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IA : Un nouvel algorithme français s’inspirant de GPT améliore la surveillance des traumatismes

 

 

 

 

 

 

 

IA : Un nouvel algorithme français s’inspirant de GPT améliore la surveillance des traumatismes

04 Mai 2023 | Par Inserm (Salle de presse) | Santé publique

En France, un tiers des passages aux urgences sont dus à des traumatismes. Afin de mieux comprendre leurs mécanismes et améliorer leur prise en charge, des chercheuses et chercheurs de l’Inserm et de l’université de Bordeaux au centre de recherche Bordeaux Population Health, avec des équipes du CHU de Bordeaux, ont mis au point un algorithme capable de classer les visites aux urgences pour cause de traumatisme grâce à l’analyse des comptes rendus cliniques par le bais d’une intelligence artificielle (GPT). Les performances de ce  projet baptisé TARPON[1], qui atteignent 97% d’exactitude, ont fait l’objet d’une publication dans la revue Journal of Medical Internet Research Artificial Intelligence. Les résultats permettent d’imaginer la mise en place prochaine d’un observatoire national du traumatisme.

Les traumatismes représentent 9% de la mortalité en France et concernent des populations souvent jeunes. Plus du tiers des 21 millions de passages aux urgences annuels, le sont pour des traumatismes. Il s’agit donc d’un problème majeur de santé publique qui représente un poids sanitaire, sociétal et économique important, face auquel les scientifiques œuvrent pour apporter des solutions.
L’idée du projet TARPON mené par des chercheurs de l’Inserm et de l’université de Bordeaux avec le CHU de Bordeaux est partie du constat que pour chaque visite aux urgences, les soignants rédigent un compte-rendu. Ces derniers représentent une mine d’informations : exposé des symptômes, état des patients, ainsi que de nombreux détails sur les circonstances de survenue du traumatisme.
Or, ces données restent aujourd’hui inexploitées, et l’on dispose de peu de statistiques sur les victimes d’accidents de la vie courante, de violences ou encore de tentatives de suicide. Dans le domaine des accidents de la route, un observatoire existe mais il n’est complet que pour la mortalité et la plupart des accidents liés aux déplacements en vélo, à pied ou à trottinette n’y figurent pas. Une analyse des informations anonymisées issues des comptes rendus des urgences permettrait de constituer le socle d’un système de surveillance des traumatismes quasi exhaustif.
Ces comptes rendus sont des textes non structurés rédigés avec un mélange de termes courants mais aussi médicaux, techniques, et des abréviations. Afin d’en extraire les informations intéressantes, sans avoir à tous les lire, les équipes de recherche ont développé une technique de traitement automatique du langage basée sur des réseaux de neurones artificiels.

Les chercheurs ont adapté le modèle d’intelligence artificielle GPT et l’ont entraîné avec un échantillon de plus de 500 000 comptes rendus provenant des urgences adultes du CHU de Bordeaux[2]. Ils ont ainsi abouti à un outil de traitement du langage clinique francophone, dans le respect des règles RGPD.

Avec le soutien du Health Data Hub, de Bpifrance, de la région Nouvelle Aquitaine, de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de la Délégation à la Sécurité Routière, les chercheurs ont pu financer l’achat d’un puissant serveur, dédié à l’intelligence artificielle et installé au sein même de l’hôpital. Ce dernier a permis d’implémenter l’algorithme développé par les scientifiques, pour classer automatiquement les traumatismes selon leurs types, et cela avec une précision surprenante.
En effet, la méthode développée par les chercheurs permet de classer correctement 97% des comptes rendus (contre 86% avec les anciennes méthodes), comme le détaillent les chercheurs dans leur article scientifique. Grâce à cette première étape, l’étude des données pourra débuter sur la plateforme technologique du Health Data Hub d’ici l’été.
Ces résultats ouvrent la voie à la mise en place d’un système national de surveillance des traumatismes mais aussi à des analyses épidémiologiques portant par exemple sur l’impact des consommations de médicaments sur le risque d’accident. Des travaux qui devraient donc apporter un éclairage nouveau sur des enjeux de santé publique importants. Dans l’immédiat, le projet TARPON sera étendu à une quinzaine de services d’urgences répartis sur tout le territoire français.

