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Un nouveau mécanisme impliqué dans la migration des cellules cancéreuses a été mis au jour |
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Un nouveau mécanisme impliqué dans la migration des cellules cancéreuses a été mis au jour
21 Juin 2017 | Par Inserm (Salle de presse) | Biologie cellulaire, développement et évolution
Une équipe de jeunes chercheurs dirigée par Guillaume Montagnac, chargé de recherche Inserm à Gustave Roussy, en collaboration avec l’Institut Curie et l’Institut de Myologie, a découvert un nouveau mécanisme qui aide les cellules à migrer. La cellule forme à la surface de sa membrane de multiples petites pinces qui l’aident à s’accrocher pour mieux progresser le long des fibres présentes à l’extérieur de la cellule. Ce mécanisme permet de mieux comprendre comment une cellule s’échappe de la masse tumorale et se déplace dans le corps pour aller former un nouveau foyer. Ces travaux sont publiés dans la revue américaine Science du 16 juin.
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La consommation de certains additifs alimentaires émulsifiants serait associée à un risque accru de cancers |
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La consommation de certains additifs alimentaires émulsifiants serait associée à un risque accru de cancers
13 Fév 2024 | Par Inserm (Salle de presse) | Santé publique
Les émulsifiants sont parmi les additifs les plus fréquemment utilisés par l’industrie agroalimentaire. Leur usage vise à améliorer la texture des produits tout en prolongeant leur durée de conservation. Des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, d’INRAE, de l’Université Sorbonne Paris Nord, d’Université Paris Cité et du Cnam, regroupés au sein de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Cress-Eren), ont entrepris d’étudier les possibles liens entre les apports alimentaires en additifs émulsifiants et la survenue des cancers. Ils ont analysé les données de santé de 92 000 adultes participant à l’étude de cohorte française NutriNet-Santé, en évaluant spécifiquement leur consommation de ce type d’additifs alimentaires. Les résultats de cette recherche suggèrent une association entre l’ingestion de certains additifs émulsifiants et un risque accru de cancers, en particulier du sein et de la prostate ; résultats qui ont été publiés dans la revue PLoS Medicine.
En Europe et en Amérique du Nord, 30 à 60 % de l’apport énergétique alimentaire des adultes provient d’aliments ultra-transformés. De plus en plus d’études épidémiologiques suggèrent un lien entre une consommation élevée d’aliments ultra-transformés et un risque accru d’obésité, de maladies cardiométaboliques et de certains cancers.
Les émulsifiants figurent parmi les additifs les plus couramment utilisés dans ces aliments. Ils sont souvent ajoutés aux aliments industriels transformés et emballés tels que certaines pâtisseries, gâteaux et desserts, glaces, barres chocolatées, pains, margarines et plats préparés, afin d’améliorer leur apparence, leur goût, leur texture et leur durée de conservation. Ils comprennent notamment les mono- et diglycérides d’acides gras, les carraghénanes, les amidons modifiés, les lécithines, les phosphates, les celluloses, les gommes et les pectines.
Comme pour tous les additifs alimentaires, la sécurité des émulsifiants a été précédemment évaluée sur la base des preuves scientifiques disponibles à l’époque. Pourtant, certaines recherches récentes suggèrent que les émulsifiants pourraient perturber le microbiote intestinal et augmenter le risque d’inflammation, pouvant potentiellement favoriser la survenue de certains cancers. Pour la première fois au niveau international, une équipe de chercheuses et chercheurs français s’est intéressée aux relations entre les apports alimentaires en émulsifiants et le risque d’apparition de plusieurs localisations de cancers dans une grande étude en population générale.
Les résultats sont fondés sur l’analyse des données françaises de 92 000 adultes (âge moyen 45 ans ; 79 % de femmes) qui ont participé à l’étude de cohorte NutriNet-Santé (voir encadré ci-dessous) entre 2009 et 2021.
Les participants ont renseigné en ligne tous les aliments et boissons consommés et leur marque (pour les produits industriels), sur au moins 3 journées d’enregistrements alimentaires, avec la possibilité de réactualiser leurs données de consommation tous les 6 mois. Ces enregistrements ont été mis en relation avec des bases de données afin d’identifier la présence et la dose des additifs alimentaires (dont les émulsifiants) dans les produits consommés. Des dosages en laboratoire ont également été effectués pour fournir des données quantitatives.
