pieds).

 

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Techniques de préservation de la fertilité

 

 

 

 

 

 

 

Techniques de préservation de la fertilité


Dossier réalisé en collaboration avec le Dr Michael Grynberg, gynécologue-obstétricien, maître de conférence, praticien hospitalier - Service de médecine de la reproduction, Hôpital Jean Verdier, Bondy / Université Paris XIII / Unité Inserm 782, Clamart - Septembre 2013.
Diverses techniques sont aujourd’hui disponibles pour préserver la possibilité d’avoir un enfant à l’issue d’un traitement potentiellement toxique pour l’appareil reproducteur. La loi de bioéthique impose à chaque praticien d’informer ses patients sur cette possibilité avant la mise en œuvre d’un traitement pouvant affecter sa fertilité. Ce dossier fait le point sur les méthodes actuelles et en cours de développement, ainsi que de leurs indications.

La prise en charge de diverses maladies nécessite l’utilisation de traitements potentiellement toxique pour l’appareil reproducteur. Les personnes atteintes de cancers solides ou d’hémopathies malignes (cancers du sang) sont particulièrement concernés par cette problématique : les chimiothérapies antitumorales, la radiothérapie ou encore la chirurgie pelvienne peuvent en effet, à des degrés divers, être à l’origine d’altérations quantitative et/ou qualitative de la gamétogenèse (mécanisme biologique conduisant à la formations des ovocytes et des spermatozoïdes), du fonctionnement des ovaires et des testicules ou encore de la sexualité.

Ces altérations surviennent généralement pendant le traitement et persistent parfois définitivement. Le risque dépend du type de traitements administrés, des doses utilisées et de l’âge auquel ils sont réalisés. Par exemple, chez la femme, une irradiation pelvienne (radiothérapie) entraine un risque d’insuffisance ovarienne prématurée, c’est à dire un déficit en ovules avant l’âge habituel de la ménopause, de l’ordre de 8 % si la radiothérapie a été faite avant 18 ans, contre 0,8 % dans la population générale. Le traitement par Iode 131 à haute dose (800 mCi) utilisé en cas de pathologie thyroïdienne est quant à lui associé à un risque d’infertilité permanente de l’ordre de 60 % chez la femme et de 90 % chez l’homme.

La préservation de la fertilité peut également être recommandée lorsqu’un projet de grossesse doit être repoussé après un traitement anti-cancéreux, en raison du risque de rechutes et/ou du risque de développement anormal de l’embryon. Par exemple, après un cancer du sein hormonodépendant, une hormonothérapie est classiquement prescrite pour une durée de cinq ans pendant laquelle il est recommandé de ne pas concevoir. Chez la femme de plus de 35 ans, ce délai peut lui faire perdre du potentiel de fertilité, tant naturel que médicalement assisté, en la confrontant au vieillissement ovarien physiologique.

D’autres indications que le cancer
Des malades souffrant de problèmes hématologiques bénins (drépanocytose, thrombocytémie essentielle) ou auto-immuns (lupus, polyarthrite rhumatoïde), et plus globalement ceux atteints par toutes les maladies susceptibles d’être traitées par des molécules toxiques pour les ovaires et les testicules ou de toxicité encore mal évaluée pour la fonction de reproduction sont également éligibles à une préservation de leur fertilité.
D’autres indications non médicales concernent des femmes qui souhaitent différer un projet de grossesse. Plusieurs pays autorisent ainsi la congélation d’ovocytes simplement dans le but de repousser l’âge de la maternité sans avoir à subir le déclin de la fertilité liés au vieillissement. Cette pratique est actuellement interdite en France par la loi de bioéthique.

Une sensibilité individuelle et des risques souvent difficiles à évaluer
Le niveau de toxicité d’un traitement reste difficile à évaluer précisément car il dépend du type de molécules utilisées, de leurs doses et de la fonction ovarienne ou testiculaire au moment de la mise en œuvre du traitement. S’il est bien établi que les agents dits « alkylants » utilisés en chimiothérapie (cyclophosphamide, chlorambucil, procarbazine…) sont les molécules les plus agressives pour le tissu gonadique (ovarien et testiculaire), il existe des variations individuelles de sensibilité aux agents chimiothérapeutiques qui rendent difficile la possibilité de prédire avec certitude l’état de la fonction gonadique à l’issue du traitement.

De fait, une préservation de la fertilité doit être envisagée à titre préventif pour tous les enfants et les adultes en âge de procréer qui vont recevoir un traitement potentiellement toxique pour l’appareil reproducteur.
Des milliers de personnes concernées mais peu de cas en pratique
L’amélioration des soins en cancérologie offre souvent un bon pronostic aux patients jeunes, notamment aux enfants. Préserver leur fertilité est donc un enjeu majeur pour leur qualité de vie ultérieure. En 2005, 1 700 enfants de moins de 15 ans, 2 000 adolescents et jeunes adultes de moins de 24 ans, mais également 5 800 hommes âgés de 24 à 40 ans et plus de 4 600 femmes âgées de 24 à 35 ans ont eu un cancer. Toutes ces personnes sont théoriquement éligibles à une préservation de leur fertilité. Mais dans les faits, seulement 200 à 300 ovocytes ou échantillons de tissus ovariens issus des femmes atteintes de cancer ont été congelés en 2012. La même année, à peine une centaine d’enfants ont bénéficié d’une stratégie de préservation de la fertilité. Ces chiffres attestent d’un défaut d’information des professionnels de santé et des patients et d’une organisation qui peine à se mettre en place.

Les différentes techniques de préservation de la fertilité
Certaines techniques de préservation de la fertilité sont encore en cours de développement, notamment en ce qui concerne la congélation des tissus germinaux (ovariens et testiculaires). Cependant, les progrès sont fulgurants. Ils offrent aux adolescents dont on congèle aujourd’hui du tissu un réel espoir de pouvoir concevoir un enfant dans 10 ou 15 ans.

Préservation de la fertilité masculine
Conservation du sperme
La congélation du sperme est pratiquée depuis environ 30 ans. Les échantillons sont recueillis par masturbation chez les personnes qui ont des spermatozoïdes matures (en général à partir de 12 ans). Néanmoins, dans plus de 10 % des cas, le recueil peut poser problème compte tenu de l’état de santé du patient ou de son âge (jeune adolescent notamment). En outre, les caractéristiques du sperme (le nombre de spermatozoïdes et leur mobilité) peuvent être sévèrement diminuées du fait de l’état général du patient. Dans ces situations, un prélèvement chirurgical de spermatozoïdes directement dans les testicules peut être envisagé, même de façon urgente.
Après décongélation, les spermatozoïdes peuvent être utilisés pour une insémination intra-utérine ou encore pour une fécondation in vitro. Actuellement, 40 000 hommes disposent de sperme congelé en France.