 


 
[1] TARPON : Traitement Automatique des Résumés de Passages aux urgences pour un Observatoire National
[2] Cette recherche répond aux obligations du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).

 

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Obésité : le monoxyde de carbone protecteur chez la souris

 

 

 

 

 

 

 

Obésité : le monoxyde de carbone protecteur chez la souris

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À l’Institut Mondor de recherche biomédicale, une équipe a développé un composé qui protège la souris de l’obésité. Cette molécule délivre du monoxyde de carbone en quantité contrôlée dans l’organisme. Après ingestion, elle limite la prise de poids des animaux et les désordres métaboliques associés à un régime gras. Son action bénéfique passe par un rééquilibrage de la flore intestinale, perturbée en cas d’obésité. Le développement de ce composé se poursuit.
Le monoxyde de carbone (CO) est un gaz naturellement produit par l’organisme en petite quantité. Il a des propriétés anti-inflammatoires, vasodilatatrices et anti-ischémiques. Dans de précédents travaux menés chez la souris, son administration a protégé les animaux des méfaits d’un régime riche en graisses, limitant leur prise de poids et les désordres métaboliques associés. Consciente de l’intérêt thérapeutique de ce gaz, l’équipe de Roberta Foresti et Roberto Motterlini, à l’Institut Mondor de recherche biomédicale à Créteil, développe des composés qui libèrent du CO dans l’organisme à dose contrôlée et en étudie les effets. Grâce aux expériences conduites avec une des molécules qu’ils ont mises au point (CORM-401), les chercheurs ont montré que chez la souris, les effets bénéfiques du CO pour lutter contre les méfaits de l’obésité passent, au moins en partie, par un rééquilibrage du microbiote intestinal. Cette flore joue en effet un rôle fondamental dans la maladie. Chez l’animal et chez l’humain, il a été montré à plusieurs reprises que l’obésité est associée à des anomalies importantes du microbiote intestinal, caractérisées par des excès ou au contraire des déficits en certaines souches bactériennes ainsi que des modifications de l’activité de plusieurs d’entre elles.   

           Un rééquilibrage
Les chercheurs ont centré leur analyse sur le microbiote suite à une observation importante. Lorsqu’ils administraient du CORM-401 par voie orale à des souris, ils constataient une accumulation de CO dans les selles des animaux, suggérant une action de ce composé au niveau intestinal. Pour le vérifier, les chercheurs ont donné la molécule à des souris rendues obèses, puis ils ont collecté à plusieurs reprises des échantillons de leurs selles pour analyse.
À partir des données recueillies (génomiques, transcriptomiques et métabolomiques), de nombreuses différences sont apparues entre le microbiote des souris obèses exposées au CO et celui des animaux qui n’avaient pas reçu le traitement. « Au moins une vingtaine de souches bactériennes associées à l’obésité dans différentes études, qui ont un effet protecteur ou au contraire délétère, sont modifiées par le traitement à base de CO », expliquent Roberta Foresti et Roberto Motterlini. L’une d’entre elles, Akkermansia muciniphila, connue pour être bénéfique sur le plan métabolique chez la souris comme chez l’humain, devient par exemple très abondante après le traitement par CORM-401 alors qu’elle est fortement déficitaire en cas d’obésité. « Nous observons également la restauration d’une activité normale du microbiote, telle qu’observée chez les sujets sains : les marqueurs associés à la respiration bactérienne, à leur métabolisme énergétique ou la production d’acides aminés se normalisent. Il semble que le CO reprogramme le microbiote et le fait repasser d’un état malade à un état sain », clarifient les chercheurs. Ces changements sont en outre associés à une amélioration de plusieurs paramètres cliniques, avec notamment un meilleur équilibre glucidique et une diminution de la résistance à l’insuline, phénomène délétère qui précède l’apparition d’un diabète.

