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L'ÉCRITURE

 


 

 

 

 

 

écriture
(latin scriptura)

Consulter aussi dans le dictionnaire : écriture
Cet article fait partie du dossier consacré à la Mésopotamie.

Système de signes graphiques servant à noter un message oral afin de pouvoir le conserver et/ou le transmettre.

HISTOIRE
Toutes les civilisations qui ont donné naissance à une forme d'écriture ont forgé une version mythique de ses origines ; elles en ont attribué l'invention aux rois ou aux dieux. Mais les premières manifestations de chaque écriture témoignent d'une émergence lente et de longs tâtonnements. Dans ces documents, les hommes ont enregistré : des listes d'impôts et des recensements ; des traités et des lois, des correspondances entre souverains ou États ; des biographies de personnages importants ; des textes religieux et divinatoires. Ainsi l'écriture a-t-elle d'abord servi à noter les textes du pouvoir, économique, politique ou religieux. Par ailleurs, les premiers systèmes d'écriture étaient compliqués. Leur apprentissage était long et réservé à une élite sociale voulant naturellement défendre ce statut privilégié et qui ne pouvait guère être favorable à des simplifications tendant à faciliter l'accès à l'écriture, instrument de leur pouvoir.

À partir du IIIe millénaire avant J.-C., toutes les grandes cultures du Proche-Orient ont inventé ou emprunté un système d'écriture. Les systèmes les plus connus, et qui ont bénéficié de la plus grande extension dans le monde antique, demeurent ceux de l'écriture hiéroglyphique égyptienne et de l'écriture cunéiforme, propre à la Mésopotamie. L'écriture égyptienne est utilisée dans la vallée du Nil, jusqu'au Soudan, sur la côte cananéenne et dans le Sinaï. Mais, pendant près d'un millénaire, l'écriture cunéiforme est, avec la langue sémitique (l'assyro-babylonien) qu'elle sert à noter, le premier moyen de communication international de l'histoire. L'Élam (au sud-ouest de l'Iran), les mondes hittite (en Anatolie) et hourrite (en Syrie du Nord), le monde cananéen (en Phénicie et en Palestine) ont utilisé la langue et l'écriture mésopotamienne pour leurs échanges diplomatiques et commerciaux, mais aussi pour rédiger et diffuser leurs propres œuvres littéraires et religieuses. Pour leur correspondance diplomatique, les pharaons du Nouvel Empire avaient eux-mêmes des scribes experts dans la lecture des textes cunéiformes.
À la même époque, d'autres systèmes d'écriture sont apparus, mais leur extension est limitée : en Anatolie, le monde hittite utilise une écriture hiéroglyphique qui ne doit rien à l'Égypte. Dans le monde égéen, les scribes crétois inventent une écriture hiéroglyphique, puis linéaire, de 80 signes environ, reprise par les Mycéniens.
Au Ier millénaire, l'apparition de l'alphabet marque une histoire décisive dans l'histoire de l'écriture. Depuis des siècles, l'Égypte dispose, au sein de son écriture nationale, du moyen de noter les consonnes. Au xive siècle avant J.-C., les scribes d'Ougarit gravent sur des tablettes d'argile des signes cunéiformes simplifiés et peu nombreux, puisqu'ils ne sont que 30, correspondant à la notation de 27 consonnes et de 3 valeurs vocaliques. Mais les uns et les autres ne font pas école. Ce n'est qu'après le xie siècle que le système d'écriture alphabétique se généralise à partir de la côte phénicienne. Une révolution sociale accompagne cette innovation radicale : les scribes, longuement formés dans les écoles du palais et des temples, voient leur rôle et leur importance diminuer.

LE SYSTÈME CUNÉIFORME

Le premier système d'écriture connu apparaît dans la seconde moitié du IVe millénaire avant notre ère, en basse Mésopotamie, pour transcrire le sumérien. Dans l'ancienne Mésopotamie, les premiers signes d'écriture sont apparus pour répondre à des besoins très concrets : dénombrer des biens, distribuer des rations, etc. Comme tous les systèmes d'écriture, celui-ci apparaît donc d'abord sous forme de caractères pictographiques, dessins schématisés représentant un objet ou une action. Le génie de la civilisation sumérienne a été, en quelques siècles, de passer du simple pictogramme à la représentation d'une idée ou d'un son : le signe qui reproduit à l'origine l'apparence de la flèche (ti en sumérien) prend la valeur phonétique ti et la signification abstraite de « la vie », en même temps que sa graphie se stylise et, en s'amplifiant, ne garde plus rien du dessin primitif.

LES PICTOGRAMMES DE L'ÉCRITURE CUNÉIFORME
Trouvées sur le site d'Ourouk IV, de petites tablettes d'argile portent, tracés avec la pointe d'un roseau, des pictogrammes à lignes courbes, au nombre d'un millier, chaque caractère représentant, avec une schématisation plus ou moins grande et sans référence à une forme linguistique, un objet ou un être vivant. L'ensemble de ces signes, qui dépasse le millier, évolue ensuite sur deux plans. Sur le plan technique, les pictogrammes connaissent d'abord une rotation de 90° vers la gauche (sans doute parce que la commodité de la manipulation a entraîné une modification dans l'orientation de la tablette tenue en main par le scribe) ; ultérieurement, ces signes ne sont plus tracés à la pointe sur l'argile, mais imprimés, dans la même matière, à l'aide d'un roseau biseauté, ce qui produit une empreinte triangulaire en forme de « clou » ou de « coin », cuneus en latin, d'où le nom de cunéiforme donné à cette écriture.

LE SENS DES PICTOGRAMMES CUNÉIFORMES
Sur le plan logique, l'évolution est plus difficile à cerner. On observe cependant, dès l'époque primitive, un certain nombre de procédés notables. Ainsi, beaucoup de ces signes couvrent une somme variable d'acceptions : l'étoile peut tour à tour évoquer, outre un astre, « ce qui est en haut », le « ciel » et même un « être divin ». Par ailleurs, les sumériens ne se sont pas contenté de représenter un objet ou un être par un dessin figuratif : ils ont également noté des notions abstraites au moyen de symboles. C'est ainsi que deux traits sont parallèles ou croisés selon qu'ils désignent un ami ou un ennemi.
Le sens peut aussi procéder de la combinaison de deux éléments graphiques. Par exemple, en combinant le signe de la femme et celui du massif montagneux, on obtient le sens d'« étrangère », « esclave ».
Tous ces signes, appelés pictogrammes par référence à leur tracé, sont donc aussi des idéogrammes, terme qui insiste sur leur rôle sémantique (leur sens) et indique de surcroît leur insertion dans un système. L'écriture cunéiforme dépasse ensuite ce stade purement idéographique. Un signe dessiné peut aussi évoquer le nom d'une chose, et non plus seulement la chose elle-même. On recourt alors au procédé du rébus, fondé sur le principe de l'homophonie (qui ont le même son). Ce procédé permet de noter tous les mots et ainsi des messages plus élaborés.

L'ÉCRITURE DES AKKADIENS
Cependant, les Sumériens considèrent les capacités phonétiques des signes, nouvellement découvertes, comme de simples appoints à l'idéographie originelle, et font alterner arbitrairement les deux registres, idéographique et phonographique. Lorsque les Akkadiens empruntent ce système vers − 2300, ils l'adaptent à leur propre langue, qui est sémitique, et font un plus grand usage du phonétisme, car, à la différence du sumérien, dont les vocables peuvent se figurer par des idéogrammes toujours identiques, flanqués d'affixes qui déterminent leur rôle grammatical, l'akkadien renferme déclinaisons et conjugaisons.

L'ÉVOLUTION DU SUMÉRO-AKKADIEN
L'écriture suméro-akkadienne ne cesse d'évoluer et connaît notamment une expansion importante au IIe millénaire. Le cunéiforme est adopté par des peuples de l'Orient qui l’adaptent à la phonétique de leur langue : Éblaïtes, Susiens, Élamites, etc. Vers − 1500, les Hittites adoptent les cunéiformes babyloniens pour noter leur langue, qui est indo-européenne, associant leurs idéogrammes à ceux venus de Mésopotamie, qu'ils prononcent en hittite. L'ougaritique, connu grâce aux fouilles de Ras Shamra (l'antique Ougarit), dans l'actuelle Syrie, est un alphabet à technique cunéiforme ; il note plusieurs langues et révèle que, à partir de − 1400 environ, l'écriture en cunéiformes est devenue une sorte de forme « véhiculaire », simplifiée, servant aux échanges internationaux. Au Ier millénaire encore, le royaume d'Ourartou (situé à l'est de l'Anatolie) emprunte les caractères cunéiformes (vers − 800) et ne les modifie que légèrement. Enfin, pendant une période assez brève (vie-ive s. avant notre ère), on utilise un alphabet à technique cunéiforme pour noter le vieux perse. Au Ier millénaire, devant les progrès de l'alphabet et de la langue des Araméens (araméen), l'akkadien devient une langue morte ; le cunéiforme ne se maintient que dans un petit nombre de villes saintes de basse Mésopotamie, où il est utilisé par des Chaldéens, prêtres et devins, jusqu'au ier s. après J.-C., avant de sombrer dans l'oubli.

DU HIÉROGLYPHE AU DÉMOTIQUE

Hiéroglyphes
Tout d'abord hiéroglyphique, l'écriture égyptienne évolue en se simplifiant vers une écriture plus maniable, et d'un usage quotidien. Le hiéroglyphe est une unité graphique utilisée dans certaines écritures de l'Antiquité, comme l'égyptien. Les premiers témoignages « hiéroglyphiques » suivent de quelques siècles les plus anciennes tablettes sumériennes écrites en caractères cunéiformes. Le mot « hiéroglyphe », créé par les anciens Grecs, fait état du caractère « sacré » (hieros) et « gravé » (gluphein) de l'écriture égyptienne monumentale, mais n'est réservé à aucun système d'écriture particulier. On désigne par le même terme les écritures crétoises du minoen moyen (entre 2100 et 1580 avant J.-C.), que l'on rapproche ainsi des signes égyptiens, mais qui demeurent indéchiffrées.

LES HIÉROGLYPHES ÉGYPTIENS
La langue égyptienne est une langue chamito-sémitique dont la forme écrite n'est pas vocalisée. Vers 3000 avant J.-C., l'Égypte possède l'essentiel du système d'écriture qu'elle va utiliser pendant trois millénaires et dont les signes hiéroglyphiques offrent la manifestation la plus spectaculaire. Quelque 700 signes sont ainsi créés, beaucoup identifiables parce que ce sont des dessins représentant des animaux, un œil, le soleil, un outil, etc.
Cette écriture est d'abord pictographique (un signe, dessiné, représente une chose ou une action). Mais dès l'origine, l'écriture égyptienne eut recours, à côté des signes-mots (idéogrammes), à des signes ayant une valeur phonétique (phonogrammes), où un signe représente un son. Le dessin du canard représente l'animal lui-même, mais canard se disant sa, le même signe peut évoquer le son sa, qui sert aussi à désigner le mot « fils ». Pour éviter au lecteur confusions ou hésitations, le scribe a soin de jalonner son texte de repères : signalisation pour désigner l'emploi du signe comme idéogramme (signe-chose, représentant plus ou moins le sens du mot) ou phonogramme, et compléments phonétiques qui indiquent la valeur syllabique. Il existe également des idéogrammes déterminatifs, qui ne se lisent pas, mais qui indiquent à quelle catégorie appartient le mot. Les signes peuvent être écrits de gauche à droite ou de droite à gauche.
On distingue trois types d'écriture égyptienne : l'écriture cursive ou hiératique, tracée sur papyrus, l'écriture démotique, plus simplifiée que l'écriture hiératique, et l'écriture hiéroglyphique proprement dite, c'est-à-dire celle des monuments, antérieure à 2500 avant J.-C. Ces hiéroglyphes, gravés à l'origine dans la pierre, en relief ou en creux, peuvent être disposés verticalement ou horizontalement, comme ils peuvent se lire de droite à gauche ou de gauche à droite, le sens de la lecture étant indiqué par la direction du regard des êtres humains et des animaux, toujours tourné vers le début du texte.
L'écriture hiéroglyphique apparaît toute constituée dès les débuts de l'histoire (vers 3200 avant J.-C.) ; la dernière inscription en hiéroglyphes, trouvée à Philae, date de 394 après J.-C.

LE SYSTÈME DE L'ÉCRITURE ÉGYPTIENNE
Les idéogrammes peuvent être des représentations directes ou indirectes, grâce à divers procédés logiques :
– la représentation directe de l'objet que l'ont veut noter ;
– la représentation par synecdoque ou métonymie, c'est-à-dire en notant la partie pour le tout, l'effet pour la cause, ou inversement : ainsi, la tête de bœuf représente cet animal ; deux yeux humains, l'action de voir ;
– la représentation par métaphore : on note, par exemple, la « sublimité » par un épervier, car son vol est élevé ; la « contemplation » ou la « vision », par l'œil de l'épervier, parce qu'on attribuait à cet oiseau la faculté de fixer ses regards sur le disque du Soleil ;
– représentation par « énigme » – le terme est de Champollion – ; on emploie, pour exprimer une idée, l'image d'un objet physique n'ayant qu'un rapport lointain avec l'objet même de l'idée à noter : ainsi, une plume d'autruche signifie la « justice », parce que, disait-on, toutes les plumes des ailes de cet oiseau sont parfaitement égales ; un rameau de palmier représente l'« année », parce que cet arbre était supposé avoir autant de rameaux par an que l'année compte de mois, etc.

L'ÉVOLUTION DE L'ÉCRITURE ÉGYPTIENNE

L'évolution des hiéroglyphes vers le phonétisme

À partir des idéogrammes originels, l'écriture égyptienne a évolué vers un phonétisme plus marqué que celui du cunéiforme. Selon le principe du rébus là aussi, on a utilisé, pour noter telle notion abstraite difficile à figurer, l'idéogramme d'un objet dont le nom a une prononciation identique ou très proche. Par exemple, le scarabée, khéper, a servi à noter la notion qui se disait également khéper, le « devenir ».
Poussé plus loin, le recours au phonétisme mène à l'acronymie. Un acronyme est en l'occurrence une sorte de sigle formé de toute consonne initiale de syllabe. Apparaissent ainsi des acronymes trilitères et bilitères (nfr, « cœur » ; gm, « ibis »), ainsi que des acronymes unilitères (r, « bouche »), qui constituent une espèce d'alphabet consonantique de plus de vingt éléments.
Mais le fait de noter exclusivement les consonnes entraîne beaucoup trop d'homonymies. Pour y remédier, on utilise certains hiéroglyphes comme déterminatifs sémantiques destinés à guider l'interprétation sémantique des mots écrits phonétiquement. Par exemple, le signe du « Soleil », associé à la « massue », hd, et au « cobra », dj, qui jouent un rôle phonétique, mène à la lecture hedj, « briller ».C'est dans la catégorie des déterminatifs qu'entre le cartouche, encadrement ovale signalant un nom de souverain. Quelle que soit sa logique, cette écriture est d'un apprentissage et d'une lecture difficiles, et se prête peu à une graphie rapide.

L'écriture hiératique

Sur le plan technique, si la gravure dans la pierre s'accommode de ces formes précises, l'utilisation du roseau ou du pinceau sur du papyrus ou de la peau entraîne une écriture plus souple. Les hiéroglyphes sont simplifiés pour aboutir à deux formes cursives : l'écriture hiératique (usitée par les prêtres) et l'écriture démotique (servant à la rédaction de lettres et de textes courants). Tracée sur papyrus à l'aide d'un roseau à la pointe écrasée, trempée dans l'encre noire ou rouge, l'écriture hiératique est établie par simplification et stylisation des signes hiéroglyphiques. Avec ses ligatures, ses abréviations, elle sert aux besoins de la vie quotidienne : justice, administration, correspondance privée, inventaires mais aussi littérature, textes religieux, scientifiques, etc.