Au cours du suivi, les participants ont déclaré la survenue de cancers (2 604 cas diagnostiqués), et un comité médical a validé ces déclarations après examen des dossiers médicaux. Plusieurs facteurs de risque bien connus pour les cancers, notamment l’âge, le sexe, le poids (IMC), le niveau d’éducation, les antécédents familiaux, le tabagisme, l’alcool et les niveaux d’activité physique, ainsi que la qualité nutritionnelle globale de l’alimentation (par exemple, les apports en sucre, en sel, en énergie) et le statut ménopausique ont été pris en compte.
Après un suivi moyen de 7 ans, les chercheurs ont constaté que des apports plus élevés en monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) étaient associés à des risques accrus de cancers au global (une augmentation de 15 % du risque chez les plus forts consommateurs – 3e tertile – par rapport aux plus faibles consommateurs – 1er tertile), de cancers du sein (une augmentation de 24 % du risque), et de cancers de la prostate (une augmentation de 46 % du risque). D’autre part, les femmes ayant des apports plus élevés en carraghénanes (E407 et E407a) avaient 32 % de plus de risque de développer des cancers du sein, par rapport au groupe ayant des apports plus faibles.
Il s’agit de la première étude observationnelle en la matière, qui ne suffit donc pas, à elle seule, à établir de lien de cause à effet. Les auteurs soulignent certaines limites à cette étude. Par exemple, la proportion élevée de femmes, le niveau d’éducation plus élevé en moyenne et les comportements globalement plus soucieux de la santé parmi les participants à l’étude NutriNet-Santé par rapport à la population française en général, qui peuvent limiter la généralisation des résultats.
Néanmoins, l’échantillon de l’étude était de grande ampleur et les auteurs ont pu tenir compte d’un large éventail de facteurs potentiellement confondants, tout en utilisant des données détaillées et uniques sur les expositions aux additifs alimentaires, allant jusqu’à la marque des produits industriels consommés. De plus, les résultats sont restés inchangés après de multiples analyses de sensibilité, renforçant ainsi leur robustesse.
« Si ces résultats doivent être reproduits dans d’autres études à travers le monde, ils apportent de nouvelles connaissances clés au débat sur la réévaluation de la réglementation relative à l’utilisation des additifs dans l’industrie alimentaire, afin de mieux protéger les consommateurs », expliquent Mathilde Touvier, directrice de recherche à l’Inserm, et Bernard Srour, professeur junior à INRAE, principaux auteurs de l’étude.
L’étude NutriNet-Santé est une étude de santé publique coordonnée par l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (CRESS-EREN, Inserm/INRAE/Cnam/Université Sorbonne Paris Nord/Université Paris Cité), qui, grâce à l’engagement et à la fidélité de plus de 170 000 « nutrinautes », fait avancer la recherche sur les liens entre la nutrition (alimentation, activité physique, état nutritionnel) et la santé. Lancée en 2009, l’étude a déjà donné lieu à plus de 270 publications scientifiques internationales. Un appel au recrutement de nouveaux nutrinautes est toujours en cours afin de continuer à faire avancer la recherche publique sur les relations entre la nutrition et la santé.
En consacrant quelques minutes par mois à répondre, via Internet, sur la plateforme sécurisée etude-nutrinet-sante.fr, aux différents questionnaires relatifs à l’alimentation, à l’activité physique et à la santé, les participants contribuent à faire progresser les connaissances, vers une alimentation plus saine et plus durable.
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Migraine |
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Migraine
Une maladie de mieux en mieux connue
MODIFIÉ LE : 25/09/2020
PUBLIÉ LE : 23/06/2017
TEMPS DE LECTURE : 13 MIN
La migraine se caractérise par des crises répétées se manifestant essentiellement par de pénibles maux de tête (céphalées). Cette maladie neurologique touche 15 % de la population mondiale. Elle est due à une excitabilité neuronale anormale, liées à des facteurs génétiques complexes associés à des facteurs environnementaux. Pour un migraineux sur quatre, la sévérité des crises entraîne un retentissement socioprofessionnel important.
Dossier réalisé en collaboration avec Radhouane Dallel (unité 1107 Inserm/université Clermont Auvergne, Neuro-Dol, équipe Douleur trigéminale et migraine)
Comprendre les crises de migraines
La migraine est une maladie chronique caractérisée par des crises récurrentes qui se traduisent essentiellement par d’intenses céphalées. On distingue deux principaux types de crises migraineuses : les crises de migraine sans aura, et les crises de migraine avec aura, c’est-à-dire accompagnées ou précédées par des troubles neurologiques transitoires.