Perspectives cliniques
« Cette molécule CORM-401 est très prometteuse. Pour autant, des études de toxicologie restent à effectuer avant d’envisager son évaluation chez l’humain. Aucun effet indésirable évident n’a été observé chez la souris à l’issue d’un traitement de trois mois, mais nous devons poursuivre le développement préclinique sur d’autres modèles animaux pour nous assurer de sa sécurité d’utilisation », concluent Roberta Foresti et Roberto Motterlini. Affaire à suivre…

Roberta Foresti, professeur de biochimie à l’Université Paris-Est-Créteil, et Roberto Motterlini est directeur de recherche Inserm, travaillent à l’Institut Mondor de recherche biomédicale (IMRB, unité Inserm 955) à Créteil.

Source : D.E. Benrahla et coll. An orally active carbon monoxide-releasing molecule enhances beneficial gut microbial species to combat obesity in mice. Redox Biol, 2024 Jun;72:103153. doi : 10.1016/j.redox.2024.103153.

 

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Rétine artificielle

 

 

 

 

 

 

 

Rétine artificielle

Rendre la vue en grâce à un implant se substituant aux photorécepteurs

PUBLIÉ LE : 02/05/2016
TEMPS DE LECTURE : 9 MIN

Certaines personnes qui ont perdu la vue suite à la dégénérescence de leurs cellules photoréceptrices peuvent désormais bénéficier d’une rétine artificielle. Fixé sur ou sous la rétine, cet implant leur permet de percevoir à nouveau des signaux lumineux. Plusieurs systèmes sont en cours d’évaluation, et la recherche se poursuit pour améliorer leurs performances et la perception visuelle des patients.
Dossier réalisé en collaboration avec Serge Picaud et José-Alain Sahel, Institut de la vision (unité Inserm 968, Paris) et co-fondateurs de Pixium Vision

Comprendre le principe de la rétine artificielle

Située au fond de l’œil, la rétine est composée de cellules sensibles à la lumière – les photorécepteurs – et d’un réseau de neurones. Les photorécepteurs transforment les signaux lumineux en signaux électriques qui sont acheminés jusqu’au cerveau via le nerf optique. Une défaillance des photorécepteurs altère donc la vue et peut conduire à la cécité.
La rétine artificielle se substitue aux photorécepteurs. Concrètement, il s’agit d’implants (de 3 x 3 mm) fixés sur ou sous la rétine, composés d’électrodes qui stimulent électriquement les neurones rétiniens. Les premiers dispositifs testés dans les années 1990 incluaient 16 à 20 électrodes. Ils en comportent actuellement jusqu’à 1 500. Cependant, la perception visuelle des patients n’est pas liée directement au nombre d’électrodes.
Plusieurs dispositifs sont en cours d’évaluation. Trois ont déjà obtenu le marquage des autorités européennes (marquage CE) – Argus II (Second sight, Etats-Unis), Retina Implant (AG, Allemagne) et IRIS II (Pixium Vision, France). Argus II a également obtenu le feu vert de l’agence américaine (FDA) et il est commercialisé en France dans le cadre du forfait innovation. Les trois dispositifs existant offrent des résultats à peu près similaires. La recherche se poursuit pour améliorer les performances de ces différents systèmes.

Comment fonctionne la rétine artificielle ?
Deux des dispositifs existants (Argus II et Iris II) sont dits épirétiniens : ils sont placés à la surface de la rétine, en contact avec les cellules ganglionnaires. Le troisième (Retina Implant) est placé sous la rétine, à la place des cellules photoréceptrices. Dans tous les cas, une intervention chirurgicale est nécessaire pour la mise en place de l’implant au contact de la rétine.

Implant de rétine artificielle © Inserm/JL. Guyomard
Dans le cas des modèles épirétiniens, des caméras sont intégrées dans une paire de lunettes. Elles transmettent les informations visuelles à un microordinateur placé dans la poche ou à la ceinture du patient. Ce microordinateur convertit les informations visuelles en codes de signaux électriques et les communique par ondes radio à un récepteur placé sur l’œil. Celui-ci les traduit en véritables courants électriques qui vont progresser sur la natte de fils pénétrant dans l’œil, pour atteindre l’implant composé d’électrodes et fixé sur la rétine. L’implant Argus II contient 60 électrodes, le modèle Iris II en comprend 150. Concernant ce dernier, les essais cliniques commencent suite aux résultats concluants obtenus avec IRIS I à 49 électrodes.
L’implant allemand (Retina Implant) fonctionne différemment. Il comprend 1 500 électrodes et autant de diodes sensibles à la lumière. Les diodes transforment la lumière en courants électriques qui sont amplifiés par un circuit électronique avant d’être libérés au niveau des électrodes. Ce système ne nécessite pas de lunettes, mais il faut alimenter le circuit électrique relié aux photodiodes. Cela implique la présence d’un câble qui part de la puce sous la rétine, vers l’extérieur de l’œil, jusque derrière l’oreille. La pose de ce câble est très complexe. Dans ce dispositif, chaque électrode ne produit pas un pixel d’une image, ce qui pourrait expliquer pourquoi les patients n’ont pas les performances visuelles attendues pour un implant avec autant d’électrodes.