Le démotique
Vers 700 avant J.-C., une nouvelle cursive, plus simplifiée, remplace l'écriture hiératique. Les Grecs lui donnent le nom de « démotique », c'est-à-dire « (écriture) populaire », car elle est d'un usage courant et permet de noter les nouvelles formes de la langue parlée. Utilisée elle aussi sur papyrus ou sur ostraca (tessons de poterie), cette écriture démotique suffit à tous les usages pendant plus de 1000 ans, exception faite des textes gravés sur les monuments, qui demeurent l'affaire de l'hiéroglyphe, et des textes religieux sur papyrus pour lesquels on garde l'emploi de l'écriture hiératique.
Sur le plan fonctionnel, les Égyptiens, tout comme les Sumériens, n'ont pas exploité pleinement leurs acquis et se sont arrêtés sur le chemin qui aurait pu les mener à une écriture alphabétique. Demeuré longtemps indéchiffrable, le système d’écriture égyptien fut décomposé et analysé par Champollion (1822) grâce à la découverte de la pierre de Rosette, qui portait le même texte en hiéroglyphe, en démotique et en grec.

LES ÉCRITURES ANCIENNES DÉCHIFFRÉES
Alliant érudition, passion et intuition, les chercheurs du xixe s. déchiffrent les écritures des civilisations mésopotamiennes et égyptiennes.
Dans leurs travaux, ils durent résoudre deux problèmes : celui de l'écriture proprement dite, d'une part ; celui de la langue pour laquelle un système d'écriture était employé, d'autre part. Le document indispensable fut donc celui qui utilisait au moins deux systèmes d'écriture (ou davantage) dont l'un était déjà connu : la pierre de Rosette, rédigé en 2 langues et trois systèmes d’écritures (hiéroglyphe, démotique et grec) permit de déchiffrer les hiéroglyphes, grâce à la connaissance du grec ancien. Les savants durent ensuite faire l'hypothèse que telle ou telle langue avait été utilisée pour rédiger un texte donné ; Jean-François Champollion postula ainsi que la langue égyptienne antique a survécu dans la langue copte, elle-même conservée dans la liturgie de l'église chrétienne d'Égypte. De même le déchiffreur de l’écriture cunéiforme, sir Henry Creswicke Rawlinson, une fois les textes en élamite et vieux-perse de Béhistoun mis au point, fit l'hypothèse, avec d'autres chercheurs, que le texte restant était du babylonien, et qu'il s'agissait d'une langue sémitique dont les structures pouvaient être retrouvées à partir de l'arabe et de l'hébreu.

LES DÉCHIFFREURS
1754 : l'abbé Barthélemy propose une lecture définitive des textes phéniciens et palmyriens.
1799 (2 août) : mise au jour de la pierre de Rosette, dans le delta du Nil, portant copie d'un décret de Ptolémée V Épiphane (196 avant J.-C.) rédigé en trois écritures, hiéroglyphique, hiératique et grecque.
1822 : Lettre à Monsieur Dacier, de J.-F. Champollion, où ce dernier expose le principe de l'écriture égyptienne.
1824 : parution du Précis du système hiéroglyphique rédigé par Champollion.
À partir de 1835 : l'Anglais H. C. Rawlinson copie, à Béhistoun, en Iran, une inscription célébrant les exploits de Darius Ier (516 avant J.-C.) rédigée selon trois systèmes d'écriture cunéiforme, en vieux-perse, en élamite et en babylonien (akkadien), langues jusqu'alors inconnues.
1845 : le texte en vieux-perse est déchiffré par Rawlinson.
1853 : le texte en élamite est déchiffré par E. Norris.
1857 : un même texte babylonien est confié à quatre savants qui en proposent des traductions identiques.
1858 : Jules Oppert publie son Expédition scientifique en Mésopotamie, qui contribue au déchiffrement du cunéiforme.
1905 : F. Thureau-Dangin établit l'originalité de l'écriture et du système linguistique des Sumériens.
1917 : le Tchèque Hrozny établit que les textes hittites, écrits en caractères cunéiformes, servent à noter une langue indo-européenne, désormais déchiffrée.
1945 : découverte d'une stèle bilingue à Karatépé, en Cilicie ; la version phénicienne du texte permet de déchiffrer un texte louwite (proche du hittite) noté en écriture hiéroglyphique.
1953 : les Anglais M. Ventris et J. Chadwick établissent que les textes rédigés en écriture dite « linéaire B » sont du grec archaïque (mycénien) ; le linéaire B est une écriture syllabique comprenant environ 90 signes.

LA « LANGUE GRAPHIQUE » DES CHINOIS
Après les écritures sumérienne et égyptienne, l'écriture chinoise est la troisième écriture importante à avoir découpé les messages en mots. Mais elle n'a pas évolué comme les deux autres, car, à la différence de tous les systèmes d'écriture, qui sont parvenus, à des degrés divers, à exprimer la pensée par la transcription du langage oral, l'écriture chinoise note une langue conçue en vue de l'expression écrite exclusivement, et appelée pour cette raison « langue graphique ».

L'ÉVOLUTION DES IDÉOGRAMMES CHINOIS
Les premiers témoignages de l’écriture chonoise datent du milieu du IIe millénaire avant J.-C. : ce sont des inscriptions divinatoires, gravées sur des carapaces de tortues ou des omoplates de bœufs. Les devins y gravaient les questions de leurs « clients » puis portaient contre ce support un fer chauffé à blanc et interprétaient les craquelures ainsi produites. Ce type d’écriture a évolué à travers le temps et les différents supports : inscriptions sur des vases de bronze rituels aux alentours du ixe s. ; écriture sigillaire, gravée dans la pierre ou l'ivoire, au milieu du Ier millénaire ; caractères « classiques », peints au pinceau, à partir du iie s. avant J.-C. Ces derniers signes ont traversé deux millénaires ; en 1957, une réforme en a simplifié un certain nombre.

LE FONCTIONNEMENT DE L'ÉCRITURE CHINOISE

Écriture chinoise
Sur le plan fonctionnel, les pictogrammes originels ont évolué vers un système d'écriture où les éléments sont dérivés les uns des autres. Soit le caractère de l'arbre (mu) : on peut en cocher la partie basse pour noter « racine » (ben), ou la partie haute pour « bout, extrémité » (mo) ; on peut aussi lui adjoindre un deuxième arbre pour noter « forêt » (lin), un troisième pour noter « grande forêt », et ultérieurement « nombreux », « sombre » (sen).
Un dérivé peut servir à son tour de base de dérivation. Ainsi, le pictogramme de la « servante », de l'« esclave », figurant une femme et une main droite (symbole du mari et du maître), est associé au signe du cœur, siège des sentiments, pour signifier la « rage », la « fureur », éprouvée par l'esclave.
Cette langue graphique use également d'indicateurs phonétiques. Ainsi, le caractère de la femme, flanqué de l'indicateur « cheval » (mâ), note « la femme qui se prononce comme le cheval » (au ton près), c'est-à-dire la « mère » (m"a) ; si l'on associe « cheval » avec « bouche », on note la particule interrogative (ma) ; avec deux « bouches », le verbe « injurier ».
Inversement, le caractère chinois peut être lu grâce au déterminatif sémantique. Ces déterminatifs, ou clés (au nombre de 540 au iie s. après J.-C., réduits à 214 au xviie s., et portés à 227, avec des modifications diverses, en 1976), sont des concepts destinés à orienter l'esprit du lecteur vers telle ou telle catégorie sémantique. Le même signe signifiera « rivière » s'il est précédé de la clé « eau », et « interroger » s'il est précédé de la clé « parole ».
Le système chinois repose donc sur le découpage de l'énoncé en mots. Il semble que, de l'autre côté du Pacifique, et au xvie s. de notre ère seulement, à la veille de la conquête espagnole, les glyphes précolombiens (que nous déchiffrons très partiellement à ce jour, malgré des progrès dans la lecture des glyphes mayas) présentent des similitudes avec cette écriture. Mais ils ne se sont pas entièrement dégagés de la simple pictographie.

L'AVENTURE DURABLE DE L'ALPHABET
LA NAISSANCE DE L'ALPHABET
L'invention de l'alphabet (dont le nom est forgé par les Grecs sur leurs deux premières lettres alpha et bêta) se situe au IIe millénaire avant notre ère en Phénicie. Deux peuples y jouent un rôle important, les Cananéens et, à partir du xiie s. avant J.-C., les Araméens ; ils parlent chacun une langue sémitique propre et utilisent l'akkadien, écrit en cunéiformes, comme langue véhiculaire. Dans les langues sémitiques, chacun des « mots » est formé d'une racine consonantique qui « porte » le sens, tandis que les voyelles et certaines modifications consonantiques précisent le sens et indiquent la fonction grammaticale. Cette structure n'est sans doute pas étrangère à l'évolution de ces langues vers le principe alphabétique, et plus précisément vers l'alphabet consonantique, à partir du système cunéiforme.

L'ALPHABET OUGARITIQUE
Le premier alphabet dont on ait pu donner une interprétation précise est l'alphabet ougaritique, apparu au moins quatorze siècles avant notre ère. Différent du cunéiforme mésopotamien, qui notait des idées (cunéiformes idéographiques), puis des syllabes (cunéiformes syllabiques), il note des sons isolés, en l'occurrence des consonnes, au nombre de vingt-huit. Il a probablement emprunté la technique des cunéiformes aux Akkadiens, en pratiquant l'acrophonie (phénomène par lequel les idéogrammes d'une écriture ancienne deviennent des signes phonétiques correspondant à l'initiale du nom de l'objet qu'ils désignaient. Ainsi, en sumérien, le caractère cunéiforme signifiant étoile, et qui se lisait ana, finit par devenir le signe de la syllabe an) et en simplifiant certains caractères. La véritable innovation est celle des scribes d'Ougarit : gravés dans l'argile, comme les signes mésopotamiens, les caractères d'apparence cunéiforme sont en fait des lettres, déjà rangées dans l'ordre des futurs alphabets. C'est en cette écriture que les trésors de la littérature religieuse d'Ougarit, c'est-à-dire la littérature religieuse du monde cananéen lui-même, nous sont parvenus.

L'ALPHABET DE BYBLOS
Alors que l'« alphabet » ougaritique demeure réservé à cette cité, l'alphabet sémitique dit « ancien » est l'ancêtre direct de notre alphabet. Sa première manifestation en est, au xie s., le texte gravé sur le sarcophage d'Ahiram, roi de Byblos : 22 signes à valeur uniquement de consonnes. Cet alphabet apparaît donc à Byblos (aujourd'hui Djebaïl, au Liban), lieu d'échanges entre l'Égypte et le monde cananéen. Ce système est utilisé successivement par les Araméens, les Hébreux et les Phéniciens. Commerçants et navigateurs, ces derniers le diffusent au cours de leurs voyages, notamment vers l'Occident, vers Chypre et l'Égée, où les Grecs s'en inspirent pour la création de leur propre alphabet. Car ce sont les Grecs qui, au xie s. avant J.-C., emploient, pour la première fois au monde, un système qui note aussi bien les voyelles que les consonnes, constituant ainsi le premier véritable alphabet.
Pour les deux alphabets d'Ougarit et de Byblos, entre lesquels il ne devrait pas y avoir de continuité globale, il est frappant que l'ordre des lettres soit le même et corresponde à peu près à celui des alphabets ultérieurs. Cet ordre, dont l'origine reste mystérieuse, serait très ancien.

LA FORME ET LE NOM DES LETTRES
Mais quel critère a déterminé le choix de tel graphisme pour noter tel son ? D'où viennent les noms des lettres ? L'hypothèse retenue répond à ces deux questions à la fois : une lettre devait fonctionner à l'origine comme un pictogramme (A figurait une tête de bœuf) ; on a utilisé ce pictogramme pour noter le son initial du nom qui désignait telle chose ou tel être dans la langue (A utilisé pour noter « a », issu par acrophonie d'aleph, nom du bœuf en sémitique) ; enfin, on a donné à la lettre alphabétique nouvelle le nom de la chose que figurait le pictogramme originel (aleph est le nom de la lettre A). C'est sur cette hypothèse que s'est fondé l'égyptologue Alan Henderson Gardiner dans ses travaux sur les inscriptions dites « protosinaïtiques » découvertes dans le Sinaï. Elles sont antérieures au xve s. avant J.-C., présentent quelque signes pictographiques et notent une langue apparentée au cananéen. Les conclusions de Gardiner ne portent que sur quelques « lettres » de ce protoalphabet, mais elles semblent convaincantes et devraient permettre de repousser de cinq à sept siècles la naissance du système alphabétique.

LA CHAÎNE DES PREMIERS ALPHABETS
Des convergences dans la forme, le nom et la valeur phonétique des lettres établissent, entre les alphabets, une parenté incontestable. Pour l'araméen et le grec, celle-ci est collatérale : ils ont pour ancêtre commun le phénicien. De l'alphabet araméen dérivent l'hébraïque (iiie ou iie s. avant J.-C.) et probablement l'arabe (avant le vie s. après J.-C.), avec ses diverses adaptations, qui notent le persan ou l'ourdou, par exemple ; à moins qu'il ne faille distinguer une filière arabique qui aurait une parenté collatérale avec le phénicien. Du grec découle la grande majorité des alphabets actuels : étrusque (ve s. avant J.-C.), italiques puis latin (à partir du ve s. avant J.-C.), copte (iie-iiie s. après J.-C.), gotique (ive s.), arménien (ve s.), glagolitique et cyrillique (ixe s.). La propagation du christianisme joua un rôle majeur dans cette filiation : c'est pour les besoins de leur apostolat que des évangélisateurs, s'inspirant des alphabets grec ou latin dans lesquels ils lisaient les Écritures, constituèrent des alphabets adaptés aux langues des païens.

Quant aux alphabets asiatiques, au nombre d'au moins deux cents, on pense qu'ils remontent tous à l'écriture brahmi. La devanagari, par exemple, a servi à noter le sanskrit et note aujourd'hui le hindi. D’aucuns supposent que l'écriture brahmi aurait été elle-même créée d'après un modèle araméen. Selon cette hypothèse, tous les alphabets du monde proviendraient donc de la même source proche-orientale.

L'ALPHABET AUJOURD’HUI
Avec la grande extension de l'alphabet, la fonction de l'écrit a évolué. À la conservation de la parole, ou, sur une autre échelle, de la mémoire des hommes, s'est ajoutée l'éducation, l'œuvre de culture, souvent synonyme d'« alphabétisation ». Il existe bel et bien une civilisation de l'alphabet, accomplissement de celle de l'écriture, où un autodafé de documents écrits est considéré comme un acte de barbarie. Depuis le siècle dernier, une étape importante s'est amorcée avec la diffusion de l'alphabet latin hors de l'Europe occidentale, surtout pour noter des parlers encore non écrits, en Afrique ou dans l'ex-Union soviétique. En Turquie, par exemple, la réforme de 1928 (utilisation de l’alphabet latin, légèrement enrichi de diacritiques et d’une lettre supplémentaire) a permis de rapprocher le pays de la civilisation occidentale.

LINGUISTIQUE
L'écriture est un code de communication secondaire par rapport au langage articulé. Mais, contrairement à celui-ci, qui se déroule dans le temps, l'écriture possède un support spatial qui lui permet d'être conservée. La forme de l'écriture dépend d'ailleurs de la nature de ce support : elle peut être gravée sur la pierre, les tablettes d'argile ou de cire, peinte ou tracée sur le papyrus, le parchemin ou le papier, imprimée ou enfin affichée.
Selon la nature de ce qui est fixé sur le support, on distingue trois grands types d'écriture, dont l'apparition se succède en gros sur le plan historique, et qui peuvent être considérés comme des progrès successifs dans la mesure où le code utilisé est de plus en plus performant : les écritures synthétiques (dites aussi mythographiques), où le signe est la traduction d'une phrase ou d'un énoncé complet ; les écritures analytiques, où le signe dénote un morphème ; les écritures phonétiques (ou phonématiques), où le signe dénote un phonème ou une suite de phonèmes (syllabe).