Les crises de migraine sans aura : une céphalée caractéristique
Le plus souvent, les migraineux présentent des crises de migraine dites « sans aura ». Elles se manifestent par une céphalée modérée à sévère qui dure de 4 à 72 heures (sans traitement ou avec un traitement inefficace), ces crises sont associées à des nausées, voire des vomissements, et/ou une hypersensibilité à la lumière et au bruit (photophobie et phonophobie). Elles présentent en outre au moins deux des quatre caractéristiques suivantes :
* elles ne se manifeste que d’un seul côté du crâne (topographie unilatérale)
* le patient a l’impression de sentir les battements du cœur dans la tête (type pulsatile)
* l’intensité de la douleur associée gêne le patient dans ces activités et peut nécessiter qu’il se couche (douleur modérée à sévère)
* la douleur est aggravée par le mouvement et entraîne l’évitement d’activité physique de routine (comme monter des escaliers)
Le diagnostic de migraine ne peut être porté qu’après plusieurs crises, au moins cinq.
Une céphalée bilatérale n’exclut pas le diagnostic de migraine si les autres signes sont présents : bien que la douleur ressentie durant une crise soit le plus souvent unilatérale, une topographie bilatérale est observée dans 30% des cas.
Les crises de migraine avec aura
Chez 20 à 30% des migraineux, la céphalée est précédée ou s’accompagne d’une aura, un trouble neurologique transitoire entièrement réversible. Les auras typiques comportent des troubles visuels, sensitifs, du langage et/ou de la parole, ou bien encore des troubles moteurs.
Les troubles visuels sont les plus fréquentes (90% des cas), avec la vision de points, de taches brillantes ou encore la présence de trous dans le champ de vision. Moins souvent, il peut s’agir, de fourmillements ou d’engourdissement d’une main ou de la face, ou encore de difficultés à s’exprimer.
Dans une migraine avec aura typique, on trouve au moins trois des caractéristiques suivantes :
* au moins un symptôme d’aura se développe progressivement sur 5 minutes ou plus
* deux ou plusieurs symptômes d’aura surviennent successivement
* chaque symptôme d’aura dure 5 à 60 minutes
* au moins un symptôme d’aura est unilatéral
* au moins un symptôme d’aura est positif (par exemple apparition de taches dans le champs visuel au lieu de la réduction de celui-ci)
* l’aura est accompagnée, ou suivie dans les 60 minutes, d’une céphalée
Il existe cependant des sous-types de migraines avec aura plus rares, comme la migraine hémiplégique familiale (voir plus loin), la migraine basilaire qui se manifeste par des étourdissements et des vertiges, des troubles auditifs et visuels et des picotements suivis d’une céphalée derrière le crâne et non au niveau des tempes, ou encore les auras migraineuses sans céphalée.
Des crises plus ou moins longues et de fréquence variable
Chez la moitié des migraineux, la durée d’une crise est inférieure à six heures et peut être raccourcie grâce aux traitements. Mais chez environ 15% des patients, elle dépasse 24 heures.
La fréquence des crises peut quant à elle varier de quelques épisodes par an à plusieurs par mois. On estime que 1 à 2% de la population générale présente des migraines survenant plus de 15 jours par mois depuis au moins trois mois. On parle alors de migraine chronique. Entre chaque crise, la rémission des symptômes est totale. Cependant, des crises sévères peuvent être suivies de quelques jours de fatigue. En outre, ces crises fréquentes entraînent une consommation régulière de traitement de crise, qui peut être à l’origine d’un autre type de céphalées lié à la surconsommation médicamenteuse (voir encadré en fin de dossier).
Céphalée de tension ou migraine ?
La céphalée de tension, plus répandue que la migraine, affecterait 20 à 40% des adultes.
La douleur associée à une céphalée de tension est différente de celle d’une céphalée migraineuse : elle est plus diffuse qu’en cas de migraine, continue et non pulsatile, peu ou moyennement intense et sans signes digestifs associés.
Une personne migraineuse peut avoir des céphalées de tension entre deux crises de migraine. Il est important de discerner les deux car le traitement spécifique de la migraine n’a pas d’effet sur la céphalée de tension.
Enfants et adultes, tous concernés
La migraine peut toucher tout le monde, à des degrés divers. Environ 15% des adultes sont concernés, avec une prédominance féminine (20% des femmes sont affectées, contre seulement 10 % des hommes). Il s’agit le plus souvent d’adultes jeunes, âgés de 30 à 40 ans, les crises débutant avant 40 ans dans 90% des cas. Cependant, la maladie peut persister à un âge beaucoup plus avancé.