Qui peut bénéficier d’une rétine artificielle ?
Le dispositif de rétine artificielle s’adresse aux personnes aveugles dont les cellules photoréceptrices ont dégénéré, mais chez lesquelles les cellules nerveuses de la rétine et le nerf optique demeurent fonctionnels. C’est le cas des sujets atteints de rétinopathie pigmentaire ou encore de dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
La rétinopathie pigmentaire est une maladie génétique qui touche environ 1 naissance sur 4 000 (30 000 cas environ en France). Les patients vivent avec un champ visuel qui se réduit progressivement puis perdent la vue, généralement après 50 ans.
La DMLA est quant à elle, une maladie du vieillissement. Le champ de vision central est atteint, ce qui rend difficile la lecture ou encore la reconnaissance des visages. Un quart des plus de 75 ans est touché. Malgré des progrès récents dans la prise en charge de certaines complications, aucun traitement ne permet actuellement de guérir ces deux maladies.
À ce jour, les implants sont posés chez des patients en stade terminal de dégénérescence rétinienne, les capacités fonctionnelles du tissu restant sont donc très limitées. Une opération plus précoce pourrait apporter de meilleurs résultats. Des études cliniques devront toutefois le prouver.

Quels sont les résultats actuels ?
En France, une vingtaine de personnes atteintes de rétinite pigmentaire déjà ont bénéficié de l’implantation du système Argus II, grâce au forfait innovation du ministère de la santé qui assure le financement du dispositif (environ 90 000 euros l’unité). Âgés de 29 à 73 ans, les patients ont tous eu de bonnes suites opératoires et sont pour la plupart en phase de rééducation. Au total, 36 patients vont recevoir l’implant, dans trois établissements hospitalier : le CHNO des Quinze-Vingts à Paris, le CHU de Bordeaux et le CHU de Strasbourg.
Ces patients arrivent à percevoir des signaux lumineux. Certains d’entre eux peuvent se déplacer seuls, repérer une porte ou une fenêtre dans une pièce, visualiser des passages piétons ou encore suivre une ligne sur le sol. Et parmi eux, certains parviennent à lire, sur un écran d’ordinateur, des mots à gros caractères blancs sur fond noir, voire de courtes phrases. Il existe toutefois des différences importantes dans les résultats obtenus. Cela pourrait s’expliquer en partie par la variabilité de l’état de conservation global du tissu rétinien d’un patient à l’autre.
Dans tous les cas, les patients ne retrouvent pas leur vision d’antan. Il leur faut réapprendre une nouvelle façon de voir, en associant et en ordonnant les signaux lumineux perçus. Cela demande plusieurs heures quotidiennes d’exercices. La résolution actuelle proposée par les implants Argus II est de 60 pixels, celle des nouveaux implants IRIS II de 150 pixels.

Les enjeux de la recherche
Quels sont les progrès attendus ? L’objectif, à terme, est de proposer un œil bionique qui permette de reconnaître des visages, de lire ou encore de se déplacer en parfaite autonomie. Pour effectuer ces tâches complexes, les études suggèrent qu’une résolution au minimum de 600 à 1 000 pixels serait suffisante.
Pourtant, les performances de l’implant allemand qui comprend 1 500 électrodes sont très limitées. Elles montrent qu’il ne suffit pas de multiplier le nombre d’électrodes pour augmenter la résolution. Celle-ci est en fait restreinte par la surface de la rétine sur laquelle les cellules gliales forment une couche isolante entre les neurones et l’implant. Cela rend difficile la focalisation des courants électriques transmis par chaque électrode sur un groupe réduit de neurones. En outre, les signaux diffusent de telle sorte que les stimulations produites par deux électrodes voisines se chevauchent. Pour améliorer la résolution, il est indispensable que chaque électrode reçoive et émette un signal électrique spécifique, et qu’elle stimule à son tour une zone indépendante de ses voisines, de façon extrêmement focalisée. En d’autres termes, on recherche un codage de l’information visuelle point par point, et non plus diffus.