LES ÉCRITURES SYNTHÉTIQUES
On peut classer dans les écritures synthétiques toutes sortes de manifestations d'une volonté de communication spatiale. Certains, d'ailleurs, préfèrent parler en ce cas de « pré-écriture », dans la mesure où ces procédés sont une transcription de la pensée et non du langage articulé. Quoi qu'il en soit, le spécialiste de la préhistoire André Leroi-Gourhan note des exemples de telles manifestations dès le moustérien évolué (50 000 ans avant notre ère) sous la forme d'incisions régulièrement espacées sur des os ou des pierres. À ce type de communication appartiennent les représentations symboliques grâce à des objets, dont un exemple classique, rapporté par Hérodote, est le message des Scythes à Darios ; il consistait en cinq flèches d'une part, une souris, une grenouille et un oiseau d'autre part, formes suggérées à l'ennemi pour échapper aux flèches. Ce genre de communication se retrouve un peu partout dans le monde dans les sociétés dites primitives. On peut ainsi signaler les systèmes de notation par nœuds sur des cordelettes (quipus des archives royales des Incas), mais la forme la plus courante d'écriture synthétique est la pictographie, c'est-à-dire l'utilisation de dessins figuratifs (pictogrammes), dont chacun équivaut à une phrase (« je pars en canot », « j'ai tué un animal », « je rentre chez moi », etc.) : c'est le système utilisé par les Inuits d'Alaska, les Iroquois et les Algonquins (wampums) ou encore par les Dakotas. Les limites de ces modes d'expression apparaissent évidentes : ils ne couvrent que des secteurs limités de l'expérience, ils ne constituent pas, comme le langage, une combinatoire.

LES ÉCRITURES ANALYTIQUES
Dans les écritures analytiques (dites aussi, paradoxalement, « idéographiques »), le signe ne représente pas une idée mais un élément linguistique (mot ou morphème), ce n'est plus une simple suggestion, c'est une notation. En réalité, le manque d'économie de ce système (il y aurait un signe pour chaque signifié) fait qu'il n'existe pas à l'état pur : toutes les écritures dites idéographiques comportent, à côté des signes-choses (idéogrammes), une quantité importante de signes à valeur phonétique, qu'il s'agisse des cunéiformes suméro-akkadiens, des hiéroglyphes égyptiens ou de l'écriture chinoise. Par exemple, en chinois, on peut distinguer, en gros, cinq types d'idéogrammes : les caractères représentant des objets, et qui sont, à l'origine, d'anciens pictogrammes (le soleil, la lune, un cheval, un arbre, etc.) ; les caractères évoquant des notions abstraites (monter, descendre, haut, bas) ; les caractères qui sont des agrégats logiques, formés par le procédé du rébus, en associant deux signes déjà signifiants (une femme sous un toit pourra dénoter la paix) ; les caractères utilisés pour noter des homophones : tel caractère désignant à l'origine un objet donné sera utilisé pour noter un mot de même prononciation mais de sens complètement différent ; les caractères qui sont des composés phonétiques, constitués, à gauche, d'un élément qui indique la catégorie sémantique (clef) et, à droite, d'un élément indiquant la prononciation (ce dernier type de caractère constitue jusqu'à 90 % des entrées d'un dictionnaire chinois). Cependant, l'écriture chinoise, malgré ses recours au phonétisme, n'est pas liée à la prononciation : elle peut être lue par les locuteurs des différents dialectes chinois, entre lesquels il n'y a pas d'intercompréhension orale ; elle sert, d'autre part, à noter des langues complètement différentes comme le lolo, l’ancien coréen (qui a depuis créé son propre alphabet, le hangul) ou le japonais, où les idéogrammes chinois coexistent avec une notation syllabique.

LES ÉCRITURES PHONÉTIQUES
Les écritures dites « phonétiques » témoignent d'une prise de conscience plus poussée de la nature de la langue parlée : les signes y ont perdu tout contenu sémantique (même si, à l'origine, les lettres sont d'anciens idéogrammes), ils ne sont plus que la représentation d'un son ou d'un groupe de sons. Trois cas peuvent se présenter, selon que le système note les syllabes, les consonnes seules ou les voyelles et les consonnes. Les syllabaires ne constituent pas toujours historiquement un stade antérieur à celui des alphabets. S'il est vrai que les plus anciens syllabaires connus (en particulier le cypriote) précèdent l'invention de l'alphabet (consonantique) par les Phéniciens, d'autres sont, au contraire, des adaptations d'alphabets : c'est le cas de la brahmi, ancêtre de toutes les écritures indiennes actuelles, qui procède de l'alphabet araméen, ou du syllabaire éthiopien, qui a subi des influences sémitiques et grecques.
Quant à la naissance de l'alphabet grec, elle a été marquée, semble-t-il, aussi bien par le modèle phénicien que par celui des syllabaires cypriote et crétois (linéaires A et B). Les systèmes syllabiques se caractérisent par leur côté relativement peu économique, puisqu'il faut, en principe, autant de signes qu'il y a de possibilités de combinaison voyelle-consonne. D'autre part, ils présentent l'inconvénient de ne pouvoir noter simplement que les syllabes ouvertes (C+V) ; en cas de syllabe fermée (C+V+C) ou de groupement consonantique (C+C+V), l'un des signes contiendra un élément vocalique absent de la prononciation.

       
Les alphabets consonantiques, dont le phénicien est historiquement le premier exemple, ne conviennent bien qu'à des langues ayant la structure particulière des langues sémitiques : la racine des mots y possède une structure consonantique qui est porteuse de leur sens, la vocalisation pouvant être devinée par l'ordre très rigoureux des mots dans la phrase, qui indique leur catégorie grammaticale et, par là même, leur fonction. L'alphabet araméen a servi de modèle à toute une série d'alphabets (arabe, hébreu, syriaque, etc.), ainsi qu'à des syllabaires (brahmi) ; l'alphabet arabe a servi et sert à noter des langues non sémitiques, non sans quelques difficultés (il a ainsi été abandonné pour le turc).

Alphabet grec
       
L'alphabet grec est historiquement le premier exemple d'une écriture notant à la fois et séparément les consonnes et les voyelles. Il a servi de modèle à toutes les écritures du même type qui existent actuellement : alphabets latin, cyrillique, arménien, géorgien, etc.

PÉDAGOGIE
L'apprentissage de l'écriture fait appel à une maîtrise de la fonction symbolique ainsi qu'à une maîtrise motrice de l'espace et du temps. Il s'effectue soit par l'étude progressive et linéaire des lettres, servant à former les mots (méthode analytique), soit par la compréhension directe des mots dans le contexte de la phrase, dont on décomposera seulement après les lettres (méthode globale d’Ovide Decroly). Mais ce sont de plus en plus des méthodes mixtes qui sont utilisées, intégrant parfois expression corporelle et exercices de motricité.

 

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OTAN

 

 

 

 

 

 

 

OTAN (Organisation du traité de l'Atlantique Nord) ou NATO (North Atlantic Treaty Organization) ou pacte de l'Atlantique Nord

Alliance militaire signée à Washington, le 4 avril 1949.

1. L'ALLIANCE ATLANTIQUE

L'Organisation du traité de l'Atlantique Nord est née de la guerre froide. Au lendemain de la défaite de l'Allemagne, le monde se partage en deux blocs, opposant les États-Unis et l'URSS, ainsi que leurs alliés respectifs. L'Alliance atlantique est alors destinée à contrer la puissance soviétique.
Aujourd'hui, l'OTAN comprend 29 membres : depuis l'origine, la Belgique, le Canada, le Danemark, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l'Islande, l'Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal ; depuis 1952, la Grèce et la Turquie ; depuis 1955, la République fédérale d'Allemagne ; depuis 1982, l'Espagne ; depuis mars 1999, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque. La Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie rejoignent l'Alliance en 2004, l’Albanie et la Croatie en 2009 et le Monténégro en 2017. Tous ces pays en font partie afin de « sauvegarder la paix et la sécurité, et de développer la stabilité et le bien-être dans la région de l'Atlantique nord ». Après la chute du mur de Berlin, en 1989, l'Alliance a redéfini son rôle. À Rome, en 1991, puis lors du Conseil de l'Atlantique Nord à Washington, en 1999, elle a adopté un nouveau concept stratégique.
L'OTAN s'est ouvert et pourrait s'ouvrir à de nouveaux États (Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Macédoine du Nord), développer des partenariats avec la Russie et l'Ukraine, élargir le dialogue avec les pays de la Méditerranée. Une conception élargie de la sécurité peut conduire l'Organisation à mener des opérations de maintien de paix hors de sa zone de compétence. La condition en est alors une réforme de ses structures militaires.

2. GENÈSE ET FINALITÉ DE L'ALLIANCE ATLANTIQUE

2.1. LA FORMATION DU PACTE DE L'ATLANTIQUE NORD

L'origine du Pacte est multiple. Elle se trouve, tout d'abord, dans la déclaration du président américain Harry Truman, datant du 12 mars 1947. La « doctrine Truman », motivée, entre autres, par l'essor de mouvements de guérilla nationalistes soutenus par les Soviétiques ou à direction communiste (Kurdistan, Chine, Grèce, Viêt Nam), remet en question la tradition isolationniste des États-Unis en temps de paix, en militant en faveur d'une solidarité militaire au sein du monde occidental.
L'OTAN doit aussi sa création au désir des Européens de se lier aux États-Unis par un pacte durable de défense. Soucieux de la menace soviétique (création du Kominform, grèves communistes en Italie et en France en 1947-1948, et surtout « coup de Prague » de février 1948, puis blocus de Berlin en juin), la Grande-Bretagne, la France, les Pays-Bas et le Luxembourg, déjà liés par le traité de Bruxelles (17 mars 1948), décident d'élargir leur pacte d'alliance à d'autres pays de l'Europe occidentale et aux deux grands États industriels d'Amérique du Nord. Le traité de l'Atlantique Nord est signé le 4 avril 1949 par les douze pays fondateurs et entre en vigueur le 24 août suivant.
La zone couverte par le traité, s'étendant aux territoires métropolitains des États membres mais non à leurs possessions d'outre-mer, est décrite dans l'article 6 : l'Alliance intervient en cas d'« attaque contre le territoire de l'une des parties en Europe ou en Amérique du Nord, contre les départements français d'Algérie (mention supprimée en 1963, après l'accession du pays à l'indépendance), contre les îles placées sous la juridiction de l'une des parties dans la région de l'Atlantique nord, au nord du tropique du Cancer, ou contre les navires ou aéronefs de l'une des parties dans la même région. »
Le traité peut être révisé au bout de dix ans à la demande de l'une des parties et par voie de consultation (article 12). Il peut être dénoncé par toute partie au bout de vingt ans, mais sa durée est illimitée, comme le préciseront les Alliés dans les accords de 1954. Enfin, d'autres pays peuvent être admis dans l'Alliance, aux conditions fixées par l'article 10, qui précise : « Les parties peuvent, par accord unanime, inviter à accéder au traité tout autre État européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent traité et de contribuer à la sécurité de la région de l'Atlantique nord. » La zone sera progressivement élargie à la Grèce et à la Turquie, à l'Allemagne, à l'Espagne, et finira par s'étendre aux pays de l'Europe de l'Est avec l'adhésion, en 1999, de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque.

2.2. LES OBJECTIFS DU PACTE
L'esprit et les buts du traité sont exposés dans le Préambule et dans les trois premiers articles. Le Pacte a pour objet d'assurer collectivement la sécurité des États signataires. La référence à la charte de l'Atlantique de 1941 et à la charte des Nations unies de 1944 est constante. Comme elles, le texte du traité mentionne les grands principes sur lesquels doit reposer l'ordre international : la liberté des peuples, le règne du droit, la justice, la coopération économique et le refus de l'emploi de la force pour résoudre les conflits, sauf en cas de légitime défense.
En temps de paix, la sécurité collective des États membres est assurée par l'assistance mutuelle et la coopération économique. Il est dit, dans l'article 3, que chaque pays signataire devra accroître sa capacité de « résistance à une attaque armée ». Et, selon l'article 5, toute agression armée contre un des membres est considérée « comme une attaque dirigée contre toutes les parties. […] Chacune d'elles, dans l'exercice du droit de légitime défense […], assistera la partie ou les parties ainsi attaquées ». Chaque État membre conserve cependant le choix des moyens. Pour la première fois de son histoire, l'OTAN a mis en œuvre la disposition de l'article 5, le 12 septembre 2001, après les attentats qui ont frappé les États-Unis. (→ événements du 11 septembre 2001.)

2.3. LES ÉVOLUTIONS DOCTRINALES
Dès sa création, en 1949, l'OTAN est une organisation purement défensive et dissuasive, et, dans l'hypothèse où une agression est commise sur le territoire des pays membres, ceux-ci bénéficient, le cas échéant, du « parapluie nucléaire » américain. Mais la fabrication, par l'URSS, de missiles balistiques à capacité intercontinentale l'amène, en 1967, à adopter la doctrine de « riposte graduée », qui fixe les conditions nouvelles de l'engagement des forces armées de l'Alliance.
En cas d'échec de la dissuasion, cette riposte doit se faire en trois paliers : l'engagement des forces conventionnelles ; l'emploi des armes nucléaires tactiques en soutien des armes conventionnelles ; et, par voie de conséquence, la mise en œuvre des forces nucléaires stratégiques des deux adversaires – les représailles étant alignées sur le niveau d'agression de l'adversaire. Cette évolution doctrinale conduit la France, en 1966, à se retirer du commandement intégré de l'Alliance, puis à exiger le retrait des forces stationnées sur son territoire et à récupérer la souveraineté complète de son espace aérien. Toutefois, un certain nombre de liens sont préservés, grâce à des accords d'état-major.
Une seconde évolution se fait jour avec la crise des euromissiles : au déploiement, à partir de 1977, des missiles SS 20 soviétiques, l'OTAN réplique, en 1979, par la « double décision », qui envisage ou le retrait des SS 20 ou, en cas de maintien de leur présence, le déploiement des missiles américains Pershing 2 sur le territoire des alliés européens (Allemagne, Italie, Grande-Bretagne principalement). Cette seconde option est effectivement appliquée en 1983, dans un climat d'intense agitation pacifiste, hostile à l'action de l'Alliance.

3. LE FONCTIONNEMENT DE L'OTAN
Pour que la politique de sécurité de l'Alliance soit définie et appliquée avec le concours des États membres, indépendants et souverains, chacun des gouvernements doit être parfaitement informé des choix et des orientations de ses partenaires et des motivations qui les inspirent. L'OTAN n'est pas une organisation supranationale ; il s'agit d'une alliance internationale à vocation défensive. Fin 1949, l'Europe et le monde paraissent de plus en plus nettement s'organiser autour de deux pôles de puissance : les États-Unis, qui, poussés par les circonstances, sont amenés à exercer leur leadership sur le « monde libre », et assument les responsabilités majeures au sein de l'Alliance atlantique ; l'URSS, qui, en attendant la mise en place du pacte de Varsovie en 1955, a signé des traités militaires avec ses satellites et s'efforce, depuis janvier 1949, de les intégrer économiquement à l'espace soviétique par le biais du Comecon, réplique à la création de l'OECE (Organisation européenne de coopération économique). Ce sont désormais deux « blocs » relativement homogènes qui vont s'affronter dans les batailles de la guerre froide.
En mai 1956, toutefois, le Conseil de l'Atlantique crée un comité chargé de rechercher les moyens de développer la coopération entre les pays de l'OTAN dans les domaines non militaires. Le 13 décembre est présenté le rapport dit « des trois sages ». Qualifié aussi de « charte morale », ce rapport affirme que l'existence de relations étroites au niveau politique et économique entre les membres de l'Alliance est la condition sine qua non à la réalisation effective de la mission de dissuasion de l'OTAN. Ainsi, la procédure de consultation n'est pas limitée aux seules questions militaires. Le comité politique, les groupes d'experts ad hoc, le groupe consultatif sur la politique atlantique sont autant d'organes qui contribuent au développement de la consultation politique entre les gouvernements des États membres de l'OTAN. Enfin, la déclaration d'Ottawa de 1974 – sur les relations atlantiques – réaffirme la volonté des Alliés de « maintenir entre eux une étroite consultation et un esprit de coopération et de confiance mutuelle » (paragraphe 11).

4. LES STRUCTURES DE L'OTAN
Ce qui distingue fondamentalement ce traité des alliances de type traditionnel qui l'ont précédé, ce sont les organes permanents qui se sont développés pour en assurer l'exécution et qui constituent l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, instituée par la convention d'Ottawa du 20 septembre 1951.