Les enfants sont aussi concernés : environ 5% d’entre eux souffriraient de migraine avant la puberté et l’incidence de la maladie augmente après. Chez l’enfant, la durée d’une crise de migraine est souvent plus courte que chez l’adulte (parfois inférieure à une heure) et la douleur est souvent frontale ou bilatérale.
Une prédisposition génétique
Le caractère héréditaire de la migraine est connu depuis le 19e siècle. Il semble plus important pour les migraines avec aura que pour les migraines sans aura. Toutefois, il n’existe pas un gène de la migraine, mais une susceptibilité qui dépend de l’association de plusieurs variants génétiques : plus d’une douzaine de gènes de susceptibilité à la migraine ont été identifiés depuis 2010. Ils codent notamment pour des protéines impliquées dans des mécanismes impliqués dans la communication entre neurones, comme la régulation glutamatergique.
Le cas de la migraine hémiplégique familiale
Le cas de la migraine hémiplégique familiale est particulier : l’hérédité de la maladie est monogénique, c’est-à-dire qu’elle ne dépend que d’un seul gène. Ainsi, dans une famille atteinte, toutes les personnes affectées portent la même mutation du même gène. A ce jour, quatre gènes de la migraine hémiplégique sont connus : CACNA1A, ATP1A2, SCN1A et PRRT2.
La transmission de la maladie est dite « autosomique dominante » ce qui signifie qu’une personne malade a 50% de risque de transmettre la mutation à chacun de ses enfants. Néanmoins, le descendant ne sera pas forcément malade car des phénomènes « pénétrance incomplète » font que la mutation ne donne pas obligatoirement des crises chez tous les porteurs.
Dans cette forme particulière de migraine, la crise est caractérisée par une aura avec un déficit moteur associé à d’autres signes (troubles sensitifs, visuels ou du langage).
Des facteurs déclenchants dont certains sont contrôlables
Des facteurs internes ou externes favorisent le déclenchement de la crise de migraine. Ces facteurs ont en commun un changement d’état. Il peut s’agir :
* de variations émotionnelles (négatives ou positives)
* d’un surmenage, d’un relâchement ou d’un effort physique inhabituellement intense
* d’une dette ou d’un excès du volume du sommeil
* d’une variation hormonale (chute des taux d’œstrogènes en période menstruelle),
* d’un changement climatique (chaleur ou froid, vent violent)
* d’une exposition sensorielle (lumière ou odeurs fortes)
* d’un changement lié à l’alimentation (sauter un repas, repas lourd, alcool)…
Ces facteurs déclenchants varient d’une personne à l’autre, sont inconstants chez le même individu, doivent parfois être associés et peuvent changer au cours de la vie.
L’identification puis l’éviction de certains de ces facteurs peut permettre une réduction des crises. Adopter des horaires de sommeil régulier, ne pas sauter de repas, avoir une bonne hydratation, s’échauffer avant une séance de sport ou éviter des activités trop violentes peut apporter un bénéfice. Les migraineux doivent cependant se garder de conduites d’évitement systématiques ou drastiques : une telle démarche risque en effet de les rendre petit à petit encore plus sensibles à tout changement, même minime.
La migraine menstruelle (ou cataméniale), parfois redoutable
Le plus puissant des facteurs déclenchants de la crise de migraine est sans aucun doute le cycle hormonal féminin. Les migraines menstruelles sont des crises sans aura déclenchées par la chute du taux d’œstrogènes en fin de cycle. Elles surviennent entre J‑2 et J+3, J1 étant le premier jour des règles.
La migraine cataméniale « pure », survenant exclusivement autour du moment des règles, est rare (7% des migraineuses). En revanche, une migraineuse sur trois a des crises menstruelles associées à d’autres crises pendant le cycle.
Si les crises menstruelles sont fréquentes et sévères, un traitement prophylactique débuté deux ou trois jours avant l’apparition supposée de la crise peut être utile. Il repose le plus souvent sur la prise d’un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) ou l’administration d’œstradiol par voie topique. En cas d’échec de ces traitements, une prophylaxie hormonale continue, destinée à inhiber l’ovulation peut être efficace (contraceptifs progestatifs purs, contraceptifs combinés en prise continue, implants de progestérone…).