Procurer des images plus nettes aux patients
’est ce à quoi a travaillé l’Institut de la vision, en partenariat avec l’université de Stanford. Les chercheurs ont utilisé un implant développé par Stanford, muni d’électrodes de retour permettant cette individualisation du signal émis par chaque électrode. Cette version high-tech a été testée sur des rétines de primates aveugles mises en culture. Les chercheurs ont mesuré l’activité des cellules ganglionnaires en fonction des stimulations émises. Ils ont ainsi montré que des cellules ganglionnaires individuelles peuvent être activées spécifiquement par une seule électrode. Cette expérience prouve la très grande résolution spatiale de ce nouvel implant. Les prototypes ont été fabriqués en France, par la société Pixium Vision qui poursuit le développement de cet implant PRIMA « nouvelle génération ». Il s’agit d’un implant sous-rétinien ne nécessitant aucun câble d’alimentation. Il se réduit à une plaque comprenant des diodes photoélectriques qui seront excitées par des signaux lumineux infrarouges transmis par des lunettes. Le modèle, au départ testé avec 200 à 600 électrodes, pourrait en contenir 1 000 à 2 000 à terme, voire plus. La société entend effectuer la première implantation chez l’homme courant 2016.
Les chercheurs de l’Institut de la vision développent également une technologie d’implants en 3 dimensions en collaboration avec l’ESIEE (Etablissement d’enseignement supérieur scientifique de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris). Au lieu d’être plans, ces implants présentent des reliefs en forme de puits dans lesquels les neurones rétiniens vont se nicher. Cela permet de focaliser les stimulations électriques sur les neurones venus s’intégrer dans ces puits. Cette technologie d’implants a été testée avec succès sur des animaux, montrant que les neurones s’intègrent effectivement bien dans les puits. La modélisation des courants démontre l’augmentation de la résolution spatiale de tels dispositifs 3D pour la stimulation de pixels indépendants. À terme, ces implants 3D devraient permettre de produire une résolution très fine des stimulations électriques.

Améliorer les protocoles de réhabilitation
Un autre point d’amélioration possible concerne les méthodes de réhabilitation, utilisées pour entrainer les patients à exploiter le mieux possible leur implant. Les équipes hospitalières travaillent sur ces méthodes. Par exemple, en apprenant à un patient à reprogrammer lui-même son implant, les cliniciens espèrent améliorer les résultats. L’entreprise Streetlab, qui a construit une véritable rue artificielle à l’Institut de la vision, est actuellement très impliquée dans le développement de tels protocoles de réhabilitation.

Pouvoir intégrer les données en temps réel
Dans la perspective de rétines artificielles ultra performantes, des mathématiciens de l’Institut de la vision se sont penchés sur le processus de transformation de l’information visuelle en stimulations électriques. En effet, l’augmentation anticipée du nombre de pixels des implants demandera des temps de calcul sur les images plus importants et donc une consommation énergétique accrue nécessitant une lourde batterie. Pour contourner ces problèmes, l’Institut de la vision a développé un nouveau capteur d’information visuelle sans image, afin de limiter la lourdeur du traitement de l’information visuelle. Ce capteur est déjà intégré dans les lunettes de la société Pixium Vision.