4.1. LES STRUCTURES CIVILES DE L'ALLIANCE
LE CONSEIL DE L'ATLANTIQUE NORD
Le Conseil de l'Atlantique Nord, organe politique le plus élevé de l'OTAN, présidé par le secrétaire général, est la seule structure définie par le traité de l'Atlantique Nord. En son sein, les États membres ont les mêmes droits, quels que soient leur poids économique ou leur importance militaire, et les décisions sont prises à l'unanimité – ce qui implique un droit de veto pour chacun. Les gouvernements des États membres peuvent y conduire des consultations sur toutes les questions touchant à leur sécurité. C'est l'organe décisionnel suprême.

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L'OTAN
Le secrétaire général de l'OTAN est nommé par le Conseil de l'Atlantique Nord par consensus, au terme de consultations. Sa fonction est à la fois civile et militaire. Chargé de promouvoir et de diriger le processus de consultation et de prise de décision au sein de l'OTAN, il se doit de donner des impulsions et des conseils fondés sur ses contacts avec les membres de l'Alliance et les responsables d'autres États.
LE COMITÉ DES PLANS DE DÉFENSE (CPD)
Le Comité des plans de défense (CPD) est chargé de donner des orientations aux autorités militaires de l'OTAN. Il a été institué après la décision prise par la France, en 1966, de ne plus laisser participer son ministère de la Défense au Conseil de l'Atlantique Nord et de se faire représenter au sein de ce dernier par son seul ministère des Affaires étrangères.

LE GROUPE DES PLANS NUCLÉAIRES (GPN)
Le Groupe des plans nucléaires (GPN), composé des représentants de tous les États membres, à l'exception de la France, est la principale enceinte de consultation pour toutes les questions relatives au rôle des forces nucléaires dans le cadre des politiques de sécurité et de défense mises en place par l'OTAN. Depuis 1992, cet organisme a cessé de travailler activement, l'OTAN n'ayant plus aujourd'hui d'« adversaire global ». Toutefois, les États-Unis et la Grande-Bretagne, qui sont, avec la France, les seuls pays membres de l'OTAN à posséder des armements nucléaires, continuent de se concerter au sein du GPN.

4.2. LES STRUCTURES MILITAIRES FONCTIONNELLES
Le Comité militaire, créé en octobre 1949, est l'instance militaire suprême de l'OTAN. Placé sous l'autorité politique du Conseil de l'Atlantique Nord, du CPD et du GPN, il donne des orientations au haut commandement de l'OTAN. En temps de paix, il est chargé de préparer les mesures et les plans jugés nécessaires à la défense commune de la zone de l'OTAN en Europe. Le Comité dispose d'un état-major militaire international (EMI), qui veille à ce que ses décisions et directives soient appliquées ; c'est l'organe exécutif du Comité militaire, dont la France, qui l'avait quitté en 1966, se rapproche depuis 1995. Ainsi, la mission militaire de la France participe à tous les travaux, sauf à ceux qui sont relatifs à la planification nucléaire.

4.3. LES COMMANDEMENTS OPÉRATIONNELS

LE COMMANDEMENT SUPRÊME ALLIÉ EN EUROPE (SACEUR)

Au niveau stratégique, le nombre des commandements suprêmes a été ramené (par dissolution, en 1992, du Commandement suprême allié de la Manche, ou CINCHAN) de trois à deux. Le Commandement suprême allié en Europe (SACEUR), basé à Mons, en Belgique, a pour mission fondamentale de contribuer au maintien de la paix, de la sécurité et de l'intégrité territoriale des États membres de l'Organisation. Il couvre les zones terrestres allant du cap Nord à l'Afrique du Nord et de l'Atlantique à la frontière orientale de la Turquie, à l'exception du Portugal et du Royaume-Uni. En cas de conflit armé, le SACEUR a vocation à prendre la direction de toutes les opérations terrestres, navales et aériennes dans cette zone qui couvre près de 2 millions de kilomètres carrés. De lui dépendent trois commandements régionaux : pour le Nord-Ouest (à High Wycombe, en Grande-Bretagne), pour le Centre-Europe (à Brunssum, aux Pays-Bas) et pour le Sud (à Naples).

LE COMMANDEMENT SUPRÊME ALLIÉ DE L'ATLANTIQUE (SACLANT)
Basé à Norfolk, aux États-Unis, le SACLANT étend sa compétence de l'Arctique au tropique du Cancer et des eaux territoriales de l'Amérique du Nord aux côtes d'Europe et d'Afrique, y compris le Portugal, mais à l'exclusion de la Manche et des îles Britanniques. Il a pour fonction, en temps de paix, de préparer des plans de défense, ainsi que de diriger des exercices d'entraînement intégrés et combinés. En temps de guerre, sa mission fondamentale est de prendre en charge la sécurité de tout l'océan Atlantique, en assurant la protection de ses voies maritimes.

5. LA POSITION DE LA FRANCE
En 1966, la France s'est retirée du commandement militaire intégré de l'OTAN, car la politique française reposait – depuis le retour au pouvoir du général de Gaulle – sur la constitution d'une force de dissuasion nationale. Cela répondait à un double objectif : reconquérir l'indépendance nationale, tant militaire que politique, et ne pas se laisser entraîner par les États-Unis dans un conflit qui ne concernait pas la France. La doctrine française de la dissuasion proportionnelle s'opposait, à l'époque, à la doctrine de la « riposte massive ». Or, bien qu'en 1967 l'OTAN eût adopté la doctrine de la « riposte graduée », en élevant le seuil de recours au nucléaire, la position de la France resta inchangée.
Après trois décennies d'ostracisme, la France a admis que la défense européenne ne pouvait se concevoir comme concurrente de l'Alliance atlantique. Sans que les forces armées du pays soient en permanence intégrées dans l'OTAN, les représentants de la France ont fait leur retour au sein du Conseil des ministres de la Défense et au Comité militaire à partir de 1994, quand on commença à envisager l'emploi des troupes françaises déployées en Bosnie dans le cadre de l'OTAN. En 1996, le chef d'état-major des armées françaises, le général Jean-Philippe Douin, a affirmé que la France était prête à adhérer à une nouvelle structure militaire de l'Alliance atlantique. Mais, l'année suivante, le refus américain d'attribuer à un Européen le commandement régional pour le sud de l'Europe (Naples) a mis un terme à cette démarche.

6. UN NOUVEAU CONCEPT STRATÉGIQUE
La fin de la guerre froide, synonyme de disparition de la menace soviétique et de démocratisation des pays de l'Europe de l'Est, a également obligé l'OTAN à s'interroger sur ses raisons d'être, tant la chute du mur de Berlin semblait dicter l'effacement d'une structure politico-militaire née pour répondre aux tensions Est-Ouest. Désireuse de justifier sa survie, l'OTAN a vu sa tâche facilitée par les enseignements tirés de la guerre du Golfe de 1990-1991 et du conflit dans l'ex-Yougoslavie, qui, tout autant que la nouvelle donne stratégique, ont imposé une révision de sa doctrine stratégique et une restructuration de ses forces.

6.1. L'OUVERTURE AUX PAYS DE L'EUROPE DE L'EST
Au lendemain de la guerre froide, l'OTAN a été contrainte de modifier ses structures pour être en mesure de faire face aux exigences de la nouvelle situation en Europe. L'Organisation a manifesté la volonté de se rénover en lançant un processus de coopération avec les États membres de l'ex-pacte de Varsovie, qui estiment vivre dans « un vide stratégique ». Les nouvelles missions ayant, a priori, pour terrain d'application privilégié l'Europe centrale et orientale, l'intégration des pays qui en font partie apparaît comme le corollaire logique de la volonté d'assurer la stabilité de cette partie de l'Europe. Pour répondre au désir d'adhésion que ceux-ci ont formulé, deux organismes ont été créés.

LE CONSEIL DE PARTENARIAT EURO-ATLANTIQUE (CPEA)
Il a remplacé, en 1997, le Conseil de coopération nord-atlantique (COCONA), créé en novembre 1991, à l'instigation du président américain George Herbert Walker Bush, pour être un forum réunissant les représentants de l'Alliance atlantique et ceux des États de l'ex-pacte de Varsovie. Le CPEA offre le cadre général dans lequel ont lieu les consultations touchant aux questions politiques et à la sécurité, en vue d'un renforcement de la coopération entre les États européens, y compris les républiques de l'ex-URSS (soit, au total, 50 États).

LE PARTENARIAT POUR LA PAIX (PPP)
Le Partenariat pour la paix (PPP) a été créé et proposé aux pays de l'ancienne Europe communiste dès 1994. Il se compose alors de 24 membres. En adhérant à ce Partenariat, les anciens pays communistes s'engagent à respecter et à défendre les principes du droit international, de même qu'à s'acquitter des obligations posées par la charte de l'ONU et à se conformer aux principes proclamés par la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948. Les partenaires doivent également réaffirmer qu'ils sont résolus à tenir les engagements pris en application de l'Acte final d'Helsinki ainsi que de la totalité des documents ultérieurs de la CSCE (Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe), devenue l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe).
En contrepartie, ils doivent être associés à des exercices militaires de l'OTAN, tels que des manœuvres communes et des échanges de personnels militaires ; dans certaines circonstances, ils doivent aussi être associés à des opérations de maintien de la paix. Enfin, ils ont la possibilité de recourir à l'article 4 du traité de l'Atlantique Nord, et peuvent donc demander des « consultations » aux pays membres de l'OTAN, s'il advient que leur intégrité territoriale, leur indépendance politique ou leur sécurité sont menacées. En revanche, ils ne peuvent pas bénéficier des dispositions de l'article 5.
Le PPP est un élément clé de l'instauration de nouvelles relations de sécurité entre l'Alliance et ses partenaires. Il est devenu une composante permanente de la sécurité européenne et a vocation à poursuivre sa fonction d'antichambre de l'OTAN. De fait, l'admission de pays d'Europe centrale et orientale en tant que membres à part entière a été l'une des questions fondamentales du sommet de Madrid, en juillet 1997. Le 12 mars 1999, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque ont été les premiers d'entre eux à quitter le PPP pour faire leur entrée dans l'Alliance. En novembre 2002, la Bulgarie, l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie sont invitées à rejoindre l'Alliance en mai 2004. En avril 2009, la Croatie et l’Albanie rejoignent à leur tour l’OTAN, composée désormais de 28 États membres. L’ex-République yougoslave de Macédoine (devenue en 2019 la République de Macédoine du Nord) et le Monténégro participent, depuis 1999 et 2009 respectivement, au « plan d’action pour l’adhésion », et la coopération avec la Bosnie-Herzégovine progresse également. En juin 2017, le Monténégro devient le 29e État membre de l’organisation.

LE CONSEIL OTAN-RUSSIE
Depuis la fin de la guerre froide, l'OTAN a également tenu à amorcer le dialogue avec la Russie, l'Ukraine et certains pays d'Afrique du Nord et du Proche-Orient. Ainsi, le 27 mai 1997, à Paris, les membres de l'Alliance atlantique et la Fédération de Russie ont signé l'Acte fondateur instituant les relations de coopération et de sécurité mutuelles entre eux et crée un Conseil permanent conjoint, transformé en Conseil OTAN-Russie le 28 mai 2002.
La « charte sur un partenariat spécifique entre l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord et l'Ukraine » a été paraphée à Sintra, au Portugal, le 29 mai 1997. Depuis, cette coopération s’est approfondie et s’est intensifiée en réaction à l’annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014 et des menaces pesant sur l’intégrité territoriale de l’Ukraine, avec le conflit entre les forces sécessionnistes soutenues par Moscou et l’armée ukrainienne dans l’est du pays. La coopération militaire et civile avec Moscou est alors suspendue.
De même, l’OTAN apporte son soutien aux aspirations euro-atlantiques de la Géorgie, exprimées dès 2002, notamment depuis l’affrontement armé entre cette dernière et la Russie, en août 2008, et la reconnaissance par Moscou de l’indépendance des régions géorgiennes d’Ossétie du Sud et d’Abkhazie.

L'OTAN ET LE PROCHE-ORIENT
Par ailleurs, à Bruxelles, le 8 février 1995 et lors de la réunion interministérielle tenue à Sintra le 29 mai 1997, le Conseil de l'Atlantique Nord a décidé d'entamer un dialogue direct avec l'Égypte, Israël, la Jordanie, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie afin que ces pays apportent « leur contribution à la paix et à la sécurité dans la région ». Ce « dialogue méditerranéen », auquel s’est jointe l’Algérie en 2000, a été réaffirmé et précisé lors des sommets d’Istanbul en juin 2004 et de Berlin en avril 2011.

6.2. UNE CONCEPTION ÉLARGIE DE LA SÉCURITÉ
La multiplication des conflits qui ont fait suite à la guerre froide dans l'ex-Yougoslavie et dans l'ex-URSS a montré que la disparition de la menace globale que représentait pour l'Europe occidentale l'Union soviétique ne signifiait pas la fin de l'insécurité. Dans la perspective de ces nouveaux défis, et dans le cadre de « la conception élargie de la sécurité », formulée à Rome en novembre 1991, l'OTAN a cherché à redéfinir ses missions, afin de conserver le rôle majeur dans la gestion des crises à venir.
Le document établi à Rome énonce les principes qui déterminent le rôle futur de l'OTAN dans le système de sécurité de la nouvelle Europe. Le dialogue, la coopération ainsi que le maintien d'un potentiel de défense collectif sont les éléments clés de la nouvelle stratégie de l'Alliance, éléments qui doivent permettre de résoudre de manière pacifique les crises affectant la sécurité européenne. Ce nouveau concept autorise des interventions de l'Alliance au-delà des frontières des pays membres (il s'agit du « hors zone »). Il est affirmé que « le rôle fondamental des forces nucléaires des Alliés est politique : préserver la paix et prévenir la coercition et toute forme de guerre ». Lors du sommet de Bruxelles de janvier 1994, les chefs d'État et de gouvernement des pays alliés ont reconnu la menace que constitue la prolifération des armes de destruction massive pour la sécurité internationale. Les forces nucléaires sont devenues « l'arme du dernier recours ».
L'OTAN a aujourd'hui abandonné la stratégie de l'« avant » et a adopté un dispositif de joint precision interdiction ; ses forces doivent être capables d'opérer des frappes au-delà de l'Europe orientale, et jusque dans la profondeur du dispositif ennemi. En 1991, les huit corps d'armée nationaux ont été remplacés par cinq corps d'armée multinationaux. Une force de réaction rapide de 70 000 hommes, rassemblant des divisions multinationales, est en mesure d'intervenir à tout moment sur le territoire européen de l'Alliance.
De nouvelles structures de commandement sont également conçues avec la mise en œuvre de QG multinationaux et interarmées, et celle de Groupes de forces interarmées multinationales (GFIM). Ces forces doivent être interopérables et disposer de doctrines ainsi que de technologies adaptées.
Enfin, l'OTAN adopte une approche globale de la sécurité, considérant que les intérêts de l'Alliance peuvent être mis en cause par des actes relevant du terrorisme, du sabotage et du crime organisé, aussi bien que par la rupture des approvisionnements en ressources vitales.