Les mécanismes des crises se dévoilent peu à peu
Les mécanismes de la migraine commencent à être bien connus même s’il reste encore de nombreuses questions non résolues. La migraine est due à une excitabilité neuronale anormale, comme c’est le cas pour l’épilepsie ou certains troubles du mouvement (dyskinésies paroxystiques). Ce phénomène est lui-même lié à une prédisposition génétique, modulé par des facteurs environnementaux (hormones, stress, aliments…).
Si l’on ne sait toujours pas comment une crise migraineuse se déclenche, le rôle de l’hypothalamus a été confirmé par l’imagerie : il pourrait être un « générateur » des crises de migraine.
Par ailleurs, des progrès considérables ont été réalisés dans la compréhension des mécanismes impliqués dans les différents symptômes qui lui sont associés. Ainsi, l’aura migraineuse est probablement provoquée par un dysfonctionnement transitoire du cortex qui entraîne une vague lente de dépolarisation des neurones, de l’arrière du cerveau vers l’avant. On parle de « dépression corticale envahissante » (DCE). Ce phénomène est observable par imagerie fonctionnelle au cours de crises de migraine avec aura spontanée. Il entraîne une baisse transitoire de l’activité des neurones, avec une légère diminution du débit sanguin cérébral. Cela explique les troubles neurologiques visuels, sensitifs, du langage, ou la faiblesse motrice ressentis par les patients. Dans le cas de la migraine hémiplégique familiale, les mutations connues ont les mêmes conséquences : une augmentation de potassium et de glutamate dans la fente synaptique qui sépare deux neurones, conduisant à une hyperexcitabilité neuronale et à une augmentation de la sensibilité à la dépression corticale envahissante.
La céphalée migraineuse est quant à elle secondaire à la dilatation et l’inflammation des vaisseaux cérébraux, notamment ceux des méninges à la surface du cerveau. Ces modifications sont provoquées par l’activation anormale du système trigéminovasculaire, qui innervent les vaisseaux méningés et provoque une stimulation nerveuse via la libération de CGRP, des neuropeptides « messagers de la douleur ». Il existe par ailleurs une activation anormale de neurones dans le tronc cérébral et l’hypothalamus, qui contribue au déclenchement, à l’amplification et/ou à la persistance du message douloureux. Certaines études conduites chez l’animal ont montré que des vagues de DCE pouvaient déclencher l’activation du système trigéminovasculaire, proposant ainsi un lien entre aura et céphalée migraineuse pour les patients ayant des migraines avec aura.
Il était communément admis depuis les années 40 que la sensibilité douloureuse intracrânienne était limitée à la dure-mère, l’enveloppe méningée la plus externe qui tapisse la voûte et la base du crâne, et à ses vaisseaux nourriciers. Aussi c’est la dilatation et l’inflammation des artères de la dure-mère qui étaient considérées à l’origine de la douleur associée aux migraines. Toutefois, une étude clinique menée par des chercheurs et neurochirurgiens français a récemment modifié cette conception en montrant que la pie-mère, située sous de la dure-mère, et ses vaisseaux nourriciers sont également sensibles à la douleur. Ces structures pourraient donc être elles-aussi impliquées dans les céphalées.
Des conséquences à long terme ?
Des travaux ont montré que des crises de migraine très fréquentes étaient associées à des remaniements neuronaux, notamment dans les centres de contrôle de la douleur. Mais à ce jour, l’origine, le niveau de réversibilité et les conséquences de ces remaniements restent inconnus. De petites anomalies de la substance blanche cérébrale (hypersignaux non spécifiques en IRM) sont également observés à une fréquence plus importante chez les patients qui ont des céphalées. Ces OBNI (pour « objets blancs non identifiés ») sont toutefois sans conséquences fonctionnelles connues pour les patients.
Traiter les migraines
A ce jour, il n’existe pas de traitement curatif de la migraine. La prise en charge de la maladie repose sur l’éviction des facteurs déclenchants modifiables (surtout ceux associés aux rythmes du sommeil et des repas), le traitement des crises et, chez certains migraineux, leur prévention par un traitement de fond à prendre quotidiennement.
* Le traitement de crise est destiné à limiter la sévérité et la durée de la céphalée migraineuse. Il doit être pris le plus tôt possible au début de la crise.
* Le traitement de fond est destiné à diminuer la fréquence des crises. Il est prescrit aux personnes qui ont des crises fréquentes, intenses, longues et/ou qui entraînent une consommation excessive de traitement de crise.