Conservation de tissu testiculaire
Chez le garçon prépubère, le recueil de spermatozoïdes par masturbation est impossible. Il est donc proposé de prélever et de congeler du tissu testiculaire. Le prélèvement s’effectue au cours d’une intervention chirurgicale. L’objectif est d’utiliser ces échantillons de tissu pour réaliser une maturation in vitro des cellules germinales immatures qu’ils contiennent. Une autre possibilité est de réimplanter le tissu prélevé à l’issue du traitement toxique.
A ce jour, ces deux techniques sont encore expérimentales. La greffe devrait théoriquement permettre de restaurer la fonction totale du testicule, mais aucun essai n’a encore permis de valider ce postulat. En outre, il existe un risque théorique de réintroduire des cellules malignes présentes dans le tissu prélevé chez le patient (malgré les précautions prises par les cytologistes). Un protocole de recherche appelé Prosperma, réservé aux enfants de 2 à 16 ans, vise actuellement à optimiser ces prélèvements de tissus.

Préservation de la fertilité féminine
Conservation ovocytaire ou embryonnaire
Cette technique nécessite le prélèvement d’ovocytes. Il se fait par ponction transvaginale, à l’issue d’un traitement hormonal (stimulation ovarienne, pour en savoir plus consultez notre dossier sur l’assistance médicale à la procréation).
La congélation des ovocytes a longtemps été plus problématique que celle du sperme, en raison du volume et de la teneur en eau des gamètes féminins. Cette difficulté a été contournée grâce à la « vitrification ». Cette technique de congélation ultrarapide consiste à plonger les cellules directement dans l'azote liquide à -196°C au lieu de procéder à une congélation lente comme pour le sperme. La vitrification évite la formation de cristaux qui altéraient dans l’ovocyte lors de la décongélation.
Dans certains cas, le délai nécessaire à la stimulation ovarienne ne peut être respecté compte tenu de l’urgence du traitement anticancéreux. Par ailleurs, en cas de cancer hormonodépendant, cette stimulation est théoriquement contre-indiquée. Dans ces situations, il est possible de prélever des ovocytes immatures (sans stimulation ovarienne), de les faire maturer in vitro, puis de congeler les ovocytes matures ou de les féconder en vue d’une cryopréservation embryonnaire.
La cryopréservation d’embryons se pratique quant à elle en routine depuis plus de 25 ans dans tous les centres d’assistance médicale à la procréation. Plus de 90 % des embryons résistent aujourd’hui à la décongélation et le transfert d’embryon congelé donne une naissance dans environ 10 % des cas.

Conservation du tissu ovarien
Chez les femmes pubères et prépubères, il est aussi possible de prélever et de congeler du tissu ovarien depuis 1995. Cette technique est particulièrement indiquée en cas de traitement très toxique pour les ovaires, tel qu’une radiothérapie pelvienne ou une chimiothérapie à base d’alkylants à fortes doses. Elle permet de préserver un grand nombre de follicules en vue d’une greffe ultérieure. Le prélèvement est réalisé à l’occasion d’une cœlioscopie et peut être effectué sans délai, quelle que soit la phase du cycle.

La transplantation d’un ou plusieurs fragments ovariens a pour objectif de rétablir une fonction ovarienne complète. De fait, elle permet d’envisager des grossesses naturelles ou médicalement assistées. La durée fonctionnelle des greffons est variable, de quelques mois à plusieurs années, permettant ainsi d’envisager plusieurs grossesses. Néanmoins, le risque théorique de réimplanter des cellules malignes présentes dans le greffon n’est pas nul et il peut constituer une contre-indication à cette stratégie.
Des recherches très actives sont actuellement menées pour permettre l’obtention de follicules matures à partir des follicules primordiaux contenus dans les fragments de tissu ovarien. Ces techniques de « folliculogenèse in vitro » permettront à terme d’éviter les greffes, en particulier dans les cas où un risque de réintroduction de cellules malignes n’est pas exclu.
 
La préservation de la fertilité en pratique
En France, la loi de bioéthique impose à tout professionnel de santé d’informer son patient des risques potentiels pour sa fertilité en cas de traitement toxique et de lui proposer éventuellement la mise en place de techniques de préservation de la fertilité. Le patient doit signer un consentement obligatoire pour la conservation de ses gamètes (ovules ou spermatozoïdes) ou de ses tissus germinaux (ovariens ou testiculaires). Pour les mineurs, les titulaires de l’autorité parentale doivent signer ce consentement en veillant à ce que l’enfant comprenne au mieux de quoi il retourne.
Les 23 centres d'étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos) assurent la gestion des gamètes et embryons congelés ainsi que celle des tissus testiculaire et ovarien. Chaque année, les centres s’assurent par écrit de la volonté des patients de poursuivre ou non la conservation. En cas de décès, les échantillons sont détruits.
Les techniques de prélèvement et de congélation des gamètes ou tissus testiculaires sont prises en charge par l’assurance maladie. Cependant, les frais de conservation restent à la charge du patient.

Quels résultats en termes de fertilité ?
Avec l’utilisation d’embryons ou de gamètes (spermatozoïdes ou ovocytes matures) congelés, les chances de grossesse varient de 13 % à 30 % par tentative, en fonction des techniques de procréation médicalement assistée utilisées (consultez notre dossier sur l’assistance médicale à la procréation). La congélation d’ovocytes étant plus récente, seulement 2 000 enfants dans le monde sont nés suite à ce mode de préservation, dont environ 30 en France.
La maturation in vitro d’ovocytes (MIV) fonctionne également, bien que les résultats restent moins bons que ceux obtenus avec des gamètes recueillis après stimulation ovarienne. Environ 5 000 enfants sont nés à travers le monde grâce à une MIV sans congélation, mais encore très peu après congélation d’un ovocyte maturé in vitro. En France, cette technique est proposée par les centres de médecine et biologie de la reproduction des hôpitaux Antoine Béclère à Clamart et Jean Verdier à Bondy.
Quant à la conservation du tissu ovarien, 1 296 filles ou femmes disposaient d’un échantillon congelé en France en 2010. Une trentaine de naissances ont été obtenues dans le monde après décongélation et greffe, naturellement ou par assistance médicale à la procréation, dont 4 en France.