Des yeux portatifs – vidéo pédagogique – 2 min 22 – vidéo extraite de la série La boîte noire (2014)
Augmenter les performances des électrodes
Bien tolérés, les implants sont actuellement à base de polymères couramment utilisés en médecine, avec des électrodes métalliques. Ces matériaux peuvent toutefois se dégrader avec le temps, et l’efficacité des électrodes pourrait être encore améliorée. Les chercheurs étudient donc de nouveaux matériaux comme le graphène et le diamant. Extrêmement stable, ce dernier possède d’excellentes propriétés de semi-conducteur et une extrême biocompatibilité. En collaboration avec le CEA-List, les chercheurs de l’Institut de la vision ont confirmé la biocompatibilité du matériau avec les cellules rétiniennes, tant ex vivo que sur l’animal. Ils évaluent maintenant les propriétés électriques du diamant concernant la stimulation des neurones. Il s’agit notamment de déterminer s’il est possible de réduire les charges électriques envoyées dans le tissu.

Optogénétique, l’autre façon de restaurer la vision
Une technique en développement pourrait venir concurrencer la rétine artificielle : l’optogénétique. Cette stratégie consiste à introduire dans les neurones de la rétine une protéine sensible à la lumière et capable de créer un courant électrique au travers de la membrane cellulaire. Des protéines de ce type existent à l’état naturel, ce sont les opsines, comme la rhodopsine-canal2 issue d’une algue ou encore de l’halorhodopsine provenant d’une bactérie. L’expression de ces protéines peut être obtenue dans une cellule nerveuse en y introduisant leur gène, par l’intermédiaire d’un vecteur viral. Ainsi, les neurones d’une rétine « aveugle » peuvent redevenir sensibles à la lumière, et transmettre à nouveau un signal électrique au cerveau.
Des essais concluants ont été réalisés chez des souris aveugles, puis sur des rétines de primates. Ces premiers résultats montrent que les cellules ganglionnaires peuvent exprimer les opsines après une injection intravitréenne du vecteur viral. Ces cellules sont excitées par des stimulations très courtes (quelques millisecondes) de lumière intense. L’Institut de la vision travaille maintenant au développement d’une caméra asynchrone, portée par des lunettes, permettant de transmettre seulement certaines longueurs d’ondes, non toxiques pour l’œil et capables de stimuler les opsines. Une société américaine (Retrosense) a annoncé le début d’un essai clinique (portant sur un patient). En France, la société Gensight Biologics devrait également commencer des essais cliniques dans le courant de l’année 2017.

 

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Découverte du rôle d’un régulateur cérébral impliqué dans des maladies psychiatriques

 

 

 

 

 

 

 

Découverte du rôle d’un régulateur cérébral impliqué dans des maladies psychiatriques

11 Déc 2023 | Par Inserm (Salle de presse) | Biologie cellulaire, développement et évolution | Neurosciences, sciences cognitives, neurologie, psychiatrie


Il était communément admis que des familles de récepteurs synaptiques transmettaient des messages excitateurs et d’autres inhibiteurs vis-à-vis des neurones. © Adobe Stock

Dans le cerveau, un récepteur supposément excitateur appelé GluD1 se révèle contre tout attente jouer un rôle majeur dans le contrôle de l’inhibition des neurones. Des altérations dans le gène GluD1 étant retrouvées dans un certain nombre de troubles neurodéveloppementaux et de maladies psychiatriques comme les troubles du spectre autistique (TSA) ou la schizophrénie, cette découverte ouvre la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques pour lutter contre les déséquilibres entre transmissions neuronales excitatrices et inhibitrices associés à ces maladies. Ce travail, publié dans Science, est le fruit de collaborations de chercheurs et chercheuses de l’Inserm, du CNRS et de l’ENS au sein de l’Institut de biologie de l’ENS (IBENS, Paris) avec le laboratoire de Biologie moléculaire du MRC à Cambridge au Royaume-Uni.

La complexité du fonctionnement du cerveau révèle bien des surprises. Alors qu’il était communément admis que dans l’activité cérébrale, des familles de récepteurs synaptiques (situés à l’extrémité d’un neurone) transmettaient des messages excitateurs et d’autres inhibiteurs vis-à-vis des neurones, une étude copilotée par les chercheurs Inserm Pierre Paoletti et Laetitia Mony à l’Institut de Biologie de l’ENS rebat les cartes.