7. LE RÔLE DE L'OTAN DANS LE MAINTIEN DE LA PAIX
L'OTAN n'a jamais eu à intervenir militairement au moment des plus vives tensions entre les blocs américain et soviétique. Paradoxalement, c'est au moment où l'Alliance voit disparaître son objectif initial – faire face à la menace soviétique – que des missions nouvelles s'ouvrent à elle. Elle doit désormais s'acquitter de tâches de maintien de la paix et gérer les crises en coopération avec des pays qui n'en sont pas membres, ainsi qu'avec d'autres organisations internationales.
Pour sa première intervention à l'étranger depuis la fin de la guerre froide, l'OTAN a participé, en 1994, à la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine. C'est à la demande de l'ONU que les appareils de l'Alliance atlantique sont intervenus contre l'aviation serbe qui survolait l'espace aérien bosniaque. Le Conseil de sécurité de l'ONU a donné, le 15 décembre 1995, autorité à l'OTAN pour faire appliquer, si nécessaire en recourant à la force, les dispositions militaires de l'accord de paix sur la Bosnie-Herzégovine, signé à Paris le 14 décembre 1995. Aux termes de cet accord, l'OTAN a pris le relais de la force de protection de l'ONU (la FORPRONU) qui avait été déployée, en mars 1992, dans l'ex-Yougoslavie pour accomplir une mission de maintien de la paix, de séparation des forces en présence et d'assistance humanitaire. La force multinationale de mise en application de la paix (IFOR) a achevé sa mission en décembre 1996 et a été remplacée par une force de stabilisation de la paix (SFOR), plus réduite, et qui s'emploie à faire exécuter l'accord de paix dans son intégralité.
Cette première opération militaire d'envergure de l'OTAN a été réalisée selon des modalités qui n'avaient pas été imaginées lors de sa fondation. Pour la première fois depuis 1949, l'OTAN est sortie de sa zone traditionnelle d'intervention telle qu'elle avait été définie à l'origine. Enfin, il s'agit également de la première opération de l'OTAN avec des pays non membres de l'Organisation : la Russie, le Danemark, la Norvège, la Suède, la Finlande, la Pologne, la Lituanie, l'Estonie, la Lettonie et la Turquie, qui tous ont participé à l'opération « Effort concerté ».
Depuis, l'OTAN s'est engagée au Kosovo (1999), en Macédoine (2001), dans le cadre de la mission « Moissons essentielles » (récupération des armes des militaires de l'UCK [Armée de libération du Kosovo]) et en Afghanistan où, intervenant pour la première fois hors de la zone « euro-atlantique », elle assure, en 2003-2014, le commandement de la Force internationale d'assistance et de sécurité (FIAS), déployée autour de Kaboul. Depuis janvier 2015, la nouvelle mission non combattante (« soutien résolu »), visant à prodiguer formation, conseil et assistance aux forces de sécurité et aux institutions afghanes, en a pris la relève.
Le sommet de Prague du 21 novembre 2002 a tiré, en effet, les enseignements des attentats du 11 septembre 2001 pour mieux prendre en compte la menace terroriste.

8. L'OTAN ET LA DÉFENSE EUROPÉENNE
Au-delà de la nature de ses missions et de l'étendue de la zone géographique qu'elle couvre, c'est surtout la structure de l'OTAN que la fin de la guerre froide a mise en cause, dans la mesure même où la disparition de la menace globale que représentait le bloc soviétique a libéré de facto l'Europe de sa dépendance à l'égard de Washington. Cela explique que la fin des années 1990 ait été marquée par une course de vitesse entre les partisans d'un renforcement de l'Identité européenne de sécurité et de défense (IESD) au sein de l'OTAN – le retour de la France jouant alors le rôle de moteur – et ceux qui visaient à l'« otanisation » de l'Union de l'Europe occidentale (UEO), considérée par le traité de Maastricht lui-même comme le « bras armé » de l'Union européenne. Or, celle-ci, en se dotant des instruments propres à la mise en place de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD), a ôté sa finalité à l'UEO, qui a mis fin à son existence en novembre 2000.
Désormais, l'OTAN soutient pleinement le développement de l'Identité européenne de sécurité et de défense. Les Américains ne la conçoivent plus comme une concurrente, mais comme le moyen de renforcer le lien transatlantique sur une base plus équilibrée. Le Conseil européen de Feira (juin 2000) a décidé de mettre en place des relations spécifiques entre l'OTAN et l'Union européenne sous la forme de groupes chargés d'étudier les capacités militaires, les questions de sécurité, les modalités de transfert des moyens de l'OTAN à l'UE et les arrangements permanents entre les deux organisations. Ces derniers ont été précisés lors du Conseil européen de Göteborg (juin 2001).
         
QUELQUES DÉFINITIONS


euromissiles
Systèmes balistiques nucléaires intermédiaires (missiles SS 20 et Pershing 2, missiles de croisière), ayant une portée comprise entre 1 000 et 5 500 km. Ils furent déployés en Europe par les Soviétiques et les Américains, entre 1977 et décembre 1987, date à laquelle fut signé le traité sur les Forces nucléaires intermédiaires (F.N.I.), officialisant le début de leur démantèlement, avant leur complète destruction.
O.S.C.E. (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe)
Nouveau nom donné à la C.S.C.E. (Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe), en janvier 1995. Elle regroupe tous les États de Vancouver à Vladivostok, afin de renforcer la sécurité commune et la prévention des conflits.
G.F.I.M. (Groupe de forces interarmées multinationales)
Il se caractérise par ses structures d'état-major, sa logistique, ses unités militaires et ses capacités de renseignement.

 

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DROITS DE L'HOMME

 

 

 

 

 

 

 

droits de l'homme


LE CONCEPT DE « DROITS NATURELS »

Les droits de l'homme, et les libertés dont ils s'accompagnent, sont ceux dont tout individu doit jouir du fait même de sa nature humaine. C'est la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui marque l'avènement théorique d'un État de droit dotant l'individu du pouvoir de résistance à l'arbitraire et lui reconnaissant des droits naturels, dits fondamentaux. La notion de « déclaration des droits » découle de deux idées : celle de l'existence de droits individuels et celle de la nécessaire affirmation de ces droits par une autorité légitime, en l'occurrence le pouvoir constituant en 1789, c'est-à-dire l'État. Matrice de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par les Nations unies en 1948, le texte de 1789 est l'aboutissement d'une réflexion qui a commencé avec la Grande Charte d'Angleterre de 1215 et qui passe par l'institution de l'habeas corpus en 1679.
→ charte.
Il appartient à l'État de droit de respecter les libertés fondamentales de l'individu, que le concept de « libertés publiques » traduit en termes constitutionnels. La persistance de nombreux cas de violations des droits de l'homme dans l'histoire contemporaine impose de garantir leur protection à l'échelon international. Non seulement celle-ci suppose l'existence de mécanismes juridiques autorisant des organes internationaux à exercer un contrôle sur l'application des normes relatives aux droits de l'homme, mais encore l'action d'organisations indépendantes des États, qui se révèlent aussi de la première importance.

TROIS SIÈCLES D'HISTOIRE DES DROITS DE L'HOMME
Ce sont les philosophes du xviiie s., parmi lesquels Jean-Jacques Rousseau, qui élaborent le concept de « droits naturels », droits propres aux êtres humains et inaliénables, quels que soient leur pays, leur race, leur religion ou leur moralité. La révolution américaine de 1776, puis la révolution française de 1789 marquent la reconnaissance et la formulation explicite de ces droits.
Dès 1689, en Angleterre, a été proclamé le Bill of Rights. Les colons établis en Amérique en retournent les principes contre leur roi. La Déclaration d'indépendance américaine, le 4 juillet 1776, affirme la primauté des droits et libertés. Au cours de la décennie suivante, par l'entremise du marquis de La Fayette et de Thomas Jefferson, elle éclaire les révolutionnaires français, notamment sur la notion de souveraineté du peuple.
Les dix-sept articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen sont discutés et votés entre le 20 et le 26 août 1789, alors que l'Assemblée constituante est en conflit avec le roi. Destinée à préparer la rédaction de la première Constitution écrite française, en la fondant sur l'énonciation des principes philosophiques qui doivent former la base de la société, elle proclame les droits « naturels et imprescriptibles » de l'homme, c'est-à-dire ceux que chacun doit exercer par le fait qu'il est homme et sans distinction de naissance, de nation ou de couleur. Après une définition générale de la notion de liberté, la Déclaration précise un certain nombre de libertés particulières : liberté de conscience et d'opinion, liberté de pensée et d'expression, droit à la propriété. L'égalité est la deuxième grande notion de la Déclaration : égalité des droits, égalité devant la loi et la justice, égalité devant l'impôt, égale admissibilité aux emplois publics. L'État nouveau, édifié sur le principe de la séparation des pouvoirs et sur la notion de souveraineté du peuple, devient le garant des droits.
Au xixe s., la Déclaration de 1789 inspire le mouvement politique et social en Europe et en Amérique latine. Avec l'industrialisation grandissante, l'essor du pouvoir capitaliste et financier, la revendication des droits s'enrichit en effet de la notion de droits sociaux, et particulièrement de droit au travail, sous l'influence du socialisme à la française, puis du socialisme marxiste. Mais les génocides, l'esclavage, qui ne sera aboli que lentement et inégalement, le colonialisme, le travail des enfants, la sujétion des femmes, dont l'émancipation – quand elle aura lieu – sera tardive, sont autant d'obstacles historiques sur la voie d'une reconnaissance pleine et entière des droits de l'homme. La France et les États-Unis eux-mêmes rechigneront souvent à montrer l'exemple, malgré la création d'associations philanthropiques et la lutte pour la prise en compte des droits sociaux (droit de grève, amélioration des conditions de travail, réduction du temps de travail).
Selon l'article 55 de la Charte des Nations unies de 1945, l'O.N.U. doit favoriser le respect universel et effectif des droits de l'homme avec le concours des États membres. Mais la politique des blocs, l'un sous influence américaine, l'autre sous influence soviétique, perturbe pendant plusieurs décennies les débats. Tandis que les Américains insistent sur la notion de droits politiques, les démocraties libérales d'Europe défendent celle de droits sociaux. Compte tenu des deux options, les Nations unies tentent de réaliser leur mission à travers l'action de la Commission des droits de l'homme, créée en 1946. Ceux-ci deviennent une valeur internationalisée en 1948. Il est reconnu que l'homme détient un ensemble de droits opposables aux autres individus, aux groupes sociaux et aux États souverains. Les droits de l’homme sont par la suite étendus à l’enfant : le 20 novembre 1989, les Nations unies adoptent la Convention des droits de l'enfant, afin de protéger l'enfance de la famine, de la maladie, du travail, de la prostitution et de la guerre.
→ droits de l'enfant.

LES DROITS DE L'HOMME FACE AU PRINCIPE DE SOUVERAINETÉ
Le principe des droits humains, tout comme la notion de paix, fait partie de ces thèmes a priori consensuels et irréfutables sous peine de placer le réfractaire en marge de la communauté internationale. L'humanité entière est révulsée par la barbarie, et un régime criminel ne peut, moralement, asseoir sa légitimité sur la seule souveraineté de l'État.
Les tribunaux militaires internationaux de Nuremberg (1945) et de Tokyo (1946) ont manifesté la valeur de ce raisonnement. Dès 1950, l'Assemblée générale des Nations unies a créé un comité chargé de rédiger le projet de statut d'une juridiction pénale internationale permanente. Mais la guerre froide a eu raison de ces vœux pieux. Le fait que ce projet n'ait pris forme qu'en 1998 témoigne – de même que ses limites – de la résistance opiniâtre des États : aucun d'eux ne cherche spontanément à promouvoir une justice supranationale à laquelle il serait soumis et devant laquelle des citoyens, nationaux ou étrangers, pourraient le traduire. C'est la même attitude qui a freiné les progrès de l'arbitrage international depuis les conférences de la Paix de 1899 et 1907, et limité, malgré deux guerres mondiales, les prérogatives de la Société des Nations puis de l'O.N.U. En réalité, l'opinion publique, alertée par les médias et les organisations non gouvernementales, est un acteur extrêmement important de ces évolutions. C'est à elle qu'il revient de dénoncer les abus de pouvoir, en l'occurrence les crimes commis par les dictateurs, l'altération du principe d'égalité, la négation des droits sociaux, ou encore la corruption des élites dirigeantes. Mais la seule sanction morale ne suffit pas à faire reculer les États coupables. La Déclaration universelle des droits de l'homme exige, par conséquent, pour ne pas être qu'un leurre, que la communauté internationale soit dotée de juridictions qui permettent de se saisir des cas de violation de ces droits.
Voir les articles justice internationale : TPIR, TPIY.

LES INSTITUTIONS AU SERVICE DES DROITS DE L'HOMME

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME DE L'O.N.U.
Créée en 1946, la Commission se réunit pour la première fois en 1947 pour élaborer la Déclaration universelle des droits de l'homme. Rédigée en un an, celle-ci est adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948. Depuis lors, la date du 10 décembre est célébrée tous les ans en qualité de « Journée des droits de l'homme ».
Jusqu'en 1966, les efforts de la Commission sont essentiellement de nature normative, attendu que, dans une déclaration de 1947, elle estime « n'être habilitée à prendre aucune mesure au sujet de réclamations relatives aux droits de l'homme ». Ses travaux aboutissent, en 1966, à l'adoption par l'Assemblée générale des Nations unies du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ; ces deux pactes forment, avec la Déclaration universelle, la Charte internationale des droits de l'homme.
En 1967, le Conseil économique et social autorise la Commission à traiter des violations des droits de l'homme. Aussi met-elle au point des mécanismes et procédures afin de vérifier le respect par les États du droit international relatif aux droits de l'homme et de constater les violations présumées de ces droits par l'envoi de missions d'enquête. En outre, la Commission met de plus en plus l'accent sur la promotion des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier le droit au développement et le droit à un niveau de vie convenable. Elle s'intéresse de près, comme le démontre la Déclaration de la Conférence mondiale sur les droits de l'homme tenue à Vienne en 1993, à la protection des droits des groupes sociaux vulnérables, des minorités et des peuples autochtones, ainsi qu'à la promotion des droits de l'enfant et des femmes. La démocratie et le développement sont considérés comme deux facteurs nécessaires à l'épanouissement des droits de l'homme.
Décrédibilisée par la présence en son sein de pays critiqués pour leurs propres atteintes aux droits de l’homme, elle est dissoute en 2006, et remplacée par le Conseil des droits de l’homme. Cet organe subsidiaire de l’Assemblée générale des Nations unies est notamment chargé d’effectuer un examen périodique de tous les pays au regard des droits de l'homme, et de formuler aux États concernés des recommandations.

LA CONVENTION EUROPÉENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTÉS FONDAMENTALES
Établie par le Conseil de l'Europe en 1950 et entrée en vigueur en 1953, la Convention européenne se situe dans la continuité de la Déclaration universelle de 1948. Chaque État qui adhère au Conseil de l'Europe est tenu de la signer et de la ratifier dans un délai d'un an. Les États signataires s'engagent alors à reconnaître à toute personne relevant de leur juridiction certains droits civils et politiques et certaines libertés définis dans la Convention. Après avoir épuisé toutes les voies de recours internes, un individu qui s'estime lésé dans ses droits peut entamer des procédures à l'encontre de l'État contractant qu'il tient pour responsable. Un État contractant peut également intenter une procédure contre un autre État contractant : c'est ce que l'on appelle une requête interétatique.
Le fait que des États souverains acceptent qu'une juridiction supranationale remette en cause les décisions de juridictions internes et qu'ils s'engagent à exécuter ses jugements a représenté une étape historique dans le développement du droit international. La théorie selon laquelle les droits de l'homme ont un caractère fondamental les plaçant au-dessus des législations et des pratiques nationales a été appliquée. Cela revient à reconnaître qu'il ne faut pas laisser un État décider lui-même de l'application des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fonction de considérations politiques nationales.
La Convention a instauré une Cour européenne des droits de l'homme, chargée d'examiner les requêtes individuelles et interétatiques. Les juges de la Cour, totalement indépendants, sont élus par le Parlement européen. Le Conseil des ministres surveille l'exécution des arrêts de la Cour. Le droit de recours individuel est automatique, ainsi que la saisine de la Cour dans le cadre des requêtes individuelles et interétatiques.
         