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THÉRAPIE GENIQUE

 

 

 

 

 

 

 

Thérapie génique


Dossier réalisé en collaboration avec Anne Galy, directeur de recherche à l’Inserm (unité 951 Inserm / université d'Evry Val d'Essonne / Ecole pratique des hautes études, "Immunologie moléculaire et biothérapies innovantes", Généthon, Evry) - Mars 2014.
La thérapie génique utilise des acides nucléiques (ADN ou ARN) pour soigner ou prévenir des maladies. Selon la pathologie, cet objectif peut être atteint en délivrant aux cellules un gène fonctionnel qui remplace le gène défectueux à l’origine de la maladie (transgène), un gène à action thérapeutique, ou encore de l’ARN capable de réguler ou bloquer partiellement l’expression d’un gène altéré. Ces acides nucléiques sont le plus souvent transportés dans les cellules du patient grâce à un vecteur viral, mais ils peuvent également être injectés directement dans les cellules, sous forme d’ADN nu.

Cellule hématopoïétique corrigée par tranfert de gène.
Le concept de thérapie génique date des années 1950 mais il s’est réellement concrétisé dans les années 90, avec les premiers essais conduits chez l’homme. En 1995, le premier patient traité de façon stable grâce à l’injection de cellules souches et de lymphocytes génétiquement modifiés (par une équipe milanaise) était atteint d’immunodéficience sévère de type ADA DICS. Un premier pas, transformé dans les années 2000 par un succès thérapeutique éclatant, obtenu à l’hôpital Necker chez les patients atteints d’une autre forme de déficit immunitaire (DICS de type X1) (voir plus loin). A l’époque, la thérapie génique était souvent présentée comme un moyen de lutter contre des maladies monogéniques (liée à la dysfonction d’un seul gène), en délivrant un gène "sain" capable de suppléer le gène "malade". En réalité, les indications sont beaucoup plus larges : plus de 1 800 essais cliniques de thérapie génique sont en cours à ce jour, dont 65 % en cancérologie, 10 % dans le domaine cardiovasculaire et 10 % seulement dans celui des maladies monogéniques (en particulier des immunodéficiences et des maladies hématologiques, mais également des pathologies comme la mucoviscidose). D’autres essais concernent des maladies infectieuses (tétanos, sida…), neurologiques (sclérose latérale amyotrophique, la sclérose en plaques ou encore les maladies d’Alzheimer et de Parkinson), ophtalmologiques (rétinite pigmentaire, glaucome, dégénérescence maculaire liée à l’âge) ou encore dans des maladies inflammatoires comme l’arthrose ou la polyarthrite rhumatoïde.
Environ trois quarts de ces essais sont des études de phase I ou II, qui évaluent la sécurité et l’efficacité des traitements testés. Les essais de phase III (qui permettent de statuer sur le rapport bénéfice/risque d’un nouveau traitement par rapport à un traitement de référence ou à un placebo) ne représentent que 4,5 % des études cliniques en cours. Néanmoins, ce chiffre ne cesse de progresser, avec de belles promesses par exemple dans le traitement de maladies monogéniques telles que l’amaurose congénitale de Leber, l’hémophilie B, la bêta-thalassémie ou dans le traitement du cancer, par transfert de lymphocytes T génétiquement modifiés.
Deux médicaments de thérapie génique sur le marché
Deux médicaments ont déjà surmonté tous les obstacles du développement clinique et sont déjà sur le marché. L’un d’eux, Gencidine est commercialisé en Chine depuis 2004. Il est indiqué dans le traitement de carcinomes de la tête et du cou. Il s’agit d’un gène suppresseur de tumeur (p53), véhiculé par un adénovirus. Plus de 10 000 patients ont été traités par ce médicament à ce jour, sans effet indésirable notable. En Europe, le premier médicament de thérapie génique a été approuvé fin 2012. Il s’agit du Glybera, injectable par voie intramusculaire, indiqué en cas de déficit familial en lipoprotéine lipase.
L’arrivée de ce médicament sur le marché européen a marqué un tournant décisif dans ce domaine médical : la thérapie génique n’est plus seulement une stratégie expérimentale étudiée en laboratoire. Elle peut aboutir à la mise au point de médicaments commercialisables, à condition de surmonter les contraintes règlementaires et industrielles (production de vecteurs et de transgènes dans des conditions standardisées et contrôlées, évaluation précise du rapport bénéfice-risque). Ce développement ne peut se faire sans le concours d’experts médicaux et industriels.
Les techniques diffèrent en fonction des indications

Les deux principales stratégies de thérapie génique : La thérapie génique consiste à modifier génétiquement des cellules d’un patient, pour soigner ou prévenir une maladie. Les protocoles utilisés varient en fonctions des indications et des objectifs thérapeutiques. Les cellules peuvent être modifiées in vivo, directement dans l’organisme du patient, ou ex vivo. Dans le second cas, des cellules souches sont prélevées chez le patient, modifiées en laboratoire, puis réinjectées.
Les protocoles de thérapie génique varient en fonction des indications et des objectifs thérapeutiques à atteindre. Cependant, ils consistent toujours à modifier génétiquement les cellules du patients, ex vivo ou in vivo, de façon pérenne ou transitoire.
Ainsi, dans le cas d’une maladie monogénique qui affecte les cellules sanguines, des cellules souches hématopoïétiques (cellules à l’origine de l’ensemble des cellules sanguines) sont prélevées chez le patient lors d’une procédure qui s’apparente à une simple prise de sang. Ces cellules sont ensuite modifiées ex vivo : un vecteur (voir plus loin) est utilisé pour leur délivrer un transgène thérapeutique, puis elles sont placées en culture pendant quelques jours. Lorsque les cellules ainsi traitées commencent à exprimer le gène thérapeutique, elles sont finalement réinjectées au patient par perfusion veineuse. Les cellules modifiées vont alors proliférer dans l’organisme du patient et, à priori, contribuer à le soigner. L’avantage de cette approche est de modifier une population de cellules bien précise, sans risque de voir le vecteur pénétrer dans des organes non ciblés.
Cependant, il n’est pas toujours possible de prélever les cellules à corriger : cette stratégie ne peut être utilisée lorsqu’il s’agit de modifier des cellules cardiaques ou encore des neurones. Des protocoles prévoient alors l’injection du vecteur contenant le transgène directement dans les organes cibles, in vivo. Par exemple, dans le cas de l’amaurose de Leber, une dégénérescence rétinienne responsable de cécité, l’injection du vecteur contenant le transgène se fait directement dans la rétine. Avec cette stratégie, le risque est une dissémination du transgène moins maîtrisée.
Dans 2 % des essais de thérapie génique, la technique utilisée s’apparente à une chirurgie du gène : on parle de "saut d’exon". Cette approche consiste à amener la cellule à produire une version de la protéine déficiente chez le patient plus courte que la protéine normale mais fonctionnelle, en "sautant" la partie du gène qui porte la mutation à l’origine de la maladie. Le saut d’exon a été testé pour traiter la dystrophie de Duchenne chez l’animal (équipe d’Olivier Danos et Luis Garcia, Généthon, Evry), puis chez l’homme. Plusieurs essais cliniques sont en cours, notamment à l’Institut de Myologie à Paris. Cette technique s’applique particulièrement bien à cette maladie car le gène impliqué est trop grand pour être transporté par un vecteur de transfert de gène. Des applications potentielles sont envisagées dans d’autres pathologies génétiques.