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Les traitements de crise
Deux classes thérapeutiques sont actuellement recommandées par la Société française d’étude des migraines et céphalées pour traiter les crises migraineuses : les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et les triptans.
Souvent utilisé en automédication, le paracétamol est bien moins efficace que les AINS et les triptans, bien qu’il puisse avoir un intérêt sur les crises les moins intenses. Les antalgiques opiacés ne doivent pas être utilisés en raison du risque de surconsommation qui entraîne après quelques mois une céphalée chronique par abus médicamenteux. L’association d’un triptan et d’un AINS peut être utile chez un patient dont les crises ne sont pas soulagées par un triptan seul. Mais qu’elle que soit l’option, il ne faut pas dépasser 8 jours de traitement par mois pour éviter le risque de céphalées induites par une surconsommation médicamenteuse.
Les triptans sont des traitements spécifiques de la céphalée migraineuse. Il s’agit d’agonistes sérotoninergiques qui agissent sur le système trigéminovasculaire. Ils sont le plus souvent bien tolérés. Toutefois, ce sont des vasoconstricteurs, contre-indiqués en cas de problèmes vasculaires (antécédent d’infarctus du myocarde, d’angor, d’AVC, d’hypertension non contrôlée…). En outre, comme les dérivés ergotés (d’anciens traitements spécifiques de la migraine, tombés en désuétude en raison de leurs effets indésirables), ils s’avèrent inefficaces chez certains patients.
D’autres traitements de crise spécifiques et non vasoconstricteurs sont à l’étude : les gépants et les ditans. Les nouveaux gépants (rimegepant, ubrogepant) sont des antagonistes du CGRP, le messager de la douleur libéré par le système trigéminovasculaire. Ces médicaments sont efficaces et sans toxicité hépatique, contrairement aux premières molécules développées dans cette nouvelle classe. Les ditans, des agonistes sérotoninergiques pour le récepteur 5HT1F, sont quant à eux de récents dérivés des triptans, plus spécifiques. Une de ces molécules, le lasmiditan, est commercialisée aux Etats-Unis depuis la fin de l’année 2019.
Les traitements préventifs de la migraine
En cas de crises très fréquentes (au moins deux par mois), longues, intenses, mal soulagées par un traitement de crise optimal, ou encore lorsque des traitements de crise doivent être utilisés plus de 8 jours par mois depuis plus de trois mois, il est nécessaire d’envisager un traitement de fond.
Plusieurs médicaments appartenant à des classes thérapeutiques très différentes sont efficaces. C’est le cas de certains bêtabloquants ou d’autres molécules utilisées dans le traitement de l’hypertension artérielle (candésartan), de certains antidépresseurs (amitriptyline), de certains médicaments agissant sur les récepteurs à la sérotonine ou encore d’antiépileptiques (topiramate).
Une nouvelle voie de recherche a permis le développement d’anticorps monoclonaux spécifiques contre le neuropeptide CGRP. Ils agissent au niveau systémique et non central car leur grosse taille ne leur permet pas de passer la barrière hématoencéphalique. Plusieurs d’entre eux, développés par quatre laboratoires pharmaceutiques, ont récemment été testés dans des essais cliniques à visée prophylactique (en prévention) dans la migraine épisodique et/ou chronique. Les résultats se sont révélés encourageants : ces molécules semble permettre de diminuer significativement le nombre de jours avec migraine sur un mois chez les patients migraineux présentant plus de 8 jours mensuels de céphalées. De plus, les différents essais (menés par les différents laboratoires) ont montré une bonne tolérance au médicament à court terme. Leur innocuité sur le long terme reste cependant à évaluer. A ce jour, ces anticorps monoclonaux ne sont accessibles en France que dans le cadre de protocoles de recherche clinique.
L’utilisation de la toxine botulique peut être une alternative pour des patients lourdement handicapés par une migraine chronique, avec plus de quinze jours de céphalée par mois pendant au moins trois mois successifs, et non soulagés par les traitements de fond médicamenteux classiques. Ce traitement dont l’efficacité a été démontrée uniquement dans la migraine chronique, consiste en de multiples injections réalisées tous les trois mois dans différents muscles du crâne et de la face. L’usage de la toxine botulique en prévention de la migraine chronique a été approuvé dans de nombreux pays européens, mais pas encore en France.