LES GRANDES ÉTAPES INSTITUTIONNELLES DE LA DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME


1215 : la Grande Charte d'Angleterre (Magna Carta) énumère, après les excès de Jean sans Terre, un certain nombre de dispositions tendant à protéger l'individu contre l'arbitraire royal en matière de taxes ou de spoliation de biens, et assure à chaque sujet un procès équitable dans le cadre de l'égalité de traitement devant la loi.
1679 : l'habeas corpus, en Angleterre, garantit le respect de la personne humaine et la protège d'arrestations et de sanctions arbitraires. Le roi est ainsi privé du pouvoir de faire emprisonner qui il veut selon son bon plaisir.
1689 : la Déclaration des droits (Bill of Rights), adoptée par la Chambre des lords et la Chambre des communes, réduit le pouvoir royal en Angleterre, en proclamant notamment la liberté de parole au sein du Parlement et le droit pour les sujets d'adresser des pétitions au monarque.
4 juillet 1776 : la Déclaration d'indépendance américaine, rédigée par Thomas Jefferson, Benjamin Franklin et John Adams, et inspirée de la philosophie des Lumières, est signée à Philadelphie par les délégués des treize colonies et promulgue un contrat social fondé sur l'indépendance, l'égalité, la liberté et la recherche du bonheur (« We hold these truths to be self-evident; that all men are created equal, that they are endowed by their creator with certain unalienable rights, that among these are life, liberty and the pursuit of happiness »).
26 août 1789 : la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, destinée à devenir l'archétype des déclarations ultérieures, est adoptée par l'Assemblée constituante.
3 septembre 1791 : la première Constitution écrite française garantit pour chacun « des droits naturels et civils ».
26 juin 1945 : la Charte des Nations unies, signée à San Francisco, internationalise le concept de droits de l'homme.
10 décembre 1948 : la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'O.N.U. est la première référence aux libertés fondamentales communes à tous les peuples de la Terre. Aux obligations morales liées à l'universalité du message s'ajoutent, pour les pays signataires, de réelles obligations juridiques qui sont censées instituer autant de garanties pour les peuples concernés.
4 novembre 1950 : la Convention européenne des droits de l'homme est signée à Rome sous l'égide du Conseil de l'Europe ; elle entre en vigueur en 1953.
1er août 1975 : l'Acte final de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (C.S.C.E.), signé à Helsinki, fait figurer le « respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales » parmi les principes de base qui régissent les relations mutuelles des 35 États participants.

LES ORGANISMES DE DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME
LA LIGUE DES DROITS DE L'HOMME
La Ligue est le plus ancien organisme de défense des droits et des libertés. Elle est fondée, en février 1898, par l'ancien ministre de la Justice Ludovic Trarieux et quelques amis, à l'occasion du procès intenté à Émile Zola qui venait de faire paraître dans le journal l'Aurore son célèbre réquisitoire « J'accuse ». Après l'affaire Dreyfus, la Ligue poursuit son engagement en prenant position sur les grands débats contemporains. Ainsi, en 1905, elle se déclare en faveur de la séparation des Églises et de l'État ; en 1909, son président réclame le droit de vote pour les femmes et leur éligibilité à la Chambre et au Sénat. La Ligue suit de près l'évolution de la vie politique et, en 1935, c'est à son siège qu'est signé le programme du Front populaire par les socialistes, les radicaux et les communistes.
En 1948, la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies, reprend largement le projet du représentant français René Cassin, membre de la Ligue des droits de l'homme. Par la suite, celle-ci joue un rôle dans les protestations contre l'utilisation de la torture lors de la guerre d'Algérie, dans les revendications étudiantes de mai 1968, dans les actions qui amènent, en 1973, la modification de la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, ou encore en faveur de l.’abolition de la peine de mort. Plus récemment, elle s’est engagée dans les années 1990 contre la montée du racisme, et pour l’extension des droits des étrangers, ainsi que pour la régularisation des sans-papiers.

LA FÉDÉRATION INTERNATIONALE DES LIGUES DES DROITS DE L'HOMME (F.I.D.H.)
Fondée en 1922, la Fédération est la plus ancienne organisation de défense des droits de l'homme au plan international. Elle a son siège en France. Organisation non gouvernementale reconnue d'utilité publique, elle se déclare également apolitique, non confessionnelle et non lucrative. Elle se voue à la promotion de la Déclaration universelle des droits de l'homme en informant l'opinion publique et les organisations internationales par le biais de lettres, de communiqués et de conférences de presse. Comme Amnesty International, la F.I.D.H. bénéficie du statut d'observateur auprès des instances internationales (Nations unies, Unesco, Conseil de l'Europe, Commission africaine des droits de l'homme).

AMNESTY INTERNATIONAL
C'est en 1961, à l'initiative de Peter Benenson (1921-2005), avocat britannique, qu'un groupe d'avocats, de journalistes, d'écrivains, choqués par la condamnation de deux étudiants portugais à vingt ans de prison pour avoir porté un toast à la liberté dans un bar, lance un appel pour l'amnistie (Appeal for Amnesty). L'acte de naissance officiel du mouvement Amnesty International peut être daté du 28 mai 1961, lorsque le supplément dominical du London Observer relate l'histoire de six personnes incarcérées pour « raisons de conscience » – parce qu'elles ont exprimé leurs croyances religieuses ou politiques – et exhorte les gouvernements à relâcher de tels prisonniers. Amnesty International, organisation indépendante à caractère non gouvernemental, mène depuis lors une action vigoureuse de défense des droits de l'homme, à l'adresse des gouvernements qu'elle fustige dans son rapport annuel et de l'opinion publique internationale. Au cours des années 1970, Amnesty International s'est vu confier le statut d'observateur pour le compte des Nations unies. En 1977, son action a été récompensée par le prix Nobel de la paix, titre qui n'impressionne pas forcément tous les gouvernements.


PLAN
*        
    *         LE CONCEPT DE « DROITS NATURELS »
    *         TROIS SIÈCLES D'HISTOIRE DES DROITS DE L'HOMME
    *         LES DROITS DE L'HOMME FACE AU PRINCIPE DE SOUVERAINETÉ
    *         LES INSTITUTIONS AU SERVICE DES DROITS DE L'HOMME
        *         La Commission des droits de l'homme de l'O.N.U.
        *         La Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
    *         LES ORGANISMES DE DÉFENSE DES DROITS DE L'HOMME
        *         La Ligue des droits de l'homme
        *         La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (F.I.D.H.)
        *         Amnesty International

 


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LE GOTHIQUE

 

 

 

 

 

 

 

gothique
(bas latin gothicus)

Consulter aussi dans le dictionnaire : gothique
Cet article fait partie du dossier consacré au style.
Se dit d'une forme d'art qui s'est épanouie en Europe du xiie s. jusqu'à la Renaissance.

BEAUX-ARTS

1. INTRODUCTION
       
Le mot gothique apparaît au xvie s. pour qualifier l'architecture médiévale du nord des Alpes par opposition aux formes classiques reprises de l'Antiquité par la Renaissance italienne. De nos jours encore, le gothique se définit mieux dans l'architecture que dans les autres domaines de l'art.

Caractérisé par l'emploi de l'arc brisé, joint à la voûte sur croisée d'ogives et à l'arc-boutant, il s'étend du milieu du xiie s. au début du xvie s.
Il est plus malaisé de le définir dans la peinture, qui ne devient réellement gothique qu'au xiiie s. et qui, dès 1400, au moins en Italie, s'en éloigne. En fait, l'art gothique, qui s'est développé dans toute l'Europe occidentale, n'est pas apparu partout au même moment. Il a évolué différemment selon les contrées.

2. LE PREMIER ART GOTHIQUE

Apparu tout d'abord dans l'architecture, l’art gothique est lié à l'abbé Suger et voit son éclosion à l'église de Saint-Denis, près de Paris. C'est là que, pour la première fois, vers 1140, il s'affirme avec maîtrise.

2.1. L’ABBATIALE DE SAINT-DENIS
Les parties basses du chœur de Saint-Denis mettent en œuvre voûtes sur croisée d'ogives, supports minces et arcs brisés, plus résistants que les arcs en plein cintre. L'abbé Suger privilégie ces moyens novateurs car pour lui l'église doit être sur terre le reflet de l'église céleste, demeure du Seigneur. Et cette évocation céleste ne peut être rendue que par la lumière, qui pénètre abondamment dans les structures minces par l'intermédiaire des vitraux, mode d'expression majeur de la peinture à l'époque gothique. La préférence accordée aux nouvelles techniques satisfait également un désir de clarification, comme l'a montré Erwin Panofsky. On est alors à l'âge de la scolastique et l’on aime argumenter, définir, classer. Les procédés gothiques de construction permettent de fait de donner une grande lisibilité aux structures, de souligner, par le graphisme des colonnes, des chapiteaux et des moulures, les lignes de force des supports et leurs prolongements sous les voûtes dans le jeu des ogives et des doubleaux, la division des travées et la séparation stricte des étages. Cette même clarté reparaît dans la répartition des sculptures aux portails : statues-colonnes, voussures, trumeau, linteau, tympan.
C'est à Saint-Denis que se manifeste avec évidence cet esprit nouveau. Pourtant, la voûte sur croisée d'ogives était employée depuis la fin du xie s. en Angleterre et en Normandie, et l'arc brisé était d'un usage courant dans la Bourgogne romane. La création de l'art gothique tient à ce que, par le moyen de techniques éprouvées et associées, Saint-Denis exprime un style nouveau de légèreté, de lumière et de clarté logique, qui rompt avec la robustesse, le schématisme et parfois la confusion de l'art roman.

2.2. LE PORTAIL ROYAL DE CHARTRES
Contemporain de Saint-Denis, le portail royal de Chartres, mieux conservé que la façade de l'abbatiale de Suger, montre dans une majesté grandiose et dans une composition rigoureuse la plénitude de la vision gothique dans la sculpture. C'est une vaste synthèse iconographique, le « miroir du monde », selon l'expression d'Émile Mâle, reprise des auteurs du xiiie s., où toutes les images de l'univers céleste et terrestre s'ordonnent hiérarchiquement autour du Christ triomphant, dans un accord parfait avec la structure architecturale des portes.

2.3. DIFFUSION ET ÉVOLUTION DES MODÈLES
La sculpture de Chartres est rapidement imitée en Île-de-France et sur la Loire tandis que le chevet de Suger, à doubles bas-côtés et chapelles rayonnantes juxtaposées, connaît une longue descendance (cathédrale de Noyon, abbatiale de Saint-Germain-des-Prés).

SENS
La cathédrale de Sens est le premier grand édifice entièrement gothique construit dans le milieu du siècle. Elle utilise les voûtes d'ogives sexpartites, mises au point en Normandie dès les années 1120, et emploie l'alternance des supports, colonnes jumelles et piles composées. Son élévation est à trois étages, comme, plus tard, les cathédrales du xiiie s. Dépourvue de transept à l'origine, sa relative simplicité contraste avec la complexité des édifices de la seconde moitié du siècle.

NOYON ET LAON
En effet, des cathédrales comme celles de Noyon et de Laon multiplient alors les étages d'ouvertures, arcades, tribunes, triforium, fenêtres hautes, et adoptent des transepts étendus. Dans cette région du nord-est de la France se développe un grand foyer d'architecture dans la seconde moitié du xiie s. À Laon est utilisé pour la première fois de façon systématique le triforium-galerie de passage, qui allait être un des traits distinctifs des grandes cathédrales.

REIMS
Saint-Remi de Reims illustre particulièrement la recherche de lumière, multipliant les fenêtres à la façade et au chevet, creusant les murs de passages et faisant jouer les colonnes pour accentuer la plasticité des formes. Le mur, qui fait alterner pénombre et luminosité, devient diaphane, selon l'expression de Hans Jantzen. Ce mur « modelé » reparaît aux transepts de Noyon et de Soissons, et essaime vers l'Angleterre et vers la Bourgogne jusqu'à Lausanne.

PARIS
Notre-Dame de Paris appartient aussi dans son ensemble à cette époque. Primitivement dotée de quatre étages, couverte de voûtes sexpartites, elle a abandonné l'alternance au profit d'une continuité plus sobre des travées. Dans cette église, on projette de construire la nef en l'étayant d'arcs-boutants. Ce système de contre-butement, typiquement gothique, a d’abord été expérimenté à Mantes, à Saint-Remi de Reims, peut-être à Saint-Germain-des-Prés, mais c'est à partir des années 1180 qu'on comprend tout le parti qu'on peut en tirer pour supprimer les tribunes et accroître encore la lumière intérieure par l'agrandissement des fenêtres hautes.

ANGERS
L'art gothique s’y montre également précoce. Dès le milieu du xiie s., la cathédrale adopte la croisée d'ogives sur plan carré, sous des voûtes bombées comme des coupoles.

POITIERS
À Poitiers, on entreprend une cathédrale à trois vaisseaux à peu près de même hauteur, avec un chevet plat, des supports légers, sans étages ni arcs-boutants, et avec des voûtes bombées recoupées de nervures perpendiculaires, ou liernes.

BOURGOGNE ET CHAMPAGNE
Les Cisterciens, en Bourgogne et en Champagne, utilisent de bonne heure l'arc brisé et la voûte sur croisée d'ogives. L'abbatiale de Pontigny, dans l'Yonne, en demeure un des meilleurs exemples.

3. LE STYLE 1200
Autour de 1200 apparaît dans les arts figurés un style souple et fluide, éloigné de la rigueur gothique, qui plonge ses racines dans un lointain passé teinté de nostalgie pour l'art antique et paléochrétien. Son grand maître est un orfèvre lié au milieu mosan, Nicolas de Verdun, qui tire du métal des figures puissamment modelées sous leur drapé « mouillé », à la châsse de Notre-Dame de Tournai comme à l'ambon de Klosterneuburg (près de Vienne).
La seconde Bible de Winchester annonce ce courant particulier dans la peinture, qui se manifeste dans le psautier d'Ingeburge (Chantilly) et dans les vitraux de Laon.
La sculpture sur pierre du nord-est de la France en porte la marque à Saint-Remi de Reims, à la cathédrale de Laon, et les statues de la Visitation de la cathédrale de Reims en constituent une image tardive et sans suite, en raison du triomphe de l'art proprement gothique.

4. L'ÂGE DES GRANDES CATHÉDRALES
4.1. LA CATHÉDRALE DE CHARTRES

Toutes les expériences architecturales du xiie s. aboutissent à l'éclosion d'un chef-d'œuvre, la cathédrale de Chartres, qui fut reconstruite, à l'exception de la façade, après l'incendie de 1194. Elle confirme les recherches antérieures : les murs sont articulés très lisiblement, sans alternance. Les voûtes sont quadripartites. Les piles, composées, se plantent de biais pour répondre aux diagonales des ogives et engendrent ainsi un dynamisme ignoré des premières œuvres gothiques. Le triforium-passage, dernière zone d'ombre, se situe entre des arcades et des fenêtres composées d'importance égale, dans un équilibre parfait. Chartres abandonne la tribune, la voûte sexpartite, les effets de passage dans les murs pour la sobriété des travées simples à trois étages. C'est une œuvre classique dans la mesure où classicisme signifie équilibre, mesure et simplicité. Les arcs-boutants règnent en maîtres à l'extérieur, hérissé de tours, décoré de porches, dont la richesse un peu lourde s'oppose à l'harmonie paisible de l'ordonnance interne.
Contemporaine de Chartres, au moins pour le chevet, la cathédrale de Soissons révèle les mêmes qualités. Un peu plus jeune, la cathédrale de Reims est l'héritière directe de Chartres, avec plus de raffinement et d'élancement, et une façade sculptée incomparable.

4.2. LA CATHÉDRALE DE BOURGES

La cathédrale de Bourges, contemporaine de Chartres, montre la richesse d'invention du xiiie s. Son vaisseau central, sans transept, est assis sur des piles très élevées. À travers les arcades, on voit l'étagement des doubles collatéraux, de hauteur différente. Il en résulte un espace intérieur prodigieux. Le Maître de Bourges ne renonce ni aux voûtes sexpartites, ni au jeu des colonnes, qui articulent fortement les murs dans une alternance savante, et cette plasticité se maintient en Bourgogne, à Auxerre, à Notre-Dame de Dijon.

4.3. LE GOTHIQUE EN NORMANDIE
La Normandie se convertit à l'art gothique à la fin du xiie s., à Fécamp, à Lisieux, et, à partir du chevet de Saint-Etienne de Caen, crée un art original, aux arcs très aigus et très moulurés, aux murs percés de nombreux passages. Cette architecture s'épanouit avec les cathédrales de Rouen, de Coutances, de Bayeux et, plus tard, de Sées. Il faut y rattacher la Merveille du Mont-Saint-Michel, bâtie de 1203 à 1228, et aussi le chevet de la cathédrale du Mans.

4.4. DIFFUSION DE L’ART GOTHIQUE
L'ordre cistercien, en pleine expansion, exporte l'architecture gothique vers l'Italie, à Chiaravalle Milanese ou à Fossanova, vers l'Allemagne, à Eberbach ou à Maulbronn, vers l'Espagne, à Poblet ou à Veruela, vers le Portugal, à Alcobaça, vers l'Angleterre, à Fountains Abbey ou à Rievaulx.