Une autre approche, consistant à réparer le gène altéré directement au cœur de la cellule, est séduisante par sa précision. Elle éviterait certains effets indésirables associés au transfert d’un transgène. En pratique, cette stratégie s’appuie sur l’utilisation d’enzymes appelées "nucléases", capables de repérer des séquences particulières de l’ADN de part et d’autre de la mutation à réparer et de couper le chromosome à cet endroit précis. La machinerie cellulaire se met alors en marche pour réparer son ADN. Si une copie "saine" du gène à restaurer est alors délivrée dans la cellule, elle va servir de matrice de réparation, permettant ainsi la reconstitution d’un gène complet et fonctionnel. Cette technique fonctionne efficacement in vitro et les premiers essais conduits in vivo sont en cours. Une société française, Cellectis, est pionnière dans le domaine.
 
Le choix de l’acide nucléique thérapeutique dépend de l’indication
Dans le cadre du traitement du cancer, une piste privilégiée consiste à stimuler le système immunitaire du patient contre sa propre tumeur, de manière à faciliter la reconnaissance des cellules cancéreuses et leur élimination. Pour y parvenir, des essais ont par exemple consisté à prélever des lymphocytes T ou des cellules présentatrices d’antigènes de type dendritique chez les patients, à y introduire un gène codant pour une protéine impliquée dans la reconnaissance des cellules tumorales ou dans leur destruction (antigènes tumoraux, cytokines, gènes suppresseurs de tumeur ou encore enzymes suicides) et à réinjecter le tout dans l’organisme des patients. Les résultats sont globalement mitigés. Des améliorations restent à réaliser pour rendre les vecteurs utilisés plus immunogènes ou mieux contrôlables.
Dans le domaine cardiovasculaire, les chercheurs tentent d’utiliser la thérapie génique pour favoriser la régénération des tissus vasculaires en cas d’ischémie artérielle. Pour ce faire, ils utilisent des gènes codants pour des facteurs de croissance vasculaires. Ils essaient également de diminuer la resténose (prolifération cellulaire non souhaitée après la pose d’un stent) en injectant des produits inhibant la croissance cellulaire des parois artérielles.

Thérapie génique de l'adrénoleucodystrophie
Dans le cadre de la prise en charge des maladies monogéniques, de nombreux essais concernent les déficits immunitaires comme l’immunodéficience sévère combinée (SCID), l’immunodéficience par déficit en adénosine désaminase (ADA-SCID), le syndrome de Wiskott Aldrich ou la granulomatose septique chronique, mais également des maladies hématologiques comme l’hémophilie B ou A, l’anémie de Fanconi ou encore la bêta-thalassémie. D’autres travaux concernent les pathologies rétiniennes comme l’amaurose de Leber ou la neuropathie optique de Leber, les maladies lysosomales comme la maladie de Sanfilipo ou la maladie de Gaucher et d’autres maladies neuro-dégénératives comme l’adrénoleucodystrophie ou la leucodystrophie métachromatique. Dernier exemple, les maladies de la peau telles que l’épidermolyse bulleuse. Toutes ces pathologies sont liées au défaut de fonctionnement d’un gène unique.
Dans le cas des maladies hématologiques, plusieurs essais consistant à modifier des cellules souches ex vivo en y injectant une copie saine du gène à l’origine de la maladie, puis à les réinjecter dans le sang du patient ont montré un bénéfice durable pour les patients. Dans le futur, l’utilisation de divers types de cellules souches telles que les cellules souches pluripotentes induites, ou encore de nouvelles modalités d’ingénierie tissulaire, pourront faire partie de l’arsenal thérapeutique associé à la thérapie génique.
Dans le domaine des maladies infectieuses, un traitement curatif par thérapie génique pourrait être envisagé par exemple en cas d’infection par le VIH. Plusieurs approches sont étudiées. La première consiste à modifier les lymphocytes T4 CD4 des patients (cibles du VIH) afin de les rendre résistants au virus. A cette fin, un clinicien prélèverait des cellules souches hématopoïétiques dans le sang du patient et y ferait rentrer un gène qui rendrait ces cellules insensibles au virus (plusieurs gènes pourraient être utilisés comme le démontre des essais réalisés in vitro). Les cellules modifiées seraient ensuite réinjectées dans l’organisme du patient et conduiraient à la production de lymphocytes T4 CD4 résistants au VIH, capables de survivre et de se multiplier. Des essais conduits chez l’animal et, récemment, un essai clinique mené chez l’homme ont été publiés : les résultats sont encourageants. Dans le cadre d’une seconde approche, les chercheurs travaillent au développement de vaccins à partir de vecteurs viraux utilisés pour le transfert de gène. Des résultats encourageants en terme de protection ont été obtenus chez les primates et des essais se préparent chez l’homme.
Les vecteurs, une clé du succès de la thérapie
Pour faire pénétrer l’acide nucléique à visée thérapeutique dans les cellules du patient, on utilise un vecteur chargé d’assurer ce transport. Des virus modifiés (vecteurs viraux) sont utilisés dans plus de deux tiers des essais. Ce type de vecteurs reste la référence à ce jour.
Il existe des vecteurs viraux non réplicatifs (qui ne peuvent se multiplier), intégratifs (l’ADN du vecteur viral s’intègre dans l’ADN de l’hôte), non intégratifs (le transgène demeure dans la cellule sans s’intégrer au génome de l’hôte) et des vecteurs non viraux non intégratifs. Dans tous les cas, les vecteurs utilisés font l’objet d’une ingénierie importante pour annuler leur potentiel toxique et, lorsque cela est nécessaire, pour les rendre les plus silencieux possibles vis-à-vis du système immunitaire de l’hôte afin de permettre une correction thérapeutique à long terme.