Pour bien comprendre de quoi il retourne, revenons aux fondamentaux. Une synapse « excitatrice » déclenche la création d’un message nerveux sous forme de courant électrique si un récepteur à sa surface peut se fixer à un neurotransmetteur excitateur présent dans l’espace interneuronal, le plus souvent du glutamate. On parle d’excitation neuronale. Une synapse « inhibitrice » empêche au contraire cette excitation neuronale en libérant un neurotransmetteur inhibiteur, souvent le GABA. On parle d’« inhibition neuronale ». Ainsi, la famille de récepteurs à glutamate (iGluR) et celle des récepteurs à GABA (GABAAR) ont a priori des rôles opposés.

Toutefois, un sous-type de récepteur au glutamate appelé GluD1 intriguait les scientifiques. En effet, alors qu’il est censé avoir un rôle excitateur, celui-ci est préférentiellement retrouvé au niveau de synapses inhibitrices. Cette observation, effectuée par l’équipe de la chercheuse Inserm Cécile Charrier à l’Institut de Biologie de l’ENS en 2019, avait interpellé la communauté scientifique car le gène GluD1 est souvent associé à des troubles du neurodéveloppement comme l’autisme ou à des maladies psychiatriques de type troubles bipolaires ou schizophrénie, dans les études génétiques de population humaine. Comprendre le rôle de ce récepteur représente donc un enjeu de taille. Pour y voir plus clair, l’équipe de Pierre Paoletti a étudié ses propriétés moléculaires et sa fonction, à partir de cerveaux de souris, au niveau de l’hippocampe où il est fortement exprimé.

Un rôle atypique

Les chercheurs savaient déjà que contrairement à son nom, le récepteur GluD1 ne peut pas se lier au glutamate. Mais dans cette étude, ils ont eu la surprise de constater qu’il fixait le GABA. L’équipe de Radu Aricescu à Cambridge a même décrit dans la publication la structure atomique fine du site d’interaction de GluD1 avec le GABA, grâce à une technique appelée cristallographie aux rayons X[1].

Son rôle dans le cerveau n’est donc a priori pas excitateur de l’activité neuronale mais inhibiteur. En prenant en compte ce résultat, peut-on toujours dire qu’il s’agit d’un récepteur appartenant à la famille des récepteurs à glutamate ?

« C’est en effet une interrogation mais toutes les analyses de phylogénie (les liens de parenté entre gènes et protéines) et les données structurales montrent qu’il en fait bien partie. En revanche, il est possible que certaines mutations acquises au cours de l’évolution aient profondément modifié ses propriétés fonctionnelles », explique Pierre Paoletti.

Autre curiosité, ce récepteur ne fonctionne ni comme un récepteur « classique » du glutamate ni comme un récepteur du GABA. Les deux provoquent en effet l’ouverture de canaux dans la membrane cellulaire permettant le passage d’ions responsables de l’excitation ou de l’inhibition du neurone. Le récepteur GluD1, lui, ne permet l’ouverture d’aucun canal. Son activité résulte d’autres mécanismes internes à la cellule qui restent à clarifier.

Enfin, ce travail suggère un rôle régulateur majeur de GluD1 vis-à-vis des synapses inhibitrices. En effet, lorsqu’il est activé par la présence de GABA, la synapse inhibitrice voit son efficacité augmenter. Cela se traduit par une réponse inhibitrice plus importante qui perdure pendant des dizaines de minute.

« Autrement dit, GluD1 renforce le signal d’inhibition. Peut-être en favorisant le recrutement de nouveaux récepteurs GABA à la synapse ? On peut en tout cas parler de régulateur clé », explique Laetitia Mony.

Pour les scientifiques ayant contribué à ce travail, cette découverte marque une véritable avancée.

« Ces résultats ouvrent la voie à une meilleure compréhension des déséquilibres entre messages excitateurs et inhibiteurs dans le cerveau en cas de troubles neurodéveloppementaux et de maladies psychiatriques comme les TSA ou encore la schizophrénie, ou dans des maladies comme l’épilepsie caractérisée par une hyper excitabilité neuronale. Dans un second temps, il sera important d’étudier si GluD1 peut constituer une cible thérapeutique intéressante pour rétablir un meilleur équilibre et réduire les symptômes dans ces maladies », concluent-ils.

 

[1] Il s’agit d’une technique d’analyse physicochimique qui se fonde sur la diffraction des rayons X par la matière pour connaître sa composition moléculaire et sa structure en 3D.

 

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