La stimulation magnétique transcrânienne ou la stimulation électrique transcutanée peuvent avoir un intérêt pour le contrôle de la crise ou en tant que traitement de fond. Néanmoins, l’accessibilité de ces techniques reste limitée.
Enfin, certaines thérapeutiques non médicamenteuses sont indiquées dans la prévention des crises de migraine, même si les preuves scientifiques de leur efficacité sont limitées, voire inexistantes faute de « vrai » placebo. Les meilleurs travaux portent sur la relaxation, recommandée chez l’enfant, chez tous les patients qui font un lien entre la survenue de crise de migraine et un état de stress, de tension physique ou psychique, chez les patients qui ne souhaitent pas un traitement de fond médicamenteux, ou encore chez ceux pour qui un traitement de fond médicamenteux est déconseillé (comme les femmes enceintes). L’utilisation de technique de biofeedback, une thérapie fondée sur le contrôle des émotions et des pensées, peut favoriser le relâchement.
La céphalée par abus médicamenteux
Certaines personnes souffrent de céphalées chroniques quotidiennes induites par une surconsommation médicamenteuse. Elles se déclenchent le plus souvent chez les migraineux qui souffrent de crises très fréquentes et consomment des antalgiques simples ou des triptans plusieurs jours par semaine.
Un sevrage, souvent conduit lors d’une hospitalisation, ainsi que la mise en place d’un traitement de fond sont nécessaires pour mettre un terme à ce cercle vicieux.
Un calendrier des crises peut permettre d’anticiper ce problème. Il permet de noter la fréquence des crises et l’effet des médicaments. Il aide le médecin à adapter la prise en charge.
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Communiqués de presse
* 17/12/18 Découverte de nouveaux mécanismes à l’origine de la migraine
* 08/02/18 Migraine : ces zones du cerveau que l’on croyait indolores
* 24/06/13 La migraine jusqu’au bout des gènes
À découvrir aussi
* Des régimes miracles contre la migraine, vraiment ? (Canal Détox du 15/02/23)
* Migraine : histoire d’une souffrance ordinaire – Reportage aux Urgences céphalées de l’hôpital Lariboisière (Paris) – magazine Science&Santé n°5, pp.36–39 (nov-déc 2011)
* Douleur – dossier d’information
Pour aller plus loin
* Clinique de la migraine – structure multidisciplinaire spécialisée dans le diagnostic et le traitement des migraines et céphalées de l’enfant, Hôpital Robert-Debré, Paris
* Migraines – Dossier de l’Assurance maladie
* J’ai mal à la tête – Centre de la migraine de l’enfant
* Prise en charge diagnostique et thérapeutique de la migraine chez l’adulte et chez l’enfant : aspects cliniques et économiques – Haute autorité de santé
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Musique ou langage ? Le cerveau divisé… |
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Musique ou langage ? Le cerveau divisé…
27 Fév 2020 | Par Inserm (Salle de presse) | Neurosciences, sciences cognitives, neurologie, psychiatrie | Technologie pour la sante
Le cerveau humain ne mobilise pas ses hémisphères de façon équivalente lorsqu’il s’agit de reconnaître une mélodie ou de comprendre une phrase à l’oral. Si ce concept est reconnu des scientifiques, jusqu’à présent, le phénomène n’était pas expliqué au niveau physiologique et neuronal. Une équipe de recherche codirigée par le chercheur Inserm Benjamin Morillon à l’Institut de neurosciences des systèmes (Inserm/Aix-Marseille Université), en collaboration avec des chercheurs de l’Institut-Hôpital neurologique de Montréal de l’Université McGill, est parvenue à montrer que, grâce à des réceptivités différentes aux composantes du son, les neurones du cortex auditif gauche participeraient à la reconnaissance du langage, tandis que les neurones du cortex auditif droit participeraient à celle de la musique. Ces résultats à paraître dans Science suggèrent que la spécialisation de chaque hémisphère cérébral pour la musique ou le langage permettrait au système nerveux d’optimiser le traitement des signaux sonores à des fins de communication.
Le son est issu d’un ensemble complexe de vibrations de l’air qui, lorsqu’elles arrivent dans l’oreille interne au niveau de la cochlée, y sont discriminées en fonction de leur vitesse : à chaque instant, les vibrations lentes sont traduites en sons graves et les vibrations rapides en sons aigus. Cela permet de représenter le son selon deux dimensions : la dimension spectrale (fréquence) et la dimension temporelle (temps).