Les débuts de la thérapie génique ont été marqués par des accidents liés à l’utilisation de vecteurs viraux qui ont pénétré dans des organes non cibles, ou qui ont provoqué l’intégration du transgène dans des séquences dites "pro-oncogènes" du génome du patient, déclenchant des cancers voire des décès. Ces accidents ont incité les chercheurs à explorer le fonctionnement précis de ces vecteurs viraux, la façon dont ils intègrent leur ADN dans les chromosomes de l’hôte... Ces connaissances ont beaucoup contribué au développement de la thérapie génique, grâce à la mise au point de vecteurs plus sûrs et plus efficaces. L’avènement des techniques "à haut débit" pour le séquençage des génomes et l’analyse des séquences obtenues a constitué une avancée indispensable dans ce secteur.
Les vecteurs viraux intégratifs insèrent leur ADN (qui contient le transgène thérapeutique) dans le génome de l’hôte. En conséquence, le gène thérapeutique est transmis aux cellules filles en cas de divisions cellulaires. Ces vecteurs sont idéaux en cas de thérapie cellulaire et de thérapie génique utilisant des cellules souches, ainsi que dans les approches où l’effet recherché doit être permanent.
Parmi les vecteurs viraux intégratifs, les rétrovirus ont été beaucoup utilisés dans les années 2000, mais le recours à cette famille de vecteurs viraux déclinent peu à peu : aujourd’hui moins de 20 % des essais en cours les utilisent. Ils ont en effet été impliqués dans la survenue de leucémies lors des essais menés sur les "enfants bulles" dans les années 2000. Ces virus sont désormais mieux connus et maitrisés, de sorte à réduire le risque d’insertion aléatoire dans le génome de l’hôte. Une fonction d’ "auto-inactivation" empêche notamment le virus de déclencher l’expression inopportune d’un gène proche du site où il s’est inséré.
Mais pour palier ce risque d’insertion aléatoire, les chercheurs utilisent de plus en plus souvent des lentivirus. Ceux-ci semblent en effet avoir un profil d’intégration génomique plus sûr que celui des rétrovirus. Par ailleurs, les lentivirus pénètrent bien dans des cellules qui ne se divisent pas comme les neurones ou les cellules hépatiques (alors que les rétrovirus s’y insèrent mal). Ces virus sont dérivés de virus humains comme le VIH, mais ils sont modifiés de manière à être inoffensifs. Des essais ont été menés grâce à ces vecteurs dans le traitement de l'adrénoleucodystrophie (par l’équipe de Nathalie Cartier et Patrick Aubourg, unité Inserm 986, Kremlin-Bicêtre) ou encore dans le traitement d'hémoglobinopathies (par l’équipe de Philippe Leboulch et Yves Beuzard, à Paris), en collaboration avec le Centre d’investigation clinique intégré en biothérapie de l’hôpital Necker (Paris). Par ailleurs, compte tenu du potentiel de ces vecteurs et grâce au travail de l’équipe d’Anne Galy (unité Inserm 951, Evry), le Généthon a mis en place une production industrielle de vecteurs lentiviraux et collabore avec de nombreuses équipes internationales qui les utilisent, notamment pour le traitement du syndrome de Wiskott-Aldrich.
Quand il s’agit de faire pénétrer un transgène dans des cellules qui ne se divisent pas, les vecteurs non intégratifs sont privilégiés car ils sont considérés comme plus sûrs. Avec ces vecteurs, le transgène reste dans la cellule de l’hôte, mais sans s’insérer dans son génome. Il s’exprime pendant la durée de vie de la cellule et disparaît avec la mort de celle-ci. Les adénovirus ont été très utilisés dans le passé mais leur usage tend à diminuer, notamment pour le traitement des maladies monogéniques. Ils restent cependant des vecteurs de choix en immunothérapie contre le cancer. Ils peuvent transporter de plus grandes séquences d’ADN que les virus intégratifs, même si la taille maximale des transgènes transportés reste parfois inférieure à celle de gènes humains. Ce type de vecteurs présente plusieurs avantages : il pénètre bien dans les cellules qui ne sont pas en division et il est associé à un niveau élevé d’expression du gène vectorisé.

Adénovirus
Les vecteurs dérivés de virus adéno-associés (ou AAV) permettent le transfert de petites séquences génétiques (seulement 4 kilobases contre 13 kilobases avec les lentivirus). Ils sont intéressants car peu inflammatoires. Ils sont de plus en plus utilisés, par exemple pour le traitement de l’amaurose de Leber. Le seul médicament de thérapie génique autorisé en Europe (Glybera) utilise d’ailleurs ce type de vecteur.
En parallèle, la mise au point de vecteurs non viraux se poursuit afin de répondre à deux problématiques : une meilleure sécurité des vecteurs et le transport de grandes quantités d’ADN. A ce titre, près de 20 % des essais de thérapie génique se fondent sur l’injection directe d’ADN nu modifié et protégé des enzymes cellulaires (nucléases) grâce à des modifications chimiques. Une autre stratégie est la lipofection : le gène thérapeutique est associé à des lipides cationiques qui favorisent son entrée dans la cellule hôte.
Des succès majeurs à retenir
La France est un des leaders mondiaux de la thérapie génique, tant au niveau académique qu’au niveau clinique, en particulier grâce à des équipes attachées à l’Inserm.
En 1999, des équipes françaises (Salima Hacein-Bey Abina, Marina Cavazzana et Alain Fischer, unité Inserm 768, hôpital Necker, Paris), en collaboration avec des équipes anglaises, ont été pionnières dans le traitement par thérapie génique des "bébés bulles" (atteints de SCID X1). Malgré la survenue de plusieurs cas de leucémies chez les 19 patients inclus, les effets thérapeutiques du traitement persistent encore. Sur les 9 enfants traités en France il y a plus de 10 ans, 8 sont vivants, à domicile, et suivent une scolarité normale. Sans ce traitement, leur espérance de vie était très limitée.