Mais, indépendamment des fondations cisterciennes, l'Angleterre élabore rapidement une nouvelle architecture. L'art gothique apparaît au chœur de la cathédrale de Canterbury, construit en 1175 sous la direction de Guillaume de Sens. Le chœur de Chichester, la cathédrale de Lincoln, à l'aube du xiiie s., montrent des caractères proches de l'art normand, mais y ajoutent la polychromie des marbres noirs de Purbeck sur fond de calcaire blanc, accentuent la profondeur des murs et adoptent des plans très allongés, le plus souvent à chevet plat. La tour-lanterne, comme en Normandie, domine au-dessus des longues toitures, où les arcs-boutants se dissimulent volontiers, à l'inverse des contre-butements français. La cathédrale de Salisbury, commencée en 1220, consacre ce nouveau style.

4.5. ÉPANOUISSEMENT DE LA SCULPTURE
Pendant que s'élèvent les cathédrales, la sculpture sur pierre envahit les façades. Le portail de la cathédrale de Senlis, à la fin du xiie s., avec son Triomphe de la Vierge, repris à Chartres et à Paris, marque un tournant et révèle un style plus humanisé que celui du portail royal de Chartres, tout en restant monumental. Cette sculpture calme, noble et sereine s'affirme aux six portes du transept de Chartres, dans les tympans comme dans les statues des apôtres, des martyrs et des confesseurs des ébrasements ou dans le Beau Dieu du trumeau de la porte du Jugement dernier. Le saint Firmin et le Beau Dieu d'Amiens, le Jugement dernier de Notre-Dame de Paris, le Beau Dieu de la cathédrale de Reims illustrent aussi cet art de haute qualité.

5. LE GOTHIQUE RAYONNANT
Vers 1230-1240, le domaine capétien, déjà si riche en expériences, donne naissance au style rayonnant, qui conquiert, grâce au prestige de la royauté française, l'Europe occidentale et se continue jusque dans le courant du xive s.

5.1. ARCHITECTURE
Ce style demeure gothique dans sa structure et ses procédés, mais il rompt avec l'équilibre instauré à Chartres, par une recherche de plus grande unité spatiale, obtenue par des ouvertures plus vastes au rez-de-chaussée, afin de faire communiquer vaisseau central et bas-côtés, et par des volumes plus ramassés et plus concentrés, qui réduisent le transept ou le déploiement du chevet. La lumière efface les dernières zones d'ombre grâce au vitrage des triforiums ou à leur suppression. L'articulation des murs tend à disparaître dans l'amenuisement des supports, qui se fondent dans un riche décor continu au triforium et plus encore aux fenêtres hautes, décomposées par leurs remplages en séries de lancettes surmontées de trilobes, de quatre-feuilles et de roses. Le réseau des fenêtres se poursuit à l'extérieur et couvre de ses motifs contreforts et arcs-boutants.

FRANCE

Le gothique rayonnant se manifeste à Notre-Dame de Paris dans les chapelles latérales et aux deux roses du transept, à meneaux « rayonnants », œuvres de Jean de Chelles et de Pierre de Montreuil. Il apparaît aussi au transept et à la nef de Saint-Denis ainsi qu'à la cathédrale d'Amiens, commencée en 1220 par Robert de Luzarches. Dans cet édifice, la nef rompt avec les proportions chartraines ; l'évolution est plus nette au chevet bâti par Thomas et Renaud de Cormont : le triforium s'y ajoure, se couronne de gables, se mêle au réseau des fenêtres.
La Sainte-Chapelle de Paris (1241-1248) est sans doute l'exemple le plus connu de cet art. C'est à la fois un édifice et un reliquaire. L'étage supérieur n'est plus qu'un espace unique, ouvert de toutes parts à la lumière ; il faut un effort pour retrouver dans la succession des fenêtres la structure architecturale.
Les cathédrales de Troyes, de Tours, la nef de la cathédrale de Strasbourg (tout comme, en Europe, la cathédrale de Cologne et l'abbatiale de Westminster) diffusent le style rayonnant, qui supplante les inventions régionales : en Champagne, à Saint-Urbain de Troyes ; en Bourgogne, à Saint-Bénigne de Dijon ; en Normandie, à Évreux et à Saint-Ouen de Rouen. Il s'étend dans le Sud : à Saint-Nazaire de Carcassonne, dans les églises bâties par Jean Deschamps (1218 ?-1295) [Clermont, Limoges] et plus tard à La Chaise-Dieu.

EUROPE

L'Angleterre, malgré l’exemple de Westminster, reste fidèle à ses traditions et adapte les éléments rayonnants, surtout connus dans les milieux de la cour de Londres, à ses créations propres. C'est l'époque du style décoré – decorated style – , qui se poursuit jusqu'au milieu du xive s. à travers les cathédrales d'Exeter, de Winchester, d'York, la nef de Canterbury et l'extraordinaire tour-lanterne octogonale en bois d'Ély.
L'Allemagne, longtemps réticente à l'architecture gothique, l'accepte au xiiie s. à Mayence, à Trèves (Notre-Dame), à Marburg (Elisabethkirche). Après 1250, les cathédrales de Strasbourg et de Cologne imposent le style rayonnant, puis, très vite, s'élaborent des formules originales, comme la tour unique de la façade de la cathédrale de Fribourg-en-Brisgau.
L'art gothique s'étend aussi vers le nord : à l'église des saints Michel et Gudule de Bruxelles et jusqu'au Danemark et en Suède.
Vers le sud, il s'implante en Espagne, à Ávila, à Burgos, à Tolède, à León, mais il s'y mêle un décor très particulier : l'art mudéjar, qui emprunte à l'islām, florissant dans le Sud, ses motifs et ses procédés.
L'architecture gothique se rencontre aussi en Italie, adoptée par les ordres mendiants à San Francesco d'Assise et à Bologne, plus tard à Santa Croce de Florence. La cathédrale de Sienne appartient au gothique du xiiie s. dans sa majeure partie, mais avec une polychromie de marbres dans la tradition locale. À la cathédrale d'Orvieto, un peu après, les architectes dressent une façade garnie de gables gothiques, mais ne voûtent pas l'intérieur, manifestant ainsi un refus des procédés gothiques et un retour à l'art paléochrétien.

5.2. SCULPTURE
En même temps que l'architecture, la sculpture évolue. Dans la flore des chapiteaux apparaissent des feuillages et des fleurs directement inspirés de la nature (Notre-Dame de Paris, Sainte-Chapelle, cathédrale de Reims). Les statues s'animent, s'isolent et se font expressives : apôtres à l'intérieur de la Sainte-Chapelle, saint Joseph et l'ange au sourire de Reims.
Ces sculptures eurent un grand succès et une suite : par exemple avec la Vierge dorée du transept d'Amiens, aux portails de Bourges, à Strasbourg dans les statues de l'Église et de la Synagogue, des Vierges sages et des Vierges folles, à Mayence et, au-delà du Rhin, avec le Cavalier de Bamberg et, à un degré moindre, à Naumburg dans les célèbres statues des fondateurs. La beauté de ces sculptures s'exprima avec une rare délicatesse dans les ivoires parisiens.
L'influence de la sculpture française se sentit jusqu'en Italie, chez Giovanni Pisano, fils de Nicola, qui allia la plastique gothique aux traditions des reliefs antiques, avec une agitation dramatique, à la cathédrale de Sienne et à Pise.

5.3. PEINTURE
La peinture française fut dominée par l'art du vitrail à Chartres, à Bourges ou à la Sainte-Chapelle. Son ascendant fut tel que les miniatures, comme celles du Psautier de Saint-Louis (Bibliothèque nationale), adoptèrent pour cadres les réseaux des verrières. Les châsses, telles celle de saint Taurin à Evreux et celle de sainte Gertrude à Nivelles, prirent la forme d'une église couverte de fenestrages. Même les portails, comme celui de Saint-Etienne à Sens, se décorèrent de réseaux rayonnants.
En Italie, Giotto, à l'aube du xive s., renouvela la peinture italienne, la dégagea des traditions byzantines, lui insuffla une monumentalité et une puissance plastique qui montrent des contacts avec la sculpture des cathédrales françaises, mais aussi un retour aux valeurs antiques, à l'Arena de Padoue comme à Santa Croce de Florence. Aucun peintre, au nord des Alpes, vers 1300, ne peut être comparé à Giotto, mais on trouve des ateliers d'enlumineurs, notamment à Paris, autour du maître Honoré.

6. LE XIVe S. JUSQUE VERS 1380

On admet généralement que le style rayonnant se poursuit au cours de la majeure partie du xive s. En fait, c'est une époque encore mal étudiée, qui révèle le développement de particularismes locaux, voire nationaux, jusqu'à l'éclosion du style international à la fin du siècle.

6.1. ARCHITECTURE
ARCHITECTURE RELIGIEUSE
Les constructions d’églises se poursuivent (Auxerre, Rodez, église des Jacobins de Toulouse, cathédrale d’Albi).
Les rois de Majorque édifient une immense cathédrale à Palma, tandis qu'à l'autre extrémité de la Méditerranée les Lusignan élèvent la cathédrale de Famagouste.
L'Allemagne construit des églises en brique dans le Nord et répand dans le Sud les églises-halles à trois vaisseaux de même hauteur, dont le premier exemple est l'église de Schwäbisch Gmünd, commencée vers 1320. C'est là que débutent les Parler, dynastie d'architectes du xive s., qui s'illustrent au chœur de Fribourg-en-Brisgau, à celui de la cathédrale de Bâle, à la façade de Strasbourg et à Prague.

ARCHITECTURE CIVILE
L'architecture civile, surtout militaire au xiiie s., se développe dans les édifices publics des pays de civilisation urbaine : Palazzo Vecchio de Florence, Palais public de Sienne (bâti de 1297 à 1310), halle aux draps de Bruges (xiiie-xve s.).
En France, on fonde des villes nouvelles dans le Sud-Ouest, telles les bastides au tracé régulier de Monpazier ou de Grenade-sur-Garonne, on bâtit des ponts, comme le pont Valentré de Cahors, on construit des hôpitaux, comme celui de Tonnerre.
L'aspect le plus frappant de l'architecture civile du xive s. est le développement des châteaux et des demeures princières, de plus en plus accueillants, parce que, a-t-on dit, les progrès de l'artillerie rendent inutiles les lourdes défenses, mais aussi à cause de l'évolution des goûts et des mœurs. À Paris, on peut encore voir la grande salle basse du Palais, qui remonte à l'époque de Philippe le Bel, et, aux portes de la capitale, le château de Vincennes, où naquit Charles V.
Le Palais-Vieux des papes d'Avignon, construit avant 1346 par Pierre Poisson, est encore une forteresse ; le Palais-Neuf, achevé en 1360, avec sa salle de la Grande Audience et sa chapelle, est caractéristique d'un nouveau luxe, où se rencontrent influences italiennes et nordiques.

6.2. SCULPTURE
Dans les dernières années du xiiie s. s'établit un important chantier de sculpture à Notre-Dame de Paris pour le décor de la clôture du chœur. Mais la statuaire devient l'apanage des mécènes : statues de Vierges et de saints commandées par Enguerrand de Marigny pour Écouis ; œuvres de Jean Pépin d'Huy exécutées pour Mahaut d'Artois ; Vierge reliquaire du Louvre, objet précieux d'orfèvrerie et d'émaux fait à la demande de la reine Jeanne d'Évreux. Cette figure montre la grâce mélancolique que l'on retrouve sur les innombrables madones de pierre du xive s., le regard perdu, l'attitude « hanchée » pour accentuer la souplesse alanguie de la forme. Leur préciosité linéaire, souvent un peu sèche, se répète dans les gisants et se combine au réalisme des portraits funéraires, qui font leur apparition par exemple au tombeau des entrailles de Charles IV et de Jeanne d'Évreux par le sculpteur Jean de Liège.

6.3. PEINTURE
ITALIE
Dans la peinture, à Sienne, dès les premières années du xive s., Duccio allie dans sa fameuse Maestà les fonds d'or et l'irréalité byzantine à une notation subtile, fluide de l'espace, à des tons précieux, à une écriture souple. Simone Martini, auteur du Condottiere da Guidoriccio da Fogliano du Palais public de Sienne, est son héritier et se trouve à Avignon en 1340 pour décorer la porte de Notre-Dame-des-Doms. Matteo Giovannetti poursuit l'œuvre de Simone à Avignon, dans le décor du Palais-Neuf et à la chartreuse de Villeneuve. À Sienne même, les Lorenzetti cherchent une nouvelle expression de l'espace en développant les cadres architecturaux à l'intérieur de leurs peintures ainsi que les vastes premiers plans derrière lesquels se dressent des figures gracieuses.

FRANCE
En France, à Évreux et à Saint-Ouen de Rouen, les admirables vitraux à grands personnages surmontés de dais s'éclairent de jaune d'argent et scintillent sur des fonds de grisaille.
À Paris, Jean Pucelle, auteur, avec son atelier, des miniatures de la Bible de Robert de Billiyng (1327) et du Bréviaire de Belleville conservés à la Bibliothèque nationale, s'impose. Ses tons nuancés, son graphisme raffiné ne peuvent s'expliquer sans des contacts directs avec la peinture siennoise, mais, en même temps, il met à la mode les petites scènes naturalistes, qui se répandent dans les marges et dont l'art parisien avait déjà donné quelques exemples.

6.4. IMPORTANCE DU MÉCÉNAT PRINCIER
Les parents de Charles V, Jean le Bon et Bonne de Luxembourg, donnent l'exemple du mécénat princier. Le portrait de Jean le Bon (Louvre), peint peut-être par Girard d'Orléans, est le premier tableau de chevalet et le plus ancien portrait dans la peinture française. C'est aussi Jean le Bon qui commande la Bible de Jean de Sy (Bibliothèque nationale). C'est dans ce milieu royal que se forme le goût de Charles V pour le mécénat, de même que celui de son oncle, l'empereur Charles IV de Bohême, et celui de ses frères, les ducs d'Anjou, de Berry et de Bourgogne.
S'il ne reste rien du Louvre de Charles V, construit par Raymond du Temple, on connaît au moins un grand sculpteur de son temps, André Beauneveu, chargé de sculpter les tombeaux des premiers Valois, Philippe VI, Jean le Bon et Charles V, pour la nécropole royale de Saint-Denis. Son art réagit contre la sophistication des statues du début du siècle par un retour à la monumentalité et à la sobriété.
Charles V s'adressa à un autre sculpteur, anonyme, pour dresser deux statues de Saint Louis et de Marguerite de Provence à la porte d'une église de Paris. L'artiste les figura sous les traits de Charles V et de son épouse dans un style aussi dépouillé que celui de Beauneveu, avec encore plus de sensibilité dans l'expression de vive intelligence du roi. Ces deux statues, aujourd'hui au Louvre, ont été rapprochées des belles effigies de Jean de Berry, de sa femme, de Charles VI et d'Isabeau de Bavière qui décorent la cheminée de la Grande Salle du palais de Poitiers.
Charles V collectionnait les livres dans sa « librairie » du Louvre et fit travailler de nombreux peintres. Les Grandes Chroniques de France (Bibliothèque nationale) en gardent le souvenir, mais plus encore le Parement de Narbonne (Louvre), toile dessinée à l'encre, sur laquelle figurent Charles V et la reine en donateurs. C'est aussi à la fin du règne de Charles V qu'appartiennent les tapisseries de l'Apocalypse d'Angers, commandées par Louis Ier d'Anjou au lissier parisien Nicolas Bataille et au peintre Hennequin de Bruges. Il ne faudrait pas oublier que Charles V fut aussi amateur d'objets précieux. Son sceptre, au Louvre, très restauré, et la coupe du British Museum, décorée d'émaux, en restent des vestiges.
Un autre foyer se développe à Prague dans l'entourage de la cour de Bohême. Charles IV fait construire la cathédrale par Mathieu d'Arras, puis par Peter Parler. Toute une école d'enlumineurs illustre de remarquables manuscrits, comme le Passionnaire de l'abbesse Cunégonde, vers 1320, ou le Missel de Jean de Streda (Johann von Neumarkt), après 1350. Le Maître de Vyšší Brod peint tout un cycle sur panneaux, et, un peu plus tard, Maître Théodoric décore la chapelle du château royal de Karlštejn, de cent vingt-neuf peintures de saints et de prophètes. Ses figures sont massives et en même temps d'un dessin mou, qui, contrairement aux tendances générales de l'art du xive s., cède la prééminence à la couleur.
7. LA FIN DU MOYEN ÂGE

La seconde moitié du xive s. voit l'avènement de nouveaux styles dans l'architecture.