Ces deux dimensions auditives sont fondamentales car c’est leur combinaison en simultané qui stimule les neurones du cortex auditif. Ces derniers permettraient notamment de discriminer les sons pertinents pour l’individu, tels que les sons utilisés pour la communication qui permettent l’échange et la compréhension entre individus.
Le langage et la musique constituent chez l’humain les principales utilisations du son et les plus complexes au niveau cognitif. L’hémisphère gauche est principalement impliqué dans la reconnaissance du langage, tandis que l’hémisphère droit est principalement impliqué dans celle de la musique. Cependant, le fondement physiologique et neuronal de cette asymétrie était encore méconnu.
Une équipe de recherche codirigée par le chercheur Inserm Benjamin Morillon à l’Institut de neurosciences des systèmes (Inserm/Aix-Marseille Université), en collaboration avec des chercheurs de l’Institut-Hôpital neurologique de Montréal de l’Université McGill, a utilisé une approche innovante pour comprendre comment le langage et la musique sont décodés au sein de chaque hémisphère cérébral chez l’humain.
Les chercheurs ont enregistré 10 phrases chantées chacune par une soprane sur 10 airs mélodiques inédits composés pour l’occasion. Ces 100 enregistrements, dans lesquels mélodie et parole sont dissociées, ont ensuite été déformés en diminuant la quantité d’information présente dans chaque dimension du son. Il a été demandé à 49 participants d’écouter ces enregistrements déformés par paire, et de déterminer s’ils étaient identiques au niveau de la mélodie ou au niveau du texte. L’expérience a été menée en français et en anglais, afin d’observer si les résultats étaient reproductibles dans des langues différentes.
Une démonstration du test audio proposé aux participants est disponible (en anglais) sur le lien suivant :
https://www.zlab.mcgill.ca/spectro_temporal_modulations/
L’équipe de recherche a constaté que, quelle que soit la langue, lorsque l’information temporelle était déformée les participants étaient capables de reconnaître la mélodie, mais avaient des difficultés à identifier le contenu du texte. À l’inverse, lorsque l’information spectrale était déformée, ils étaient capables de reconnaître le texte mais avaient du mal à reconnaître la mélodie.
L’observation par imagerie par résonance fonctionnelle (IRMf) de l’activité neuronale des participants a montré que, dans le cortex auditif gauche, l’activité variait en fonction de la phrase présentée mais restait relativement stable d’une mélodie à l’autre, tandis que dans le cortex auditif droit, l’activité variait en fonction de la mélodie présentée mais restait relativement stable d’une phrase à l’autre.
De plus, lorsque l’information temporelle était dégradée, seule l’activité neuronale du cortex auditif gauche était affectée, tandis que la dégradation de l’information spectrale affectait uniquement l’activité du cortex auditif droit. Enfin, les performances des participants dans la tâche de reconnaissance pouvaient être prédites seulement en observant l’activité neuronale de ces deux aires.
Extrait original de chant a capella (en bas à gauche) et son spectrogramme (au-dessus, en bleu) décomposé en fonction de la quantité d’informations spectrales et temporelles (au centre). Les cortex auditifs droit et gauche du cerveau (côté droit de la figure) décodent respectivement la mélodie et la parole.
« Ces résultats indiquent que dans chaque hémisphère cérébral, l’activité neuronale est dépendante du type d’information sonore, précise Benjamin Morillon. Si l’information temporelle est secondaire pour reconnaître une mélodie, elle est au contraire primordiale à la bonne reconnaissance du langage. Inversement, si l’information spectrale est secondaire pour reconnaître le langage, elle est primordiale pour reconnaître une mélodie. »
Les neurones du cortex auditif gauche seraient ainsi principalement réceptifs au langage grâce à leur meilleure capacité à traiter l’information temporelle, tandis que ceux du cortex auditif droit seraient, eux, réceptifs à la musique grâce à leur meilleure capacité à traiter l’information spectrale. « La spécialisation hémisphérique pourrait être le moyen pour le système nerveux d’optimiser le traitement respectif des deux signaux sonores de communication que sont la parole et la musique », conclut Benjamin Morillon.
Ces travaux sont financés par une bourse Banting attribuée à Philippe Albouy, par des subventions des Instituts de recherche en santé du Canada et de l’Institut canadien de recherches avancées accordées à Robert J. Zatorre, et par des financements ANR-16-CONV-0002 (ILCB), ANR-11-LABX-0036 (BLRI) et de l’initiative d’excellence d’Aix-Marseille Université (A*MIDEX).”
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