Alain Fischer, Unité Inserm 768, "Développement normal et pathologique du système immunitaire", Département de Biothérapies et Unité d’Immunologie et d’Hématologie pédiatrique, Hôpital Necker Enfants Malades AP-HP, Université Paris Descartes, Paris
L’amaurose de Leber a également fait l’objet d’essais aux résultats remarquables. La maladie correspond à une dégénérescence pigmentaire au niveau de la rétine pouvant conduire à la cécité. Elle est causée par une mutation affectant le gène RPE65. L’injection d’un vecteur de type AAV contenant une copie fonctionnelle de ce gène, directement dans la rétine, a permis de stopper l’évolution de la maladie et de préserver la vision qui restait aux patients. Les premiers essais réussis ont eu lieu en Angleterre et aux Etats-Unis en 2007. Un essai est actuellement en cours à Nantes (équipe de Fabienne Rolling et Philippe Moullier, unité Inserm 1089, Nantes). Une société américaine vient d’être créée pour développer cette stratégie (Spark Therapeutics) et une autre existe en France, GenSight, fondée par José-Alain Sahel, directeur de l’Institut de la Vision (unité Inserm 968), à Paris.
L’adrénoleucodystrophie, une maladie génétique neurodégénérative liée à une démyélinisation du système nerveux central, a également fait l’objet de travaux prometteurs. Un essai a été mené chez quatre enfants en 2009, par des équipes françaises (Nathalie Cartier et Patrick Aubourg, unité Inserm 986, Kremelin-Bicêtre), en collaboration avec une société biotechnologique américaine et avec l’hôpital Necker (Paris). La stratégie utilisée consiste à prélever des cellules souches de la moelle osseuse (cellules souches mésenchymateuses), à les corriger génétiquement ex vivo à l’aide d’un lentivirus, puis à les réinjecter dans la circulation sanguine. Le traitement a permis de stopper l’évolution de la maladie chez ces enfants qui mènent aujourd’hui une vie pratiquement normale. Cet essai a ouvert la voie au développement de cette stratégie pour de nombreuses autres maladies neurodégénératives. Un résultat tout à fait spectaculaire vient notamment d’être obtenu par une équipe italienne (Alessandra Biffi et Luigi Naldini, à Milan) chez des enfants atteints de leucodystrophie métachromatique, une autre maladie génétique neurodégénérative. D’autres approches sont également en cours de développement dans le traitement de maladies lysosomales comme la maladie de Sanfilippo, avec par exemple les travaux menés par Jean-Michel Heard à l’Institut Pasteur (unité 1115 Institut Pasteur/Inserm), Marc Tardieu à l’hôpital Bicêtre et Michel Zerah à l’hôpital Necker, à Paris.
 

Un essai lancé en 2010 a en outre montré l’efficacité de la thérapie génique pour le traitement de l’hémophilie B. Il s’agit cette fois d’un protocole anglo-américain (équipe d’Amit Nathwani, à Londres). Les chercheurs ont utilisé un vecteur AAV contenant un gène FIX, capable de restaurer la coagulation sanguine. Six patients ont été inclus. Le gène s’est exprimé chez tous les participants et a permis aux quatre d’entre eux (qui avaient reçu les doses de vecteur les plus fortes) d’interrompre leur traitement prophylactique contre les hémorragies spontanées. Le suivi à long terme devra confirmer la sécurité du traitement et la persistance de l’effet thérapeutique dans le temps.
Les personnes atteintes de bêta-thalassémie, une forme majeure d’anémie, pourraient également être, à l’avenir, traitées par thérapie génique à en croire les résultats d’un essai français mené en 2010 (équipe de Philippe Leboulch et Marina Cavazzana à Paris). Il s’agissait d’un essai pionner qui a permis de soigner un patient âgé de 18 ans. Une première mondiale. Ce patient a été transplanté avec ses propres cellules hématopoïétiques CD34 corrigées ex vivo grâce à un lentivirus pour qu’elles expriment un transgène bêta-globine. Le jeune homme a retrouvé une vie normale, sans recours à des transfusions sanguines mensuelles.
Dans le domaine du cancer, les résultats sont plus aléatoires mais certains travaux sont encourageants. Une équipe américaine a par exemple prouvé, en 2010, l’efficacité de cellules T modifiées pour le traitement de leucémies (équipe de Carl June et Bruce Levine, à Philadelphie). Les chercheurs ont utilisé un vecteur lentiviral de type HIV-1 car il s’intègre naturellement dans les lymphocytes T. Ce vecteur a permis le transfert de gènes codant pour des protéines qui facilitent la reconnaissance des cellules tumorales à les éliminer. La société Novartis a investi dans le secteur et plusieurs start-up se sont créées, telles que Juno Therapeutics à Seattle.
Le secteur industriel, autour de la thérapie génique et les filières de service associées, se développe dans le monde et en France. Plusieurs personnalités de la recherche française rattachées à l’Inserm ont été pionnières dans ces démarches : Citons par exemple David Klatzmann avec la création de Genopoietic en 1993, mais également Pierre Charneau avec Theravectys, David Sourdive avec Cellectis, Philippe Leboulch avec Bluebird bio ou encore récemment José-Alain Sahel avec la fondation de GenSight Biologics en 2012. L’AFM Téléthon a par ailleurs investi depuis de nombreuses années dans la thérapie génique. Et Généthon BioProd, le premier établissement pharmaceutique à but non-lucratif dédié à la fabrication de médicaments de thérapie cellulaire et génique, a récemment ouvert à Evry.

 

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IMAGERIE MÉDICALE

 

 

 

 

 

 

 

Imagerie médicale
Octobre 2011


La première application d’imagerie médicale date de 1895 avec l’utilisation des rayons X. C’est le début de la radiographie. Puis, les techniques s’améliorent et se diversifient tout au long du XXe siècle avec l’arrivée de la scintigraphie, du scanner, de l’échographie puis de l’IRM. L’imagerie médicale est aujourd’hui incontournable dans de nombreuses situations : établir un diagnostic, évaluer la sévérité d’une pathologie, l’efficacité d’un traitement…
Les indications de l’imagerie médicale
Aide au diagnostic

L’imagerie médicale peut être utilisée en première intention, c’est le cas dans le dépistage systématique des cancers du sein par mammographie (radiographie), ou pour confirmer ou infirmer un diagnostic supposé.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet ainsi de confirmer un diagnostic de sclérose en plaques ou de maladie d’Alzheimer tandis que le scanner mettra en évidence un rétrécissement des artères coronaires en cas de douleurs thoraciques ou d’infarctus du myocarde.

Evaluation de la sévérité d’une maladie
Par l’imagerie, le diagnostic est affiné. Grâce à la scintigraphie on peut, par exemple, repérer des métastases et donc mesurer le niveau de dissémination d’un cancer dans l’organisme.
En cardiologie, la scintigraphie dite de perfusion évalue le débit sanguin au niveau du cœur au repos, ou lors d’un effort, afin de statuer sur le niveau de dysfonctionnement de certaines artères.