7.1. ARCHITECTURE
LE STYLE PERPENDICULAIRE

C'est en Angleterre que prend place la naissance du style perpendiculaire, qui s'éloigne de l'art gothique. Ce style apparaît dès le milieu du xive s., au chœur de la cathédrale romane de Gloucester, dont les parois latérales disparaissent derrière un réseau de panneaux de pierre découpés en rectangles. Le fond du chœur est remplacé par une immense verrière à fenestrage perpendiculaire. Les voûtes en éventail du cloître adjacent, élevées un peu plus tard, ont des supports dissimulés dans des niches qui tapissent les murs. Des triangles convexes partent de ces murs, s'arrondissent et se rejoignent sous un plafond plat, qui ne rappelle plus rien de la croisée d'ogives. Une broderie de motifs en léger relief couvre toute la voûte. Ce style, né dans l'ouest de l'Angleterre avant 1400, s'étend avec une vigueur nouvelle après la guerre des Deux-Roses. Il se manifeste dans l'architecture civile, à Oxford, à Cambridge, au palais d'Eltham. Il reparaît dans l'architecture religieuse, à Peterborough, et dans les grandes entreprises royales du début du xvie s., à la chapelle d'Henri VII à Westminster, où les voûtes en éventail se combinent avec des clefs pendantes, au cloître Saint Stephen de Westminster, œuvre de William Vertue et de Henry Redman, à Saint George's Chapel de Windsor, à la Chapelle de King's Collège à Cambridge, par John Wastell.
LE GOÛT DE L’ORNEMENTATION
L'exubérance du décor se retrouve ailleurs, sous d'autres formes. Elle prend un aspect particulier dans la Péninsule Ibérique, car les éléments gothiques s'y allient aux motifs de l'islām. Les « chapelles imparfaites » de Batalha, au Portugal, dès le milieu du xive s., déploient une végétation de pierre foisonnante qui semble croître dans une atmosphère de luxuriance tropicale. Cette richesse se retrouve à Belém, à la tour-lanterne de la cathédrale de Burgos, à l'Alhambra de Grenade et au palais de l'Infant à Guadalajara.

LE STYLE FLAMBOYANT

L'art flamboyant, en France et dans les pays du Nord et de l'Europe centrale, aime aussi la richesse décorative. Ainsi nommé à cause de l'usage qu'il fait des courbes et des contre-courbes, articulées en « soufflets » et « mouchettes », il apparaît à la fin du xive s.
Gui de Dammartin, architecte de la Sainte-Chapelle de Riom, paraît en avoir été l'un des initiateurs. La structure des voûtes sur croisée d'ogives ne disparaît pas comme en Angleterre, mais les nervures se multiplient, s'entrecroisent, se recoupent avec une grande fantaisie et s'enrichissent de clefs pendantes. Le même esprit inventif préside aux plans et aux élévations des églises, tantôt à nef unique, tantôt à trois vaisseaux d'inégale hauteur, tantôt églises-halles. Les murs reprennent de l'importance entre les ouvertures. Les piles se creusent, ondulent, se modèlent d'arêtes à angles vifs et montent d'un seul jet jusqu'aux voûtes, dans lesquelles elles se fondent. Les fenêtres s'ornent de réseaux flamboyants. La brisure des arcs s'assouplit, s'abaisse en anse de panier, se redresse en accolade.

Aux portails, la statuaire disparaît presque, étouffée par les socles, les dais, les gables et les pinacles ajourés et fouillés. Les motifs végétaux, feuilles piquantes, choux frisés, se découpent en un relief aigu et tourmenté. Les balustrades, les arcs-boutants perforés et contournés accroissent encore cette luxuriance décorative, qui alterne avec des pans de mur nu. Cet art connaît une faveur particulière en Normandie et dans le nord-ouest de la France : à Gisors, à Louviers, à Lisieux, à Saint-Maclou de Rouen, à Saint-Pierre de Caen, au chœur du Mont-Saint-Michel, à Saint-Vulfran d'Abbeville, à Rue, à Saint-Riquier ; mais il se répand partout : à Chartres, à la flèche de Jean de Beauce ; à Paris, à Saint-Séverin et à Saint-Gervais ; dans l'Est, à Notre-Dame-de-l'Épine, près de Châlons-sur-Marne, à Saint-Nicolas-de-Port ; sur la Loire, à Vendôme et à Cléry ; en Bresse, à la somptueuse église de Brou ; dans le Sud, au porche de la cathédrale d'Albi.
Le style flamboyant apparaît aussi en Allemagne à la fin du xive s., à Ulm, sous la direction d'Ulrich von Ensingen, qui construit peu après la flèche de la cathédrale de Strasbourg, terminée par Johannes Hültz. Saint-Jacques de Liège, la cathédrale d'Anvers, l'église de Bois-le-Duc cèdent à l'exubérance du décor, tandis que Notre-Dame de Halle, les églises de Leyde et de Dordrecht conservent une grande sobriété.
L'architecture civile adopte aussi les nouvelles formes, à l'hôtel Jacques-Cœur de Bourges, au palais de Justice de Rouen ou aux hôtels de ville du Nord, de Douai, de Compiègne, de Bruxelles ou d'Oudenaarde, avec leurs orgueilleux beffrois. Le château de Tarascon, les premiers châteaux de la Loire, Langeais, Loches, Chaumont, Châteaudun, Amboise, rappellent ce que furent les demeures princières de la fin du Moyen Âge.

7.2. SCULPTURE

À la cour de Bourgogne, au moment même où fleurit le « gothique international », Claus Sluter, originaire de Haarlem, apporte une vigueur et un pathétisme neufs à la sculpture. À Dijon, le portail de la chartreuse de Champmol et le calvaire du cloître de celle-ci, plus connu sous le nom de « puits de Moïse », révèlent une impétuosité dramatique, une plasticité des vêtements gonflés et cassés aux pieds, une recherche d'expression pathétique. La violence et le sens théâtral de cet art transforment la sculpture du xve s., et son écho résonne jusque dans la peinture des grands maîtres flamands. En Bourgogne même, Claus de Werve (vers 1380-1439), Jacques Morel, Juan de La Huerta (?-vers 1462), Antoine Le Moiturier continuent l'œuvre de Sluter.
Les thèmes douloureux se répandent, comme celui de la Mise au tombeau, traité vers 1453 à Tonnerre par Jean Michel et Georges de La Sonnette. Ce thème est repris bien des fois, à Monestiès-sur-Cérou par exemple, à Solesmes à la fin du siècle, dans un décor déjà italien. La Pietà, ou Vierge de pitié qui reçoit sur les genoux le corps du Christ mort, est un autre sujet dramatique souvent représenté à la fin du Moyen Âge, comme le sont les Crucifixions tragiques. Parmi les grands ensembles sculptés, il faut citer les portails de la cathédrale de Rouen, où travaillent Pierre Desaubeaux, Roland Leroux et Nicolas Quesnel, les statues de la chapelle de Châteaudun et la clôture du chœur de la cathédrale d'Albi, où se mêlent des influences bourguignonnes et d'autres venues de la Loire. Dans cette dernière région, en effet, la véhémence de Sluter s'adoucit et l'élégance sereine des sculpteurs de l'entourage de Charles V persiste. Ces tendances se notent au tombeau d'Agnès Sorel à Loches, dans la sainte Madeleine de l'église Saint-Pierre de Montluçon ou la Vierge du Marthuret de Riom, et plus encore chez Michel Colombe (tombeau des parents d'Anne de Bretagne à la cathédrale de Nantes). La région de Troyes se rattache encore à l'art gothique au xvie s., avec le Maître de sainte Marthe (église Sainte-Madeleine de Troyes), dont on retrouve la sobre expression de douleur dans la Pietà de Bayel et les Mises au tombeau de Villeneuve-l'Archevêque et de Chaource ; la Lorraine aussi, avec Ligier Richier.

La sculpture italienne se tourne dès 1400 vers la Renaissance, mais, dans les pays germaniques, on sculpte des retables de bois, en Rhénanie à Oberwesel ou à Marienstatt, à la fin du xive s., en Autriche à Sankt Wolfgang, non loin de Salzbourg, en 1471-1481. Le retable de Cracovie, par Veit Stoss, celui de Creglingen, par Tilman Riemenschneider, sont célèbres. À Anvers, à Bruxelles, des ateliers de retables sculptés, fourmillant de personnages, connaissent un grand succès.
L'Espagne est prodigue de sculpteurs. Des étrangers y travaillent, mais un art particulier s'y développe, empreint d'une fierté et d'une dignité propres à la Péninsule. Il faut mentionner le tombeau de Jean II et d'Isabelle de Portugal à la chartreuse de Miraflores ou le retable de sainte Anne à la cathédrale de Burgos parmi de nombreuses œuvres d'excellente qualité.
En Angleterre, à côté des reliefs en albâtre un peu commerciaux, on rencontre de très beaux monuments de bronze, comme le tombeau de Richard Beauchamp, à Warwick, par William Austen.

7.3. PEINTURE

En peinture, à la suite du grand courant international de la fin du xive s., les artistes se distinguent par leur nombre et par leur valeur.
Dans les pays du Nord, c'est l'explosion de l'art flamand, dont il suffit de rappeler les principaux interprètes : Robert Campin, Van Eyck, Van der Weyden, puis Bouts, Van der Goes, Memling. Les recherches de profondeur spatiale, d'atmosphère transparente, de luminosité marquent cette peinture, qui se dégage du microcosme de l'enluminure, tout en conservant le goût du détail et de l'ornement. Les compositions religieuses, les portraits réalistes, l'univers fantastique de Jérôme Bosch se succèdent. La moisson des chefs-d'œuvre flamands du xve s. influence la production artistique des autres pays et se répercute jusqu'en Italie, dans les milieux florentins les plus évolués.
Cette influence est particulièrement sensible en Espagne – qu'a visitée Van Eyck – , chez Lluís Dalmau (Vierge aux conseillers, Barcelone), chez Jaume Huguet ou chez le Maître de la Seo de Urgel. Les peintres les plus remarquables demeurent Bartolomé Bermejo (Pietà), Pedro Berruguete, qui mêle des expériences italiennes aux influences flamandes dans le Retable de sainte Eulalie, et, au Portugal, Nuño Gonçalvez avec le Retable de São Vicente.
L'art germanique, avec Stephan Lochner à Cologne, Lukas Moser, Hans Multscher et Konrad Witz dans le Sud, assimile les leçons flamandes et aboutit aux œuvres de Martin Schongauer et de Friedrich Herlin, qui annoncent les maîtres du xvie s.
La France aussi possède de grands peintres au xve s. Simon Marmion, le Maître de saint Gilles sont très influencés par l'art flamand, mais Jean Fouquet va beaucoup plus loin, dans l'enluminure comme dans les tableaux. Il allie dans un art très personnel les ordonnances et les tonalités italiennes à la fluidité atmosphérique nordique. Il faut en dire autant d'Enguerrand Charonton et du Maître de la Pietà d'Avignon, qui retrouvent dans leurs compositions la monumentalité des tympans des grandes cathédrales.
L'art du vitrail est particulièrement bien représenté à Rouen et à Strasbourg avec Pierre d'Andlau. Il faudrait encore parler de la tapisserie, qui fleurit à Arras, à Bruxelles et qui, à l'aube de la Renaissance, donne les tentures mille-fleurs, et aussi des trésors d'orfèvrerie, comme celui de la Toison d'or à Vienne.
Ce n'est donc pas un art moribond et décadent que la Renaissance est venue supplanter, mais un art très vivace, qui ne cessait de se renouveler depuis la création de Suger à Saint-Denis.

8. LE GOTHIQUE INTERNATIONAL
À la fin du xive s. se répand dans toute l'Europe occidentale, surtout dans la peinture, le style gothique international. C'est un art raffiné, si élégant qu'on l'a qualifié parfois de « maniéré », dans lequel les formes s'étirent, les lignes se courbent en une écriture compliquée, qui aime les couleurs rares et la somptuosité de l'or. Art de cour et de luxe, parfois artificiel, qui, pourtant, observe la nature, développe les recherches spatiales, le paysage et le portrait, il est lié aux mécénats princiers de la fin du xive s. et disparaît dès les années 1415-1420.
La peinture siennoise des Lorenzetti est à l'origine de ce style, qui prend son essor en Italie avec les Gaddi, Antonio Veneziano (actif de 1369 à 1388) et Lorenzo Monaco (vers 1370-vers 1422), dont la grâce et les couleurs vives se perpétuent au début du xve s. chez Sassetta et Gentile da Fabriano (vers 1370-1427). En Lombardie, Giovannino De'Grassi se révèle un extraordinaire animalier et, à Vérone, Pisanello exprime toute la préciosité, réaliste dans son observation, fantastique dans ses inventions, du gothique international. Au même moment, à Florence, Masaccio s'engage dans les voies de la Renaissance.
L'influence siennoise se répand de bonne heure en Espagne, vers 1380 en Catalogne avec Lluís Borrassá, puis avec Ramon de Mur et Bernat Martorell, à Majorque avec le Maître de sainte Eulalie et le Maître de Montesión, à Saragosse avec Zaortiga, à Valence avec Marzal de Sax.
L'Allemagne n'échappe pas à ce courant international, que l'on rencontre à Hambourg chez Maître Bertram, auteur du retable de l'église Saint-Pierre, et chez Maître Francke, à Dortmund chez Konrad von Soest. Il apparaît même en Bohême chez le Maître de Trebon, qui combine le graphisme élégant des silhouettes à des détails réalistes, avec des couleurs vives qui émanent d'une sorte de clair-obscur.

Les Pays-Bas participent au mouvement général, mais se trouvent liés à la Bourgogne par le mariage du plus jeune frère de Charles V, Philippe le Hardi, à Marguerite de Flandre, et c'est à Dijon qu'on trouve les peintures les plus caractéristiques, celles de Melchior Broederlam, originaire d'Ypres, auteur des volets peints du retable de la chartreuse de Champmol. À sa suite, Jean de Beaumetz (?-1396) exprime un art plus violent et plus dur.
En Angleterre, le Diptyque Wilton demeure le seul témoin important de cet art de cour.
À Paris, on rencontre des artistes souvent venus du Nord. Ainsi, Jean Malouel (vers 1370-1419), né à Nimègue, peint, avant son départ pour la Bourgogne en 1397, le Martyre de saint Denis , terminé par Henri Bellechose (?-vers 1445). Jacquemart de Hesdin entre au service du duc de Berry, termine peut-être le Psautier du duc, commencé par le sculpteur Beauneveu, et décore les Très Belles Heures de Bruxelles dans un style où se reconnaissent le souvenir de Jean Pucelle et l'influence d'Ambrogio Lorenzetti, notamment dans les compositions spatiales.

Les artistes les plus célèbres de la cour de Jean de Berry, les frères Limbourg, viennent de Nimègue, comme Malouel, dont ils sont les neveux, et voyagent dans toute l'Europe avant de se fixer en Berry. Ils incarnent le gothique international dans les miniatures des Très Riches Heures du duc de Berry (Chantilly). Ils imitent les Siennois dans la grâce calligraphique et la recherche de profondeur ; ils y mêlent observation naturaliste et fantaisie du décor, portraits de grands seigneurs et pays idéalisés.
Trois miniaturistes du début du xve s. participent encore au courant international : le Maître des Heures de Boucicaut , le Maître du Bréviaire de Bedford et le Maître des Heures de Rohan .
bjets précieux. La plupart ont disparu, mais le Petit cheval d'or d'Altötting (Bavière) en donne encore quelque idée. Les Vierges sculptées de Bohême, relevant du « beau style », peuvent être aussi rattachées au gothique international, de même que le Couronnement de la Vierge sculpté au-dessus de la porte du château de La Ferté-Milon. Ces sculptures précieuses font suite aux Vierges italiennes de Nino Pisano.

 

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