Aide à l’intervention

Des ponctions effectuées chez des patients le sont parfois sous échographie afin de bien visualiser la zone à prélever, notamment lorsqu’elle n’est pas palpable. Des injections d’anti-inflammatoires ou des drainages peuvent également être pratiqués avec l’aide de l’imagerie.
Aide à la prise en charge et au suivi thérapeutique
La comparaison de clichés pris à des temps différents offre au corps médical un moyen de suivre l’évolution d’une maladie ou encore d’une fracture osseuse. Très utilisée en cancérologie, la scintigraphie permet de vérifier l’efficacité d’un traitement en visualisant le niveau d’activité des cellules tumorales ou de détecter des métastases et poser ainsi l’indication d’une chimiothérapie. Dans 30 % à 40 % des cas le support de l’imagerie a permis de modifier l’attitude thérapeutique, au bénéfice des patients.

Amélioration des connaissances
L’imagerie a également contribué à faire avancer à grands pas la connaissance de l’activité cérébrale chez l’homme. Ainsi, grâce à l’IRM fonctionnelle on en sait davantage sur les mécanismes de l’addiction ou de maladies mentales telles que l’autisme.

Les grands types d’imagerie
Il existe quatre types d’imagerie médicale qui reposent sur l’utilisation des rayons X, des ultrasons, du champ magnétique ou de la radioactivité naturelle ou artificielle.
La radiographie photographie les structures denses en 2D
La radiographie utilise les rayons X. Ces derniers traversent le corps humain mais sont plus ou moins absorbés par les tissus en fonction de leur densité. Ils impriment un film photographique placé à l’opposé du patient telle une pellicule photo. Il est possible d’opacifier certaines structures creuses (appareil digestif, articulation, etc.) en injectant un produit de contraste, opaque aux rayons X. On parle par exemple d’angiographie quand il s’agit de visualiser les vaisseaux sanguins selon ce principe, ou encore de coronarographie pour les artères coronaires.
Pour réduire les doses de rayons émises lors des examens, les films radiographiques sont aujourd’hui, souvent remplacés par des détecteurs électroniques qui numérisent directement les images et sont plus sensibles que les plaques.
La radiographie est fréquemment utilisée en orthopédie, en rhumatologie et en orthodontie pour étudier les traumatismes osseux, les déformations du squelette ou les implantations dentaires. Elle permet également d’observer des anomalies sur certains organes comme des infections bactériennes ou virales ou encore des tumeurs au niveau des poumons ou des seins (mammographie).
   

Le scanner (ou tomodensitométrie) permet d’observer des organes et tissus en 3D
L’apport de l’informatique et du traitement numérisé des images a abouti à la mise au point de la tomodensitométrie (ou scanner) en 1972. Le scanner repose également sur l’utilisation des rayons X mais permet d’obtenir des images tridimensionnelles des organes ou des tissus (os, muscles ou vaisseaux) sous forme de coupes.
En pratique, un tube émetteur de rayons X tourne à très grande vitesse autour du patient et prend une succession d’images du corps à 360°. Des capteurs qui entourent le patient mesurent l’absorption des différents tissus. Grâce au scanner on visualise une modification de volume ou une anomalie de structure (infections, hémorragies, tumeur, ganglions, embolie…). En cancérologie, il permet de contrôler la réponse à la chimiothérapie. On l’utilise également pour guider les drainages et les biopsies.
Comme pour la radiographie, un produit de contraste à base d'iode, opaque aux rayons X, peut être nécessaire pour étudier certains organes.

Rayons X, des seuils et des risques mal définis
Les doses de rayons X délivrées aux patients ont augmenté de 47 % en 5 ans en raison de l’utilisation croissante de l’imagerie médicale. Selon l’Institut de veille sanitaire, les Français reçoivent, au titre du diagnostic par imagerie, en moyenne 1,3 millisievert (mSv) par an, avec une grande hétérogénéité d’un malade à l’autre. Cette valeur, très inférieure à celle des Etats-Unis (3 mSv), se situe dans la fourchette des valeurs moyennes européennes (0,4 mSv au Royaume-Uni, 2 mSv en Belgique). Or, certains travaux ont montré que ces rayons pourraient, à fortes doses, accroître le risque de cancer. A ce titre, l’Agence de Sureté nucléaire (ASN) recommande d’améliorer la protection des utilisateurs et de faciliter l’accès à l’IRM non irradiant.
Source : Exposition médicale de la population française aux rayonnements ionisants. Rapport IRSN/InVS 2010
L’échographie utile à l’observation du fonctionnement des organes

L’échographie utilise les ultrasons, ondes sonores imperceptibles à l’oreille humaine. Quand une sonde émet des ultrasons en direction d’un objet solide, ceux-ci rebondissent sur l’objet et reviennent au point de départ.
L’échographie mesure le temps nécessaire pour ce trajet (écho) et restitue une image en temps réel permettant de distinguer les différentes structures. Grâce à cette technique, on peut explorer le coeur, les organes digestifs (foie, rate, pancréas, vésicule biliaire), urinaires (vessie, reins) et génitaux (prostate et testicules, ovaires et utérus). Quant aux échographies de la grossesse, elles visent à apprécier la vitalité et la morphologie du foetus ainsi que son environnement (liquide amniotique, placenta, cordon…).
L’échographie doppler utilise une sonde plus fine qui permet d’investiguer le système vasculaire.
L’imagerie par résonance magnétique (IRM), une technique coûteuse mais précise pour observer les lésions et les tissus
L'imagerie par résonance magnétique nucléaire (IRM) est apparue au début des années 1980.
Elle est utile pour visualiser différentes structures et en particulier des "tissus mous" tels que le cerveau, la moelle épinière, les viscères, les muscles ou les tendons.

© Inserm, D. Letourneur
Mesure par échographie doppler du débit sanguin 1 jour après implantation d'une prothèse vasculaire en polysaccharides biodégradables chez le rat.
C’est un examen coûteux, mais justifié lorsqu’un doute persiste après des radiographies, une échographie ou un scanner. On peut ainsi mieux définir la nature de certaines lésions (infections, inflammations, anomalies des vaisseaux, tumeurs, hernies discales, lésions ligamentaires ou méniscales…).
Lorsqu’ils sont soumis à un champ magnétique, des composants d’atomes changent d’orientation puis reviennent à leur position initiale en émettant un signal. Ils se réalignent plus ou moins rapidement en fonction de la densité des tissus. Une caméra spéciale capte ces signaux et les convertit en image. En pratique, une bobine magnétique est placée autour du patient et balaye la zone du corps à étudier en créant un champ magnétique.
 
"L’IRM" en animation Flash (source CEA)
L’IRM fonctionnelle est un atout majeur pour étudier l’activité cérébrale. Une IRM effectuée au repos et une autre après un stimulus permettent de localiser les zones du cerveau qui s’activent en visualisant l’afflux sanguin.
La scintigraphie et la tomographie par émission de positons (TEP), utiles au diagnostic et pour visualiser le fonctionnement d’un organe

Scintigraphie osseuse après injection de Technétium 99m
La découverte de la radioactivité a conduit au développement de la médecine nucléaire avec la scintigraphie puis la tomographie par émission de positons (TEP) dans les années 1990.
Ces techniques consistent à administrer une molécule couplée à un élément radioactif par voie intraveineuse afin de suivre son évolution dans l’organisme.
Cette molécule permet de suivre le métabolisme ou le fonctionnement des organes ou bien se fixe sur une cible biologique précise d’intérêt médical.
La scintigraphie, ou TEMP (tomographie par émission monophotonique), représente 80 % de ce type d’explorations. Les radioéléments utilisés émettent un seul rayonnement électromagnétique (photon) capté par une caméra. Diagnostiquer des lésions avant toute manifestation morphologique devient ainsi possible. Elle est utilisée dans l’exploration de la thyroïde, du squelette (scintigraphie osseuse), en cardiologie (tomoscintigraphie myocardique) et aussi très fréquemment en cancérologie.

La TEP (tomographie par émission de positons), ou PET en anglais, utilise des radioéléments qui émettent deux rayonnements diamétralement opposés.
Un détecteur, placé tout autour du patient, capte les signaux qui coïncident et restitue une image d’excellente définition.
Cette technique est surtout utilisée en cancérologie.
 
Le PETscan, outil fondamental de dépistage et de suivi du cancer
La France possède 93 PETscans qui couplent les techniques du scanner et de la tomographie par émission de positons. Le radioélément utilisé dans le dépistage et le suivi du cancer est le desoxy-D-glucose marqué au fluor 18 de courte durée de vie (110 minutes environ). Cet analogue du glucose est davantage consommé par les cellules cancéreuses actives que par les cellules saines, ce qui permet d’observer des "points chauds" dans l’organisme et ainsi de dépister des métastases. L’atout de la technique est de fournir une estimation du volume de la tumeur mais également de son niveau d’activité tumorale.

Des progrès permanents grâce à la recherche
La rapidité
Les progrès de ces techniques portent sur une plus grande rapidité d’acquisition des images. La durée des examens ne cesse de se réduire grâce à des logiciels qui enregistrent des dizaines d’images en même temps et les reconstruisent simultanément. Cela améliore bien sûr le confort des patients. Radiographie, scanner et scintigraphie sont aujourd’hui effectués en quelques secondes ou minutes. En revanche l’IRM peut durer jusqu’à une heure en cas d’étude du cerveau.
La sécurité
L’objectif de tous les constructeurs est de réduire les doses de rayons X et de radioéléments. Pour cela, ils développent des détecteurs ultra sensibles qui permettent de maintenir une image de bonne qualité. Le récent système EOS développé par une entreprise française permet, par exemple, de diviser par 10 les doses de rayons émises lors d’un scanner grâce à l’utilisation de chambres à fils ultrasensibles qui remplacent les films traditionnels.
Pour en savoir plus...
La qualité de l’image
Accroître régulièrement la sensibilité des appareils permet d’améliorer la qualité des images. Dans cet esprit, les champs magnétiques utilisés en IRM sont de plus en plus puissants. Deux appareils fonctionnent en France avec des champs de 7 Tesla contre 3 Tesla en général et un autre appareil de 11,7 Tesla, unique au monde, est en développement à Neurospin en France (CEA).

Tester de nouveaux médicaments

L’usage de la TEP permet de tester de nouveaux médicaments en développement, par exemple dans la maladie de Parkinson. La distribution du médicament dans l’organisme ainsi que sa faculté à agir sur une cible prédéterminée peuvent être estimés dès les premiers essais. Cela réduit considérablement le nombre de patients à recruter pour les essais et les délais d’autorisation de mise sur le marché et diminue les coûts de développement.
Améliorer le diagnostic
Les scientifiques recherchent sans cesse de nouveaux radiotraceurs à utiliser en scintigraphie afin d’étudier davantage de maladies et d’organes. L’un d’entre eux fait son apparition dans le diagnostic de la maladie d’Alzheimer. C’est le PIB (ou ses équivalents), un marqueur des plaques bêta amyloïdes qui s’accumulent au cours de la maladie. Dès 2012, son utilisation constituera un outil supplémentaire pour établir le diagnostic.
Modèles physiologiques
Le développement des techniques d’imagerie ouvre la voie à la création de modèles physiologiques personnalisés. Par exemple en cancérologie, la compilation des clichés et des données obtenues par imagerie permet de créer un modèle de croissance tumorale et ainsi de simuler l’évolution du cancer et le bénéfice attendu des traitements. Il en est de même pour la fonction cardiaque ou encore l’activité cérébrale.
Nouvelles perspectives pour l'échographie
La maîtrise des ondes ultrasonores améliore les capacités de l’échographie. Les images en temps réel sont obtenues avec une excellente résolution. On est ainsi capable aujourd’hui d’examiner l’oeil ou encore la peau. Tout récemment, le fUltrasound (Ultrasons fonctionnels) a même permis de filmer les manifestations cérébrales d’une crise d’épilepsie chez l’animal (voir encadré), et également de mesurer l’élasticité des tissus (élastographie).Quelques-uns de ces appareils sont en évaluation clinique dans le cadre de la détection du cancer du sein.
En outre, la miniaturisation de ces appareils en fait un atout majeur pour une utilisation courante. L’échographie pourrait bien, à terme, remplacer la radiographie dans certaines indications comme le dépistage du cancer du sein.
Le fUltrasound (Ultrasons fonctionnels du cerveau), technique d’avenir pour l’étude du cerveau
Des chercheurs de l’Inserm et du CNRS ont développé une nouvelle technique permettant de visualiser l’activité cérébrale avec une plus grande sensibilité et une meilleure résolution que l’IRM fonctionnelle et la tomographie par émission de positons (TEP). Cette technique d’imagerie ultra rapide, fondée sur l’utilisation des ultrasons, mesure les mouvements du sang sur l'ensemble du cerveau plusieurs milliers de fois par seconde (contre quelques dizaines de fois jusqu'alors) et permet ainsi de visualiser l’activité cérébrale avec une excellente résolution dans le temps et dans l’espace. Les chercheurs ont pu filmer les manifestations cérébrales d’une crise d’épilepsie chez un rat, chose impossible avec les précédentes techniques.

 

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